La
conception de l’histoire joue un grand rôle dans la conception que l’on peut
avoir de la politique. Si aujourd’hui on ne pense plus que l’histoire est
purement et simplement téléologique, quelle influence cela a-t-il sur la
politique ? L’histoire a-t-elle atteint un point culminant où plus rien de
nouveau ne peut être conçu ? Dans son ouvrage sur la philosophie
politique, Christian Ruby fait sienne cette préoccupation : Serions-nous
désabusés au point de croire que le champ du possible ouvert par la politique
se réduit à de simples modifications de l’existence individuelle ? Rien ne
peut-il être inventé ? Si l’histoire et l’ambition moderne d’émancipation
nous échappent, la politique dispose-t-elle encore d’une effectivité ?
Le constat que font beaucoup de nos contemporains est
qu’en matière d’action historique et politique, tout a été fait. Le champ des
possibles est fermé, il n’y a plus rien à inventer, ou du moins, le dernier
champ du possible reste la démocratie. La seule chose à faire est de perpétuer
au mieux les intérêts de chacun et du développement de nouveaux terrains
d’accomplissement (L’Europe, les organisations internationales), ou à en
observer la globalisation postmoderne. Nous sommes ici face à une conception
postmoderne qui nous projette à l’ère de la posthistoire. C’est le monde de la
routine et de la répétition où nous entraîne le développement de la technique.
Il nous faut sortir de là en affirmant avec force que « l’histoire ne « va » inéluctablement nulle
part. L’histoire résulte d’un type d’action, et en produit d’autres en ouvrant
des sens chaque fois multiples, dessinant des trames impossibles à subordonner
à un unique principe de déroulement et de totalisation. Aussi fait-elle place à
la politique en obligeant les hommes à se rassembler, à échanger entre eux, à
construire des stratégies au cœur des servitudes, rendant les altérités
visibles. »
Lorsque nous laissons la conception postmoderne de
l’histoire, nous voyons s’ouvrir la possibilité que la politique s’accomplisse
et se pense à partir d’une situation donnée. Cela nous permet de penser la
situation de l’Afrique où il y a une grande effervescence politique. On y voit un
grand désir de renouveau. A côté de ce mouvement d’invention démocratique, il y
a aussi des guerres et des génocides. Faudra-t-il se décourager du cas
africain ? Cette situation ne peut-elle pas être un aiguillon qui pousse à
chercher plus en avant ? Face à la démocratie, certains Africains
proposent l’alternative d’une « démocratie africaine. » Est-ce une
perspective sérieuse ? Que peut-on en dire ?
En abordant cette question
difficile, point n’est besoin de rappeler que l’Afrique n’est pas une monade enfermée
sur elle-même et qu’elle ressent tout le poids des transformations qui ont eu
lieu en ce moment dans le monde. Toute solution qu’elle peut trouver à ses
problèmes doit prendre en compte la présence des autres. Toute pensée
d’autarcie pour l’Afrique, dans ce monde où il est question de globalisation,
serait pour elle un suicide.
Nous croyons à la nécessité d’une
réflexion rationnelle sur le politique en Afrique. Bien que beaucoup de signaux
soient au rouge, il y a des signes d’espérance. La démocratie est un vaste
chantier où il faut inventer sans se raidir mais en même temps en laissant les
libertés foisonner. La philosophie politique n’est pas condamnée. Elle doit au
contraire se développer, plus particulièrement en Afrique pour ouvrir un avenir
plus radieux.
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