vendredi 31 mai 2013

Penser philosophiquement à partir des langues africaines (par Pascal Djimoguinan)


Les langues, en tant qu’elles sont une manière de concevoir le monde et de l’interpréter, portent une certaine manière de pensée. Bien souvent, le reproche adressé aux longues africaines est qu’elles seraient incapables d’abstraction. Nous voulons à partir d’une simple analyse d’une langue africaine (du groupe sara-baguirmien) montrer qu’elles arrivent à une conceptualisation dont la proximité avec la phénoménologie est étonnante.

            La phénoménologie, nous a habitués à penser le corps d’une certaine façon, plus particulière Maurice Merleau-Ponty avec le corps propre qui est conçu, non seulement comme une chose mais surtout comme condition de l’expérience en ce sens qu’il constitue l’ouverture au monde et la manière de l’investir. Nous voulons ici penser le corps à partir des langues sara pour voir les ouvertures que cela ouvre.

            Le corps et ses extensions : pour commencer la réflexion, il suffit de voir comment se rendent les adjetifs possessifs dans les langues sara lorsqu’il s’agit du corps. Il existe une manière particulière de rendre le possessif quand il s’agit du corps diffèrente de celle des choses :

Le corps est le RO (en ngambaye et en sar). Mon corps se dit « Rom », ton corps Roï, son corps Roé (ro-n en sar). Nous constatons qu’il suffit d’un ajout d’un court suffit à même le corps pour indiquer la possession.

Pour les objets, l’adjectif possessif n’est pas collé au nom mais le suit. Ainsi si l’eau se dit « Ma-n », mon eau se dira « ma-n leum » (Ma-n yam en sar), ton eau, « ma-n leui » (ma-n yaï) etc.

On se laisserait tromper par la traduction en français qui dirait de la même façon mon corps et mon eau. Nous avons vu comment l’adjectif possessif se construit autrement dans un cas ou dans l’autre.

Lorsqu’il s’agit de parler d’un lien de parenté, la construction à partir de l’adjectif possessif suit celle du corps. Ainsi mon fils se dit « ngonoum » ; ( dire ngon leum comme lorsque l’on rend le possessif pour les choses indique que l’enfant dont on parle n’est pas un enfant né de la personne mais est tout simple un enfant dont on a simplement la charge) ; les liens avec les personnes se rendent presque toujours comme s’il s’agissait du corps. Cela montre que les autres personnes sont une extension de mon corps et que c’est par mon corps que j’entre en contact avec eux. Il s’agit en fait d’un rapport entre deux corps et c’est à partir de mon corps que je peux deviner comment se comporte le corps d’autrui.

Il est encore plus intéressant de voir d’autre cas où le corps est perçu comme condition permanente de l’expérience. Deux cas nous aiderons à comprendre cela :

- En français pour exprimer l’état de maladie, on dit « je suis malade » ; cela ne se rend pas exactement de la même manière dans les langues sara. On dit plutôt « Mon corps me fait mal » (Rom tom, rom toroum). Il ne s’agit pas du corps objet, mais c’est moi, en tant que tel qui suis malade.

- J’ai honte se rend par « Mon corps me fait froid » (rom soloum, rom kouloum) ; nous ne prenons pas ici en compte la particularité du mouroum qui dit « son-yi ram » (la honte me fait). Mon corps me fait froid exprime ce que le moi comme une sorte d’inhérence de la conscience et du corps qui est perçue par moi.

  Le corps est perçu non seulement comme un principe d’individuation mais encore plus comme un sujet conscient, libre capable de prendre la parole. Nous pouvons dire que le corps exprime le concept de personne avec tout cela comporte. Il suffit de décrire les choses et d’aller aux choses mêmes pour voir toute la richesse de pensée que l’on pourrait tirer de cet exercice.

jeudi 30 mai 2013

Faut-il adopter la laïcité en Afrique ? (Pascal Djimoguinan)


Souvent, lorsqu’on parle de la laïcité en Afrique, la réaction de beaucoup est que l’africain est un homme religieux et qu’il ne faut pas trop parler de la laïcité. A tort ou à raison, la laïcité est confondue à l’athéisme. Lorsque le danger de l’intégrisme religieux se présente, on ne sait comment se prendre en Afrique. Ne faudrait-il pas revenir à une bonne compréhension de la laïcité. Cela aidera certainement à faire avancer le débat.
            La laïcité va en général avec la sécularisation. Il s’agit du principe de la séparation du l’église et de l’Etat. Ce principe veut qu’il y ait une impartialité de l’Etat  à l’égard des confessions religieuses. Ainsi, dans une perspective laïque toutes les croyances ou les convictions religieuses sont prises comme des opinions privées et n’ont rien à faire avec la marche directe de l’Etat. Il faut tout de suite ajouter ici que cela va de pair avec la liberté de croyance et de pratique à condition que cela ne vienne pas nuire à l’ordre pratique.
            L’intérêt de la laïcité conçue comme nous venons de la voir est qu’il n’y a pas de religieux d’Etat. Il y a un grand progrès dans ce domaine quand nous savons que pendant très longtemps, a prévalu la règle du « cujus regio,ejus religio » (De tel pays, de telle religion). Cela ce principe, la religion du prince devient la religion de l’Etat ; l’Etat adopte officiellement la religion au point où la législation du pays la précise comme telle.
            La laïcité n’est donc pas une interdiction aux religions ; au contraire elle les protège dans la mesure où elles peuvent être des facteurs de paix et peuvent aider les citoyens à servir leurs pays. Ce qui est exigé, c’est que l’Etat ne s’ingère pas dans la marche et le fonctionnement intérieur des confessions religieuses. La pratique religion devient une affaire privée. Chaque personne est libre peut, selon sa conscience, adopter une religion ou pas, sans que cela ne vienne troubler sa quiétude de citoyen.
            La laïcité bien comprise peut être en Afrique un facteur de développement de la paix civile en ce sens qu’il n’y aura de coercition d’aucune sorte selon qu’un citoyen soit de telle ou telle religion ou qu’il soit tout simplement athée ou libre penseur. Voilà pourquoi il est important qu’il soit précisé dans toutes les constitutions que l’Etat est laïc

mercredi 29 mai 2013

Créer une armée Africaine, est-ce la solution ? (par Pascal Djimoguinan)


A l’issue du sommet du cinquantenaire de l’UA à Addis-Abeba, les dirigeants africains ont annoncé la création prochaine d’une force de réaction rapide. Le syndrome malien a fait prendre conscience d’un manque mais pouvons-nous dire que la solution préconisée est une panacée ?

Les chefs d’Etat ont voulu, pour suppléer à la décision de créer une force armée qui durait depuis des années sans être suivie de fait, créer une force  de réaction rapide qui pourrait être opérationnelle immédiatement, et cela, grâce aux contributions immédiates de l’Afrique du Sud, de l’Ouganda et de l’Ethiopie.

Les tergiversons de l’Afrique de l’Ouest et l’intervention de la France au Mali (au risque de faire de ce pays une espèce de protectorat de la France) ont chatouillé les dirigeant africains dans leur amour propre et il voudrait éviter de se retrouver dans une pareille situation une autre fois.

La question essentielle qu’il faut se poser est de savoir si la solution ne peut être que militaire. Est-ce qu’en créant une armée africaine bien entraînée on éviterait du coup qu’il y ait des rebellions en Afrique ? Ne faudrait-il pas s’interroger sur les causes des troubles qui secouent l’Afrique ?

C’est une bonne chose d’arriver à créer une armée africaine mais il faudrait éviter qu’elle devienne une force aux services des pouvoirs despotiques. Les chefs d’Etat doivent prendre conscience d’une chose : le fusil a tendance de remplacer le cerveau de ceux qui l’utilisent. Il faut éviter de créer une armée au service de l’oppression. Nous ne voulons pas une armée africaine à l’image des armées nationales africaines.

En même temps que cette armée se crée, il faudra que se mette en place un mécanisme pour la liberté en Afrique. Il faudrait développer la société civile, encourager le journalisme, surtout au niveau de la presse privée, développer internet sur tout le continent.

L’Afrique de demain, pour être authentique, devra être une Afrique qui redécouvre les vertus de la prise de parole libre, notamment de la palabre.

mardi 28 mai 2013

CPI : il faut plus de dignité pour les peuples d’Afrique (par Pascal Djimoguinan)


Le président en exercice de l’Union Africaine (UA), le premier ministre éthiopien monsieur Hailemariam Desalegn a accusé lundi 27 mai 2013 la Cour pénale internationale de mener une sorte de chasse raciale contre les africains. Les chefs d’Etat présents ont demandé à ce qu’Uhuru Kenyatta ne soit pas jugé par la CPI, mais dans son pays, au Kenya.

La décision des chefs d’Etat à Addis-Abeba lors des assises de l’Union Africaine m’amène à m’interroger.

            Admettons que les critères de la Cour pénale internationale ne soient pas objectifs comme le disent ces chefs d’Etat et qu’ils sont empreints de racisme. Cela soulève alors quelques questions qu’il ne faut nullement éluder :

- Faut-il pour autant qu’un chef d’Etat puisse impunément commettre des exactions contre son propre peuple ?

- Pourquoi après cinquante années d’indépendance, les africains ne font pas confiance en leur justice ? Le pouvoir judiciaire dans nos pays est-il assez libre par rapport au pouvoir exécutif ?

- Quels garantis peuvent désormais avoir les peuples d’Afrique d’être en sécurité si la CPI ne peut plus être l’aiguillon qui taraude les Chefs d’Etat indélicats ?

            Il est quand même étonnant que la demande des chefs d’Etat africains ne soit pas assortie d’une clause qui appelle à la protection des populations et au respect des droits humains.

Si l’on pousse la logique des chefs d’Etat africains jusqu’au bout, nous pourrions dire que les dénonciations de Human Rights Watch, d’Amnesty International, de Reporters sans frontières et de beaucoup d’autres ONG ne sont que des manipulations faites par les pays Occidents. Pouvons-nous adhérer à une pareille assertion ?

            Lorsque nous voyons comment traîne le procès de l’ancien président tchadien Hissène Habré, nous nous demandons à quoi va nous engager le désir de nos chefs d’Etat quant à la poursuite de leurs pairs si jamais des procédures judiciaires sont ouvertes contre eux en Afrique. En plus, c’est bien de tenir à sa dignité et de faire juger les gens en Afrique mais il faut s’engager également à ce que le financement ne vienne pas de l’extérieur.

            Dans la décision de faire juger les Chefs d’Etat de se faire juger en Afrique, dans le propre pays, c’est l’argument de la dignité qui est le plus souvent avancé. Je pense que si, comme africains, nous tenons vraiment à notre dignité, il faut que nos chefs d’Etat commence à comprendre que leurs peuples ont  droit au respect, à la liberté et à la sécurité. Les peuples d’en bas ont aussi droit à la dignité, autant que les chefs d’Etat.

lundi 27 mai 2013

Faut-il avoir peur pour la République centrafricaine ? (par Pascal Djimoguinan)


La situation en Centrafrique semble hésiter avant de devenir normale ; la situation sécuritaire du pays est encore aussi chaotique. Il ne se passe de jours où on entende parler des braquages, de vols en pleine nuit etc. Que faut-il espérer pour l’avenir immédiat ?

            Le pouvoir a changé de main en RCA depuis le 24 mars. Cela fait déjà plus de deux mois et pourtant les autorités n’arrivent pas à assurer la sécurité dans le pays. On est en droit de se pose une question sous forme d’alternative. Le pouvoir n’arrive-t-il pas à assurer la sécurité de ses citoyens par incompétence ou par manque la volonté politique. Quel que soit l’option adoptée, cela est très grave.

            Si le pouvoir n’arrive pas à rétablir la sécurité dans le pays par incompétence, il est à craindre pour l’avenir du pays parce pendant tout le temps de transition, le pays risque d’être gérer par pur amateurisme et il faudra s’attendre au pire.

            Si c’est par manque de volonté politique, cela nous amène à nous interroger sur ce qui a poussé les nouvelles autorités à prendre le pouvoir. Est-ce que l’objectif était simplement de chasser l’ancien président du pouvoir ? Pourquoi alors remplacer un Etat en déliquescence par un Etat néant ?

            A moins qu’aucun élément de l’alternative ne soit vrai et que tout cela fait partie d’un plan bien préparé. Alors il manque de lisibilité à la politique appliquée. Cependant les éléments qui sont à notre disposition ne préfigurent rien de bon pour le pays. Il suffit tout simplement de les relever :

- L’insécurité continue à régner dans la capitale

- Dans la RCA profonde, des milliers de personnes fuient leurs villages et vivent en brousse par peur (leurs villages ayant été pillés et ses habitants rançonnés à chaque passage d’éléments « incontrôlés »).

- Depuis la marche des sélékas jusqu’à Bangui et encore aujourd’hui, les églises chrétiennes semblent être dans le collimateur. A l’intérieur du pays, presque toutes les paroisses catholiques ont été pillées, les moyens de transport arrachés, des agents pastoraux maltraités et menacés.

            Il y a des suspicions qui naissent et qui commencent à donner une origine religieuse de tendance islamique au pouvoir qui est en train de prendre place. Que faut-il en penser ? On trouve que les autorités actuelles sont très silencieuses sur ce point. Ils pourraient au moins apporter un démenti officiel et montrer par un geste fort que tout cela ne vient pas d’une volonté politique.

            Il y a un danger de nationalité à l’ivoirienne qui guette la RCA. Si les autorités ne réagissent pas rapidement pour que les centrafricains se sentent vraiment chez eux, ils finiront par soulever la question de la nationalité ; qui est centrafricain ? Est-ce par droit du sang et droit du sol ? Est-ce que la religion a quelque chose à voir dans la nationalité. J’espère qu’on n’arrivera pas là. S’il y a des mercenaires parmi les Sélékas, que les autorités les démobilisent avant que les choses ne s’enveniment.  Que Dieu sauve la RCA !

dimanche 26 mai 2013

Jubilé de l’UA, droit d’inventaire ! (par Pascal Djimoguinan)


L’heure est à la fête ! L’union Africaine fête ses cinquante ans. C’est la majorité pour l’Afrique moderne. Tous les regards sont tournés vers Addis-Abeba où ont lieu les festivités. Des invités illustres sont présents. Je voudrais tout simplement être l’empêcheur de tourner en rond. Si toutes ces lumières n’étaient que pour cacher les imperfections, si tout ça n’était que saupoudrage… La jeunesse africaine demande un droit d’inventaire… Pourquoi toute une génération a été sacrifiée sans qu’aucune voix ne s’élève, sans qu’aucune action d’envergure n’ait été entreprise ?

            Sur le plan économique, pouvons-nous dire que quelque chose de substantiel ait été fait en cinquante ans ? Nous avons entendu parler du NEPAD (nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique) et nous attendons. Ce qui est incroyable et c’est ce que nous avons appris pendant ces célébrations, c’est que 80% du budget de l’UA vient de l’extérieur. Dans ces conditions, pouvons-nous dire que l’UA dispose de la liberté de ses mouvements ?

            Sur le plan militaire, peut-on parler d’une armée africaine ? Nous nous rappelons toutes les difficultés pour faire venir au Mali les militaires africains pour contrer les islamistes ; il a fallu en tout attendre l’intervention de la France. Il y a aussi plusieurs points de tensions militaires en Afrique sans que l’UA n’arrive à intervenir d’une manière décisive.

            Pour l’aspect politique, nous voyons différentes décisions qui sont prises mais avons-nous vraiment avancé sur le plan de l’unité ? Nous avons eu le passage de l’OUA à l’UA sans que cela soit suivi concrètement d’un changement. Nous espérons que c’est le temps où les structures se mettent encore en place et que très vite cela sera suivi d’actes.

            Les peuples ne ressentent pas ce qui est fait au service de l’unité de l’Afrique au niveau de l’organisation. Nous pouvons dire que l’UA souffre d’un manque de cet élan panafricain qui animait les pères fondateurs. Il manque un leader charismatique qui puisse susciter la renaissance de l’Afrique.

            Nous avons attendu cinquante pour en arriver là. Nous ne pouvons plus attendre cinquante autres années. Nous avons passé du temps à parler, il faut maintenant les faits. Les différents projets doivent se mettre en place. Il faut que l’Union africaine passe du statut  d’idée à une réalité. Cette réalité peut se résumer en quelques réalisations assez simples : la libre circulation des peuples sur le continent, l’union douanière, une coopération entre les différentes universités et grandes écoles, le développement des routes et les moyens de communication sociaux. En 1963, le groupe dit de Monrovia l’a emporté sur le groupe dit de Casablanca. Laissons maintenant la place à un gouvernement africain.  S’il faut rêver, osons le…

samedi 25 mai 2013

Lire Jacques Maritain en Afrique ? (par Pascal Djimoguinan)


La pensée politique de Maritain à laquelle nous allons nous confronter est celle de son ouvrage christianisme et démocratie. Comment y entend-il l’interrogation sur le rôle du chrétien dans la vie politique ? Maritain ne se situe plus dans une perspective un peu défensive où le chrétien est tenu de dire pourquoi il veut faire de la politique. Pour lui, cela relève de l’évidence ; c’est pourquoi sa préoccupation est de rendre compte du mal que connaît la société parce que le christianisme n’inspire plus les actions au sein d’une civilisation qu’il a fait naître.
Comment en homme, en vivant sa foi peut participer à la construction de son pays ?  Cette question est très importante aujourd’hui où la religion semble susciter la réprobation de beaucoup de nos contemporains parce que assimilée à l’intégrisme et à l’intolérance. Nous pouvons entendre la voix de Jacques Maritain jusqu’ici en Afrique et en tirer quelque chose d’utile.
            L’intérêt de Christianisme et démocratie se trouve dans le fait qu’il se situe à un moment très important de l’histoire mondiale. Il a été écrit en été 1942, à un moment où le sort de la guerre pouvait encore sembler très inquiétant.  Sa parution par contre se situe au printemps 1943, c’est à dire à un moment où l’issue de la guerre était plus ou moins certaine.
            C’est pendant cette période  que de nombreux hommes et femmes se sont mis à rêver à la paix en se demandant si celle-ci ne sera qu’une conséquence de la fin des hostilités ou quelque chose qui devra se cultiver.
            Le fruit de cette réflexion est que la guerre s’est déchaînée parce que le monde était trop malade, et ces maladies-là ne guérissent pas d’un seul coup. Que doit-on donc espérer de la victoire qui se profile à l’horizon ? Doit-on penser que l’ordre ancien va se restaurer de lui-même ?
            Ce qu’on pouvait espérer, ce qu’on peut et doit espérer, c’est que la victoire, en détruisant l’esclavagisme totalitaire, ne débloque pas seulement l’histoire et n’ouvre pas seulement la possibilité d’un travail constructif, mais établisse réellement les conditions    positives premièrement requises pour ce travail. Au surplus si le combat de ceux qui            luttent contre le nazisme et ses satellites n’était pas réellement animé par un idéal     héroïque de libération de la vie humaine, et si la victoire n’apportait pas les bases d’une       réorganisation mondiale engageant l’effort des hommes dans une œuvre commune dominée par un tel idéal, la civilisation n’échapperait à un péril imminent de destruction que pour entrer dans une période de chaos, où après avoir vaincu    militairement le fascisme et le nazisme elle risquerait d’être moralement vaincue par leurs            succédanés.
Pour Maritain, une victoire militaire ne servirait à rien s’il n’y avait derrière un idéal qui puisse aider à transformer les choses dans le sens d’une vie beaucoup plus grande, beaucoup plus riche. En même temps qu’il y a la guerre, il y a des luttes plus intérieures dans le cœur et dans l’intelligence des hommes. Dans ce combat, seule l’espérance a un pouvoir capable d’aider les hommes à sortir victorieux des forces malsaines.
            Quand il y aura la paix, il y aura le triomphe de la liberté et le besoin d’une communauté supranationale se fera sentir. Des hommes formés dans cet esprit donneront la place à une nouvelle démocratie, dont l’inspiration chrétienne fera appel non seulement, en Occident, aux traditions vivantes de la religion du Christ, mais par tout le monde aux énergies morales de ‘l’âme naturellement chrétienne’.  
            Christianisme et démocratie est une analyse de la situation dans laquelle se trouvait l’Occident et un regard d’espérance porté  vers l’avenir. Maritain se sent le droit de réfléchir comme tous ses contemporains sur l’état où se trouve le monde pour chercher une solution aux maux qui minent sa société.
            Que cette lecture ouvre tout africain à penser l’avenir de l’Afrique et à le mettre en marche.

vendredi 24 mai 2013

Attentat terroriste en Afrique : à qui le tour ? (par Pascal Djimoguinan)


Alors que tous les regards étaient tournés vers le Nigéria avec la secte Boko Haram qui menace, les terroristes islamistes viennent de frapper au Niger. Partout en Afrique, la peur commence à monter. Les terroristes arrivent-ils ainsi à leurs fins ?

            Dans la matinée du jeudi 23 mai 2013, un double attentat a eu lieu au Niger, à Agadez et à Arlit, faisant 20 morts parmi les militaires et 5 parmi les assaillants. On compte également 30 blessés (16 militaires et 14 civiles). La revendication de cet attentat vient du Mujao et du groupe de Mockhtar Belockhtar qui menace de nouvelles attaques.

            On peut penser que le conflit a quitté le cadre restreint du Mali pour commencer à s’inséminer partout comme un cancer qui devient une métastase. Les attentats suicide avait commencé au Mali même et maintenant, ils ont franchi les frontières pour atteindre le Niger.

            La question que tous se posent mais dont personne n’ose en avoir la paternité est de savoir quel sera le prochain pays qui sera frappé. Personne ne veut le savoir mais tout le monde a son idée personnelle sur la question.

            Il faudrait de la vigilance partout en Afrique mais plus particulièrement dans la sous-région. Sans tomber dans la psychose, les pays qui participent à l’opération anti islamiste au Mali devraient renforcer leur sécurité.

            Il faudrait finir par deux réflexions dont la première peut s’exprimer sous forme de questions :

            - Dans une guerre classique, il est assez facile de savoir quand prend fin un conflit. Quand il s’agit d’une guerre asymétrique, quand peut-on dire qu’elle est finie ?

            - Si les terroristes qui ont fait ce double attentat sont bien ceux qui étaient au Mali, des indices montrent qu’ils ont bénéficié sinon d’un accueil, du moins des facilités de la Lybie. C’est ici que se pose le problème. On ne connaît un bon artisan qu’à la finition de son travail. Or la « fameuse communauté internationale » qui est intervenue en Lybie pour y remettre de l’ordre laisse ce pays comme l’asile de tous les terroristes de la région. Quand et comment va-t-elle faire la finition du travail commencé ? Cette communauté internationale porte une grande responsabilité sur ce qui va arriver et je propose que la procureure de la Cour pénale internationale (CPI) reste éveillée…

            Il faut croiser les doigts et attendre en espérant que les terroristes n’arriveront pas à leurs fins. J’espère que ce n’est pas qu’un vœu pieux.

jeudi 23 mai 2013

Les relations sociales ou l’art de gérer les distances


Les relations sociales sont ceux dont toute société prend un grand soin à codifier comme si toute la vie ne tenait qu’à ça. Evidemment, c’est vrai que la cohérence d’une société dépend de la manière dont elle gère les relations entre ses membres. Nous voulons tout simplement relever ce qui semble obvies  à tout le monde dans les manières de s’adresser les uns aux autres.

            L’individu semble croire que le monde fait partie de son corps. Ainsi, son désir est d’étendre son « je » à tout, dans une tentative d’appropriation de tout. C’est mon monde et je le domine. D’aucuns se rappelle la fameuse scène du film de Charlie Chaplin Le dictateur, où l’acteur joue avec un globe terrestre en répétant à chaque fois : « Mon monde, mon monde… »

            L’individu se rend très vite compte qu’il n’est pas seul et que le monde lui résiste. Il lui faut négocier avec une autre volonté. Cependant, il ne veut pas arriver à une simple reddition. Il cherche alors à mettre ce qui lui échappe à la périphérie la plus proche de son moi. Il s’adresse au « tu » comme si c’était une proximité non seulement spatiale mais de l’ego. Le tutoiement est de cet ordre.

            Lorsque l’individu se rend compte qu’il ne peut se tirer à si peu de frais, il réalise que l’autre est autre. Il y a une altérité irréductible au mois qui demande à être respecté dans son être autrement. La frontière se fait alors plus précise et il y a une discontinuité avec le « je ». Le vouvoiement nait alors : « veuillez vous asseoir… Veuillez agréer… ».

            La frontière devient encore plus claire dans une autre situation. Je ne puis m’adresser à autrui dans certaines circonstances comme s’il était là. La proximité disparait complètement et c’est la distance qui crée la relation. On ne s’adresse plus directement à la personne mais on le fait à la troisième personne : «  Que son éminence veuille bien m’excuser… »

            Dans certains groupes, il y a encore une autre forme de distance dans la prise de parole. Dans ces groupes, on ne peut s’adresser directement à ses beaux-parents. Même lorsque les interlocuteurs ne sont qu’à deux, la bru ou le gendre doit passer par une personne absente pour s’adresser à sa belle-mère ou son beau-père : « jeune garçon, dis à ton grand-père, ta grand-mère que la nourriture est prête… »

            Un autre cas très étrange est cité par Emmanuel Levinas dans « Ethique et Infini » où dans la prière juive, il y a dans une même phrase, le change du tu en il. « Dans certaines prières très anciennes, fixées par d’antiques autorités, le fidèle commence par dire à Dieu « tu » et finit la proposition commencée en disant « il », comme si, au cours de cette approche du « toi » survenait sa transcendance en « il ».

            Les formules de politesse permettent ainsi à la société de créer des distances entre ses différents membres et gérer ainsi la vie sociale afin que les choses se passent bien. Peut-on lier la naissance de la politique dans ces bonnes manières qui naissent du génie de chaque peuple ?

mercredi 22 mai 2013

Ma prière pour le Tchad (par Pascal Djimoguinan)


Depuis quelques jours au Tchad, il n’est question que d’arrestations. Il s’agit en fait de deux affaires différentes, d’un côté d’une tentative de présumé coup d’Etat, de l’autre des proches d’Hissène Habré. Il faut faire attention à ce que l’une des affaires, qui pourrait facilement trouver une réponse politique vienne télescoper l’autre qui est nécessaire à la guérison et à la reconstruction de toute une nation.

            Dans l’affaire Hissène Habré, l’histoire qui a semblé longtemps hésiter s’est brusquement accélérée. Les obstacles juridiques ont été surmontés et désormais, le procès pourra se tenir au Sénégal.

            Comme par ricochet, à N’Djamena des arrestations et des mandats d’arrêts ont été lancés contre les proches de l’ancien président. Enfant, la procédure est en marche et le procès pourra enfin avoir lieu. Les victimes et leurs proches en attendent beaucoup pour essayer de comprendre ce qui s’est passé et enfin faire le deuil. Dans cette histoire, il y a eu plus de 40.000 morts, beaucoup d’anciens prisonniers qui sont restés marqués à vie par les tortures et les violences subies.

            Il est dommage que ces événements important pour la nation tchadienne se trouvent fortuitement liés à d’autres arrestations qui elles sont liées à une histoire de présumé coup d’Etat.

            La question pour moi n’est pas de savoir s’il y a vraiment eu coup d’Etat ou pas. La question est de savoir si nous allons laisser cette histoire éclipser ce que nous pouvons, à juste titre appeler un événement de la renaissance du peuple tchadien. En effet les procès d’Hissène Habré et de ses complices constituent un moment fondateur dans la vie du pays. C’est une occasion pour le peuple du Tchad après avoir extirper le mal qui est en lui, de se réconcilier avec lui-même.

            C’est ici qu’il faut un geste politique. Il est possible aux dirigeants du Tchad de se comporter en véritable hommes d’Etat. Il est possible de laisser tomber cette affaire de présumer coup d’Etat pour se concentrer sur le procès d’Habré. Il faut un courage politique et je crois que les hommes politiques tchadiens en sont capables. Je leur fais confiance pour poser cet acte de refondation du peuple tchadien.

            Ma prière pour le Tchad est que nous puissions tirer un trait sur cette histoire de coup d’Etat, d’arrêter la procédure judiciaire en cours et de nous concentrer sur l’affaire Habré et ses complices. Occupons-nous de ce qui fera de nous un peuple unis.

mardi 21 mai 2013

L’Afrique et la souveraineté du peuple (par Pascal Djimoguinan)


Tous les gouvernements revendiquent leur légitimité de la souveraineté du peuple. Au nom de cette souveraineté, ils se croient tout permis et ils osent même agir contre la masse. Que faut-il entendre par cette expression et en quoi cela doit-il être pris en compte en Afrique ?

            Cette souveraineté si souvent invoquée, tout le temps bafouée est-elle illimitée à telle point que rien ne peut la circonscrire ? A-t-elle besoin de structure pour en limiter l’exercice ? Est-ce une dictature des masses ?

            La souveraineté du peuple, cela signifie qu’elle repose sur l’ensemble des citoyens qui vivent dans un pays. Il faut pour cela que chacun puissent exprimer sa participation à cette souveraineté ; il va sans dire que le corollaire en est le suffrage universel. Cela signifie qu’il faut passer par le vote pour exprimer cette souveraineté. Le peuple élit ainsi des représentants qui gouvernent en son nom. Ceux-ci peuvent ainsi se revendiquer de la souveraineté du peuple.

            Il est étonnant de voir que le continent où on se revendique le plus de la souveraineté du peuple est l’Afrique, surtout lorsque l’on se rend compte que c’est l’endroit où les » représentants du peuple » sont mal élus et où il y a le plus de manipulation des élections.

            Les africains devraient se réveiller et refuser que leurs droits soient confisqués par quelques hommes politiques. Il faudrait que les populations participent davantage aux débats et veillent à ce que tous les mécanismes prévus par la constitution soient respectés.

            Si un gouvernement africain veut se revendiquer de la souveraineté légitime du peuple, il faut organiser des élections libres et vraiment démocratiques afin que le peuple puisse exprimer sa souveraineté.

            Un défi est lancé à tout africain, plus particulièrement les jeunes ; il ne faut pas que la souveraineté soit arrachée au peuple mais que celui-ci puisse l’exprimer. Aucun homme politique, s’il est vraiment un démocrate, ne devait avoir peur que le peuple s’exprime librement.

lundi 20 mai 2013

Il y a trente ans, le sida


Le 20 mai 1983, le Professeur Luc Montaignier est son équipe de chercheurs de l’institut Pasteur publiait dans la revue Science la découverte du virus responsable de sida.

            Le monde s’est découvert sans défense devant ce fléau dont il n’existe toujours aucun vaccin. Cette maladie a provoqué des millions de morts et plusieurs personnes vivent avec le virus.

            Si au début il y a eu une polémique sur la paternité de la découverte du virus, très vite la solidarité sur le plan mondial a aidé à lutter contre ce mal.

            Alors que dans les années 80, la découverte de ce virus était synonyme d’une vie en sursis, aujourd’hui, grâce au progrès accomplis notamment de la trithérapie, il est possible à de nombreux porteurs de rester en vie. Ici encore la solidarité internationale a réussi à mettre les antirétroviraux à la portée de tous les continents. Beaucoup reste certainement encore à faire mais il est des moments où je me sens fière d’être humain quand je pense qu’il y a des hommes et des femmes qui luttent pour que tous les porteurs puissent avoir les médicaments.

            En même temps qu’un effort est fait pour ceux qui ont contracté le virus, il y a aussi le combat de la prévention auquel chacun de nous doit prendre part. Chacun de nous est responsable de la communauté humaine.

            Chacun de nous connaît quelqu’un qui est mort du sida. En souvenir de tous ces amis et toutes ces amies disparus trop tôt, faisons un effort pour mettre un frein à l’avancée de cette pandémie. Tous unis, nous vaincrons le sida.

20 mai, fête nationale du Cameroun (par Pascal Djimoguinan)


Le 20 mai, est le fête nationale du Cameroun ; ce pays aux multiples visages célèbre ainsi l’unité des deux parties qui la constituent, l’une anglophone et l’autre francophone. C’est une occasion pour se rappeler les formidables atouts dont dispose ce pays.

            Le Cameroun, comme aiment le dire ses habitants, est l’Afrique en miniature. Tous les climats s’y retrouvent, du Sahel à la forêt équatoriale, on peut retrouver toute l’Afrique en visitant les différentes régions du Cameroun. Si l’extrême Nord se trouve aux portes du Sahara, le Centre et l’Est sont des zones forestières tandis que l’Ouest est une zone très fertile avec de très beaux sites touristiques.

            Ce pays concentre en lui le résumé de l’histoire de l’Afrique. Des navigateurs portugais qui lui donnèrent son nom jusqu’aux allemands qui le colonisèrent avant qu’il se passe sous mandats français et britannique, le Cameroun connaît tout ce que l’Afrique a rencontré de meilleur et de pire.

            Le peuple est dynamique et entrepreneur. Le Cameroun a de très grands artistes, sportifs et de grands intellectuels dont de grands auteurs. Une très grande place y est faite à la culture.

            Le Cameroun a connu de grands nationalistes qui font la fierté de toute l’Afrique. Ils ont lutté pour que le peuple camerounais devienne un peuple unis. C’est un héritage que la jeunesse commence seulement à découvrir et à porter avec fierté.

            Pour paraphraser un grand homme du passé, le Cameroun « est un géant qui dort ». Le jour où il se réveillera, c’est toute la région de l’Afrique Centrale qu’il entraînera dans sa marche et servira ainsi de locomotive.

            A tous les camerounais, bonne fête nationale !!!

dimanche 19 mai 2013

25 mai 2013, 50 ans de l’unité africaine (par Pascal Djimoguinan)


Le 25 mai 2013, l’union Africaine aura 50 ans. Créée en 1963 sous le nom de l’OUA (Organisation de l’Unité Africaine), cette organisation connaître une mutation en 2002 pour prendre le non de l’UA (Union Africaine). Que retenir de ce demi-siècle d’existence ?

            A l’origine, c’était trente-deux Etats qui se réunir à Addis-Abeba en Ethiopie en 1963 pour créer l’OUA. Le désir était d’encourager l’unité et la solidarité des Etats africains. Comment cela peut-il se faire concrètement ? C’est ici qu’il y a une dissension qui est toujours à l’œuvre aujourd’hui. Deux forces s’opposent dans la vision de cette unité, une centrifuge et l’autre centripète. Il y a d’un côté, ceux qui étaient les partisans d’une « Afrique des nations » tandis que de l’autre, il y avait les partisans du fédéralisme. Ces deux tenants avaient à leur tête des hommes de poids ; d’un côté, il y avait le président Léopold Sédar Senghor tandis que de l’autre le président Kwamé Nkrumah. Finalement, ce furent les tenants de l’Afrique des nations qui l’emportèrent. Cela avait une grande importance sur le futur de l’Afrique. L’organisation, au lieu d’être un outil d’intégration des Etats fut un outil de coopération.

            Lorsque trente-neuf années plus tard, en 2003, l’OUA fut dissoute pour être remplacée par l’UA, c’était pour retrouver l’intuition des origines. Il fallait finir avec la balkanisation de l’Afrique et commencer une politique de l’intégration.

            Pour le moment, il n’y a encore qu’un frémissement vers l’union des Etats africains mais nous pouvons dire que de grands groupes se sont mis en place avec plus ou moins de bonheur. L’intégration ne pourra vraiment devenir effective que si elle prend appui sur des grands groupes régionaux solides.

            Ce cinquante ans doivent être l’occasion pour tout africain, de retrouver les idéaux des pères de l’indépendance. Où est désormais l’esprit du panafricanisme qui les animait. Que chacun de nous se mette au travail. Nous avons l’Afrique à construire et cela nous n’avons plus d’excuse. Retroussons les manches, la génération future nous demandera des comptes ! Bonne fête du cinquantenaire à tous les africains !

samedi 18 mai 2013

L’hymne national du Tchad : la tchadienne (par Pascal Djimoguinan)


            Il devient de plus en plus difficile d’avoir des informations sur l’hymne national du Tchad. Ce travail devrait être fait par un historien professionnel ; en attendant que ce travail soit fait, il faut recueillir ce qui peut l’être pour informer les plus jeunes.

            L’hymne national du Tchad depuis l’indépendance est « la tchadienne ». Il a été écrit, suite à un concours par un jésuite, le père Louis GUIDROL avec un groupe d’étudiants de l’internat saint Paul de Fort-Archambault (actuelle ville de Sarh). La musique a été composée par un autre jésuite, le père Paul VILLARD.

            Outre le refrain et le premier couplet qui sont connus, il y a trois autres couplets que très peu de jeunes (en dehors des élèves du collège Sacré-Cœur de N’Djamena) connaissent.

            Nous donnons ici les paroles de la tchadienne en y ajoutant celles qui ne sont pas connues.




Peuple tchadien, debout et à l'ouvrage !

Tu as conquis ta terre et ton droit ;

Ta liberté naîtra de ton courage.

Lève les yeux, l'avenir est à Toi.


1) Ô mon Pays, que Dieu te prenne en garde,

    Que tes voisins admirent tes enfants.

   Joyeux, pacifique, avance en chantant,

               Fidèle à tes ancêtres qui te regardent.

2) Race du Nord, et ses troupeaux immenses,

    Race du Sud, qui cultive les champs.

    Pasteurs, montagnards, pêcheurs, commerçants

    Soyons un seul grand peuple qui s’avance.

3) La houe en main, fais vaillamment ta corde,

    Vois tes enfants que tourmente la faim

     Les champs devant toi attendent ton grain

     Que l’huile coule et tes greniers débordent.

            4) Tes ingénieurs te traceront des routes,

                Tes médecins te rendront grand et fort,

                A l’œuvre étudiant, sans craindre l’effort ;

                Mets l’ignorance et le mal en déroute.

vendredi 17 mai 2013

In memoriam : Gentleman Vickey GG (par Pascal Djimoguinan)


Je suis le gentleman Vickey GG, j’aime beaucoup voyager, et je chante partout les merveilles de l’Afrique.
            Toute une génération d’Afrique a sinon moins fredonné dansé du moins avec cet air une fois dans sa vie. Celui qui a été le chantre de l’Afrique (de son vrai nom Gustave Gbénou Vickey) s’est éteint dans la nuit du mardi au mercredi (14-15 mai 2013). Sa renommée a largement dépassé les limites de son Bénin natal.
            Il a aimé cette Afrique : L’Afrique est un beau pays, le soleil brille tous les jours, et moi je m’y promène la guitare sous le bras. » Il l’a chantée, cette Afrique et il aidé à chanter ses merveilles.
            Les merveilles de cette Afrique, c’est dans la vie quotidienne : « Fais-toi plus belle, chérie fais-toi plus belle, allons danser, c’est la fête du village. » Cette vie si simple qui manque aujourd’hui dans tant de pays en Afrique à cause de l’instabilité politique. Pour tous ces enfants qui sont désormais bercés par les bruits de Canons, GG Vickey avait chanté des berceuses qu’on fredonne avec bonheur.
            GG vickey avait assez d’humour pour chanter « Citoyens, citoyennes, c’est GG Vickeey qui vous cause ; c’est le moment des élections, c’est la course à la présidence ; votez pour moi massivement  et vous verrez ce que je ferai je changerai notre pays d’un coup de bâton magique...Tout le monde travaillera… votez pour moi, votez pour moi. » Dans une sorte de parodie, il a su chanté toute la démagogie que la politique africaine connaîtra par la suite
            GG vickey a aussi chanté ses funérailles : « Le jour de mon enterrement, ils viendront me pleurerils diront l’Ave Maria au pied de ma tombe ; ils boiront du bon vin de palme pour me dire au revoir et quelques instants après, ils exprimeront leur joie : il est mort, le salaud de vickey est mort… »
            Gentleman Vickey, tu n’es pas un salaud. Tu nous as fait chanter, tu nous as fait aimer notre mère Afrique. Comme oraison funèbre, je reprends tes propres paroles : « Je te revois, je te vois étoile, mais plus comme autrefois. Auparavant, je riais étoile, mais aujourd’hui je pleure. » Que la terre te soit légère !!!

jeudi 16 mai 2013

Affaire Hissène Habré : La justice ou le pardon et l’oubli ? (par Pascal Djimoguinan)


Un léger frémissement au niveau de la justice au Tchad sur l’affaire Hissène Habré et ses complices.  Mahamat Djibrine dit « El djonto » est arrêté le 14 mai. On annonce qu’un mandat d’arrêt est lancé contre un autre tortionnaire de la police politique d’Hissène Habré et que trois autres seront bientôt émis. Tout cela arrive près de deux décennies après le règne de Hissène Habré, ancien président du Tchad. La justice n’arrive-t-elle pas toujours en retard comme les pompiers. Quelle peut-être l’importance d’un jugement qui semble venir trop tard ?

            Concernant le jugement de Hissène Habré, c’est déjà un signe positif que les choses bougent. Il faudra ouvrir les placards et sortir les cadavres. Pour tout le peuple du Tchad, cela servira de catharsis nécessaire avant que toutes les victimes commencent vraiment à faire leur deuil.

            Il est un fait qu’il faut retenir. Sans la justice, il ne peut y avoir de paix et de réconciliation. Cela étonnera peut-être le citoyen lambda. Quand les lois ne sont pas appliquées, on ouvre la porte à l’arbitraire et à l’impunité. On tend ainsi vers la mort de l’Etat et de la République.

            Pour clarifier les choses, il faut comprendre qu’on ne doit pas confondre l’oubli et le pardon. Les deux ne sont pas du même domaine. Si l’oubli est du côté de la mémoire, la pardon est du côté du cœur. Je ne peux pas décider d’oublier. Seul le temps fera que l’oubli fasse son effet. Le pardon qui vient du cœur (et que certains diraient de l’ordre de la grâce), est une décision personnelle à prendre malgré la mémoire que l’on a du fait posé. Malgré la blessure qui peut s’ouvrir chaque fois à l’évocation du tort subi, je décide de pardonner. En fait, si l’oubli recouvrait un fait, c’est qu’il n’y aurait plus rien à pardonner. Au pire des cas, oublier serait encourager l’injustice puisque qu’aucune mesure n’est prise pour arrêter le mal.

            Il y a un ordre dans le processus du pardon qu’il ne faut jamais inverser pour ne pas arriver à une situation contraire à celle que rechercherait. La justice doit suivre son cours avant que ne vienne le pardon et puis enfin l’oubli.

            On ne peut ni imposer le pardon à quelqu’un ni pardonner à la place des victimes. Le pardon est un acte personnel qui demande du temps et qui a surtout besoin de la justice. Laissons la justice suivre son cours et ne laissons pas prise à la vengeance.  La construction d’une nation prospère et réconciliée avec elle-même est à ce prix.

mercredi 15 mai 2013

Pourquoi le quatrième pouvoir fait-il si peur en Afrique ? (par Pascal Djimoguinan)


         
La démocratie s’est toujours méfiée de toute sorte de totalitarisme et de pouvoir absolu. Elle a essayé de mettre en place un système de séparation de pouvoir qui puissent s’équilibrer et éviter l’arbitraire et les abus. Les chantres de cette conception sont John Locke et  surtout Montesquieu.

            Cette séparation des pouvoirs distingue trois fonctions différentes au sein des régimes politiques : la fonction législative, la fonction exécutive et la fonction judiciaire.

- Le pouvoir législatif a pour fonction d’adopter les lois que les citoyens doivent suivre. Cette fonction est assurée par le parlement (et le sénat s’il existe).

- Le pouvoir exécutif est assuré par le gouvernement. Si le pouvoir législative adopte les lois, le pouvoir exécutif doit les exécuter.

- Le pouvoir judiciaire dépend des tribunaux et sa fonction est de faire respecter les lois.

            Si la doctrine de la séparation des pouvoirs insiste sur la fonction que chacun doit assurer, dans la pratique, il faut une grande vigilance parce que le pouvoir exécutif est toujours tenter de monopoliser tous les pouvoirs et de leur imposer son diktat. Ce glissement peut se faire d’autant plus facilement que le pouvoir exécutif fait souvent appel à la souveraineté nationale.

            A côté de ces pouvoirs classiques, on entend de plus en plus parler du quatrième pouvoir. Celui-ci concernerait la presse, les médias et tous les moyens de communication (dont les moyens sociaux modernes) qui permettent une forme de contre-pouvoir assez performant.

            S’il est plus facile pour un Etat totalitaire ou non démocratique de contrôler les trois pouvoirs classiques, cela est plus compliqué pour le quatrième pouvoir. Les gouvernements peuvent contrôler la presse et les moyens de communications officielles mais pas la presse privée.

            En Afrique où il y a souvent une collusion entre les trois pouvoirs classiques, tout l’arsenal judiciaire est utilisé pour mettre au pas le Quatrième pouvoir dont on se méfie à cause de sa liberté et de son indépendance par rapport aux doctrines officielles. Cela devient de l’acharnement quand il s’agit des blogs et autres moyens sociaux, surtout quand on connaît l’importance qu’ils ont eue dans le printemps arabe.

            De l’affaire Watergate aux Etats-Unis (1974) aux révolutions arabes, en passant par Wikileaks, le quatrième pouvoir a réussi à sortir de la tutelle des Etats pour voler de ses propres ailes.

            Les Etats en Afrique ne devraient pas se méfier du quatrième pouvoir mais plutôt savoir s’appuyer sur lui pour qu’il y ait plus de démocratie et plus de liberté. Les différents pouvoirs ne se contredisent pas mais ont un objectif comment, le développement des peuples.