samedi 29 février 2020

TCHAD:Contre la violence faite aux femmes, un geste (par Pascal Djimoguinan)


            Contre la violence faite aux femmes ces jours-ci au Tchad, plusieurs attitudes sont possibles.  On peut soit avoir peur et s’enfermer, on peut tout simplement ignorer car ça n’arrive qu’aux autres, on peut dire qu’on ne peut rien faire ou encore on peut montrer qu’on n’est contre ce fait qui se développe avec vigueur.
            Pour ma part, je voudrais m’afficher ostensiblement contre cette violence et prendre position. Le complice n’est pas toujours celui qui prend part activement à un méfait. On peut aussi être complice par omission, complice parce qu’on n’a pas pu s’élever contre un mal.
            Certaines personnes ne prennent position parce que cela ne les touche pas directement. Il faut faire attention car le mal est insidieux. On peut faire semblant de l’ignorer jusqu’au jour où l’on est soi-même pris dans ses filets. Il est alors trop tard pour le prévenir.
            Comment voir l’innommable s’installer dans nos villes sans réagir ? Ce qui se passe dans nos villes ces jours-ci remet en question tout notre existence. Qu’elle est l’attitude citoyenne que cela appelle ? Quelle est tout simplement l’attitude humaine que cela suscite ?
            Chacun de nous est interpelé au plus profond de son humanité. Chacun est interrogé en ce qui reste encore d’humain en lui (si par hasard toutes les guerres que nous avons connues auraient tué toute humanité en nous.)
            Après les assassinats de femmes du mois de février à N’Djamena, on ne peut pas tout simplement se réveiller le matin comme d’habitude et faire comme s’il n’y avait rien. Il n’est pas en notre honneur que N’Djamena ne soit connue dans le monde qu’en termes d’assassinats, de meurtres, de vols à main armée, de viol.
            Il est étonnant de constater qu’après le moment d’émoi suite à ces actes horribles, tout soit retombé dans le calme et qu’il n’y ait plus de suite. Ailleurs, il y aurait eu une marche blanche. Ici, tout se passe comme si on s’était habitué aux actes répréhensibles.
            Je ne peux croiser les bras et rester dans mon confort en attendant le prochain crime pour me révolter. Je m’élève contre ces crimes de manière claire. En cette journée du 29 février, je porte le blanc pour dénoncer cette violence faite aux femmes. Non, je ne suis pas d’accord !
Je ne suis pas d’accord qu’on tue des femmes dans nos rues et que nous soyons tranquilles !
Je ne suis pas d’accord que des actes les plus abjects se passent chez nous et que nous nous comportions comme si c’était normal !
Je ne suis pas d’accord que rien ne soit fait contre ce traumatisme que toutes les femmes tchadiennes ont subi !
Je ne suis pas d’accord que les femmes de chez nous aient peur de sortir le soir et qu’elles se terrent chez elles !
            D’où nous viendra l’espoir ? De nous-mêmes si nous sommes capables de nous élever ensemble contre la violence faite aux femmes !
            Si je ne peux rien faire de grand, toute cette journée, je porterai le blanc par ma mère, pour ma sœur, pour mes amies.



mardi 25 février 2020

Tchad: Stop à la violence faite aux femmes (Par Pascal Djimoguinan)


           Halte au Gynécide!
          Faut-il attendre l’ignominie, l’impensable pour que le message puisse passer ? Faut-il attendre que la moitié silencieuse et invisible de la société tchadienne soit agressée, violée assassinée pour que l’on prenne conscience de son existence ? Comment éduquons-nous nos enfants pour qu’on puisse en arriver là ?
            Comment avons-nous été aveugles à ce point ? Comment n’avons-nous pas pu percevoir que nos gestes quotidiens portaient les germes d’une violence future contre ce qui n’est autre qu’une partie de nous-mêmes ?
            Il nous faut désormais traquer dans les tréfonds de nos habitudes ces germes de mort que nous pouvons entretenir sous les noms d’une pseudo religion, de coutumes ou d’habitudes.
            Pourquoi éduquons-nous nos filles à se sentir inférieures aux garçons ? Pourquoi inculquons-nous à nos fils qu’ils valent plus que les filles ?
            En ngambaye nous les appelons « Dene », en sar, « Diyan », ce qui donne en diminutif «  » comme dans « Nénodji », ou « Yan » comme « Yantar ». Que ce soit en Ngambaye ou en Sar, ces diminutifs pour dire « Femme » sont ambigus car ils peuvent aussi signifier « Chose ».
            Il y a là dans la structure linguistique-même un processus inconscient de chosification de la femme. Ainsi, une femme devient « Une chose » à posséder, à utiliser et à jeter quand on n’en a plus besoin.
            Non ! La femme n’est pas un objet. Elle n’est ni à posséder, ni à être utilisé, ni encore moins à être jeté.
            Partenaire égale, oui. Objet à posséder, non. La femme n’est ni « Né », ni « yan », n’en déplaise les esprits chagrins maco.
            La femme est cet autrui transcendant devant qui je dois respect. Qu’elle soit mère, sœur, épouse, fille ou amie, elle est mon égale. C’est un manque d’intelligence que de la croire inférieure à moi. Ce n’est pas seulement un manque d’intelligence mais c’est le signe d’une perturbation psychologique et je devrais me faire suivre par les cliniciens si jamais je me trouvais dans cet état d’esprit.
            Pourquoi fait-il que seules les filles s’asseyent ou s’incline pour saluer les personnes adultes ? Le respect n’a ni sexe, ni âge. Éduquons nos enfants au respect sans tenir compte de leur sexe et du sexe de la personne à laquelle ils (elles) s’adressent.
            Chaque fois qu’une femme est agressée, violée, assassinée, c’est toute l’humanité qui s’avilie et qui en porte les taches.
            Chacun de nous est responsable d’une violence faite contre une femme puisque par notre éducation, notre culture, nos habitudes, nous sommes complices. 
            On ne peut pas manquer de respect à une femme et dire après qu’on honore sa mère, qu’on aime sa sœur. Ce qu’un homme fait à une femme, c’est à toutes les femmes qu’il le fait.
            De grâce, osons devenir humains. Arrêtons toutes sortes de violence contre les femmes.
            A toi maman, à toi ma sœur, à toi chère épouse, à toi chère amie, je demande pardon pour le mal que depuis des générations je te fais. Éduque-moi à te respecter. Pardonne moi !!!