« Soumettez-vous à Dieu et résistez au démon : il s’enfuira loin de vous. Approchez de Dieu et Lui s’approchera de vous. Pécheurs, enlevez la souillure de vos mains ; hommes partagés, purifiez-vos cœurs. Abaissez-vous devant le Seigneur, et il vous élèvera » (Jc 4,7-8.10).
Chers frères et sœurs
Bien-aimés de Dieu dans le Christ
C’est en « pèlerins de l’espérance » que nous sommes entrés dans
cette année jubilaire. Le Carême est une étape importante de notre marche
jubilaire et c’est l’occasion de nous rendre compte des grâces déjà reçues du
Seigneur au niveau personnel, familial ou ecclésial, dans l’espérance
d’autres, plus abondantes.
C’est d’abord une marche d’espérance de libération. Nous nous
engageons dans une marche dont le but est de nous libérer de notre égoïsme, de
tout ce qui nous retient prisonnier de nous-même et nous éloigne de nos frères
et sœurs. C’est une marche en Eglise, une marche synodale avec tous ceux qui
composent notre Eglis-Famille de Dieu.
C’est une marche d’espérance de conversion et l’Eglise
notre Mère dispose des moyens pour soutenir nos efforts de conversion
personnelle ou communautaire dans cette marche d’espérance de libération. Elle
commence avec la réception des cendres, signe d’humilité et expression de notre
fragilité devant le péché. Mais notre espérance en la toute-puissance de Dieu
nous donne des forces et nous rend vainqueur dans la lutte contre le mal.
La prière et en
particulier l’adoration silencieuse devant le St-Sacrement nous permet de nous
libérer des préoccupations ordinaires pour donner plus de temps à Dieu. Le jeûne
signifie que la Parole de Dieu est la vraie nourriture pour notre vie spirituelle
et nous la mettons au-dessus des besoins naturels. L’aumône n’est pas un
simple geste de pitié, mais un geste de partage qui exprime l’attention et l’amour
que nous portons aux autres, spécialement ceux qui ont besoin de notre aide.
Les autres dévotions, en particulier le chemin de croix et le rosaire
nous font revivre spirituellement notre marche à la suite du Christ et nous font
faire la révision de notre foi. La pratique des œuvres de miséricorde (visite
des malades, des prisonniers, assistance diverses, accueil des étrangers…) nous
permet de rencontrer le Christ en personne dans ces frères et sœurs privés de santé,
de liberté ou de sécurité qui attendent notre aide.
Le Carême est surtout un temps de combat spirituel personnel et communautaire…
C’est le temps favorable pour combattre les maux qui nous fragilisent et nous
empêchent de nous épanouir comme chrétiens dans notre vie familiale ou en
Eglise-Famille de Dieu. Aussi, j’invite les chrétiens qui vivent une situation
irrégulière dans leur ménage (concubinage refus de célébration du mariage
sacramentel…) ou dans leur vie chrétienne (fréquentation des marabouts, des
devins ou des sectes) à se sortir de ces situations et à mettre de l’ordre dans
leur vie chrétienne. Sans le savoir, ils s’éloignent petit à petit de la vie de
la communauté chrétienne, ne participant plus aux CEB et ne donnant plus les
cotisations de l’Eglise. Sans rejet de la foi, ils finissent par être
indifférents aux exigences de leur baptême.
Nos organisations paroissiales et nos mouvements souffrent des querelles
de leadership ou des jalousies entre les membres et des
petites divisions naissent. Certains responsables ne vivent pas en règle avec
la foi chrétienne ou ne dirigent pas les autres avec l’esprit chrétien. Je les
invite à revenir à leurs statuts, à les respecter et à les appliquer pour
donner un témoignage chrétien de l’autorité qui est un service gratuit.
Nos commissions Justice et paix ont de la peine à se faire entendre et il y
a encore trop de silence des chrétiens face aux injustices et aux exclusions
sociales et religieuses dont ils sont les premières victimes. L’engagement
sociale des chrétiens souffre encore des manipulations politiques et des
complicités ethniques. Les chrétiens doivent proscrire toute parole qui divise,
les insultes, les moqueries, les provocations inutiles… Cela ne construit ni la
famille, ni la société, ni l’Eglise.
Je voudrais vous interpeller sur un phénomène qui est une grande source d’inquiétude
pour nous vos pasteurs. C’est la gestion des funérailles. Certains
comportements méritent réflexion car il y a un mélange de la culture
traditionnelle avec les cultures d’importation qui se manifestent dans
certaines conduites au cours des funérailles et qui sont contraires à l’Evangile.
Je veux souligner entre autres, les mauvais traitements que subissent les veuf/ves
ainsi que les orphelins en cas de décès du conjoint. Les biens du défunt sont
séquestrés par des « parents » …parfois chrétiens, qui s’en
approprient au nom de la « famille » et excluent les vrais membres de
la famille éprouvés. C’est une injustice grave qu’il faut corriger.
Pour bien vivre pleinement l’esprit de l’année jubilaire, je demande à tous
de faire des efforts pour que règne un peu plus de justice et de paix dans nos
relations familiales et sociales. Que ceux qui sont en conflits cherchent des
chemins de réconciliation. Que les employeurs (familles, entreprises, sociétés,
économat diocésain, paroisses, presbytères, communautés religieuses, écoles,
institutions sociales…) traitent les employés avec justice en respectant les
normes du droit.
Le Carême est aussi le temps des sacrifices pour manifester
notre reconnaissance à Dieu et notre amour de l’Eglise. Nous sommes appelés à
accomplir notre « devoir pascal ». Il consiste à
fréquenter les sacrements de la réconciliation et de l’Eucharistie et à s’acquitter
de deux contributions à la vie de l’Eglise : la dîme et le denier du culte.
La dîme est le reversement à l’économat diocésain du 1/10 de tout ce que le
chrétien gagne dans l’année. Elle est destinée à faire vivre les prêtres. Le
denier du culte est l’équivalent du salaire d’une journée de travail ;
il est reversé pour soutenir l’archidiocèse dans l’entretien des lieux de culte
ou la construction de nouveaux.
Ces deux contributions sont obligatoires et peuvent se faire en
espèce ou en nature ; elles n’excluent pas les autres contributions dites « volontaires » car les montants ne
sont pas fixés. Ce sont : les quêtes ordinaires de la messe et les dons
faits par les fidèles aux prêtres pour les besoins du presbytère ou de la
paroisse. J’invite tous les fidèles à méditer cette sentence du Siracide et de
s’acquitter de ce devoir pour le plus grand bien de notre Eglise-Famille de
Dieu :
« Consacre de bon cœur à Dieu
le dixième de ce que tu gagnes. Donne au Très-Haut selon ce qu’il te donne et
sans être regardant, selon tes ressources car le Seigneur paye de retour ;
il te rendra sept fois plus que tu n’as donné » (Si 35,14-15).
Les fidèles catholiques ne manquent certes pas de générosité mais les
fruits de cette générosité sont souvent mal orientés ou mal gérés. Nous
constatons qu’avec le nombre des fidèles tous les dimanches à la Messe et celui
des haut-cadres qui sont parmi nous, nous ne soyons pas capables depuis huit
ans de finir la construction d’une seule église paroissiale ou d’offrir une
maison d’habitation convenable à nos prêtres, dans l’enceinte de nos paroisses.
L’archidiocèse ne vit pas des fonds spéciaux venant de Rome comme certains
le pensent, mais de l’apport des fidèles et la richesse de l’Eglise, ce sont
les fidèles et ce qu’ils peuvent mettre en commun pour soutenir ses ministres
et développer ses activités. Ceux et celles qui ont les moyens ne doivent pas
hésiter ou avoir peur de faire des offrandes substantielles, pas seulement à la
demande, mais volontairement pour soutenir les projets de l’Eglise.
Nous constatons aussi que nos fêtes liturgiques (baptême, mariage,
ordination, vœux) et familiale (anniversaire, diplômes ou promotion) occasionnent
des dépenses énormes, surtout en nourriture, en boissons alcoolisées… sans
compter les dépenses parallèles et non essentielle : protocole, tenue d’honneur
etc… Ce sont là des sources de gaspillage et d’appauvrissement de nos familles
et de nos communautés. Apprenons à vivre dans la sobriété, à prévoir,
à épargner pour investir dans les domaines plus
productifs afin d’améliorer les conditions de vie de nos familles et de notre
Eglise.
Chers frères et sœurs, bien-aimés de Dieu,
Même si ce message est centré sur la vie de notre Eglise-famille de Dieu
qui est à N’Djamena, nous sommes appelés à regarder bien au-delà de nos
frontières. La Conférence des Evêques du Tchad (CET) se prépare à accueillir en
janvier 2026 la XIIIe Assemblé plénière de l’Association des
Conférences Episcopales de la Région Afrique Centrale (ACERAC). Le choix de N’Djamena
pour abriter ce grand événement nous honore, mais il est aussi une lourde
charge qui nous demande une bonne organisation, et une bonne gestion.
Nous avons mis en place une organisation chargée de sensibiliser d’abord
les fidèles catholiques. Les membres sont issus de toutes les composantes de de
notre Eglise-Famille de Dieu. La préparation et la réalisation de cet événement
d’église constituent des lieux d’exercice de notre synodalité et de notre unité
ecclésiale. Vous serez sollicités à tous les niveaux et vous aurez sûrement à
consentir des sacrifices sous forme de dons en espèces, en nature ou en temps.
Je suis sûr que vous y contribuerez généreusement bien au-delà de ce qui vous
sera demandé.
Puisse le Seigneur nous accorder un fructueux pèlerinage d’espérance.
Puisse-t-il nous maintenir unis et solidaires dans notre marche derrière lui,
vers Pâques. Ma prière vous accompagne tous, en particulier les communautés du
Kanem-Lac Bahr El Gazal – Borkou Tibesti. Dites aux catéchumènes que je pense
beaucoup à eux et que je suis impatient de les accueillir bientôt à la Table
eucharistique de la grande Famille de Dieu.
Que son Nom soit béni maintenant et toujours.
Priez et faites aussi prier pour mi s’il vous plaît.
N’Djamena 05-03-2025, jour des cendres 2025.
+ DJITANGAR Goetbé Edmond
Archevêque métropolitain de N’Djamena
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