jeudi 24 mars 2022

TCHAD : Lutte contre les mutilations génitales (par Pascal Djimoguinan)

             A l’instar d’autres pays, le Tchad s’est engagé dans la lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF). Il a ratifié les conventions internationales protégeant les droits des femmes et des enfants. Il a, en outre, adopté des textes sur le plan national pour lutter contre les MGF ; on peut citer en l’occurrence la loi n° 006/PR2002 du 18 avril 2002, portant promotion de la Santé de la Reproduction interdit les MGF dans son article 9.

            Malgré ces engagements étatiques et aussi des différents groupes de la société civile et religieuse, la lutte contre les MGF semble marquer le pas. La pratique continue dans la discrétion.

La persistance de cette pratique détonne. Il fallait donc s’interroger si cette pratique a toujours existé dans le sud du Tchad, plus précisément dans le grand Moyen-Chari.

Les élèves de la classe de 1ère D2 du Lycée-Collège Charles Lwanga de Sarh ont entrepris une enquête sociologique pour savoir s’il n’existait pas une autre pratique, au sud du Tchad, particulièrement dans le Moyen Chari avant l’introduction de l’excision.

Il en ressort que bien avant l’introduction de l’excision, il existait une initiation de femmes, n’ayant aucun rapport avec l’excision ; il s’agit du « Ndo gɔ́ŕ ». Elle se faisant pendant une période de réclusion d’environ trois mois en brousse. Cette initiation porte principalement sur les conseils et la formation donnée aux néophytes.

Nous avons retenu ici, les apports de quelques élèves, représentatifs des autres.

Valerie NANDOJO KONGAR :

            L’initiation des femmes est un acte ou un processus qui permet d’apprendre les valeurs traditionnelles ou culturelles aux jeunes filles. Au Sud du Tchad, il existe plusieurs ethnies et chacune d’elles a sa culture ou tradition. Il s’agit de dire ici qu’elle genre d’initiation existait au sud du Tchad avant l’introduction de l’excision.

            L’initiation consiste à apprendre aux jeunes filles les valeurs traditionnelles. Au sud du Tchad, chaque ethnie pratiquait l’initiation à sa manière. Pour les Sar, avant l’introduction de l’excision, on rassemblait les jeunes filles en brousse pour la formation pendant plusieurs jours avant de les ramener à la maison. Cette formation consistait à montrer aux jeunes filles comment saluer, parler, demander quelque chose à un homme. Les filles apprennent qu’il faut se lever tôt pour balayer et préparer à manger. L’initiation consiste à montrer à ces filles la manière de s’habiller, de prendre part aux réunions, aux funérailles et aussi comment se protéger pendant la période des menstruations. Cette initiation s’appelait « Ndo gɔ̄ŕ »

            Dans d’autres ethnies par contre, la fille était appelée à rester auprès de sa maman pour la formation ; cette formation se passait aussi autour du feu la nuit et on parlait alors de « Tahowndal ».

            Bref, l’initiation des femmes était une pratique qui permettait aux jeunes filles de connaître les valeurs traditionnelles. Cette pratique était particulière dans chaque ethnie et se pratiquait de diverses manières.

 

            Antoinette DJERE :

            Par définition, l’initiation est le fait de donner les premiers rudiments d’une science ou d’un art à une personne ou à un groupe de personnes. Nous allons tenter de cerner en quoi consistait l’initiation des femmes au sud du Tchad avant l’introduction de l’excision.

            Jadis, nos grands parents pratiquaient une initiation féminine. En effet, cette initiation consistait à transmettre aux filles les valeurs culturelles traditionnelles de l’Afrique.

            Au sud du Tchad, chez les sar, cette initiation était appelée « Ndo gɔ̄ŕ ». On rassemblait les filles en brousse pour une durée de trois mois au cours de laquelle elles recevaient des notions sur les qualités de la femme qui sont entre autres : le respect de soi et d’autrui, la fidélité, la propreté, la solidarité, l’amour du travail, ainsi que les autres qualités d’une bonne femme. Cette initiation rendait les filles aptes à participer à divers préparatifs touchant les cérémonies d’initiation des jeunes garçons. Cette initiation des filles porte aussi le nom de « l’initiation aux conseils ».

            Pour conclure, nous pouvons dire que l’initiation des femmes a existé au sud du Tchad bien avant l’introduction de l’excision. Elle permettait d’éduquer les femmes. Il faut se demander pourquoi elle a aujourd’hui disparu pour faire place à l’excision.

 

            Hervé NDIL ALADOUMADJI :

            Par définition, l’initiation est le fait d’admette à la connaissance ou au culte d’un mystère religieux, aux pratiques d’une société. En effet, auparavant, les femmes étaient initiées avant l’introduction de l’excision. En quoi consistait cette initiation ? Cette question fera l’objet de notre travail.

            Avant l’introduction de l’excision au sud du Tchad, les femmes étaient initiées. En effet, c’est un privilège pour elles car cela ne concernait pas n’importe quelle femme. Au sud du Tchad, chez les sara Madjingaye, cette initiation était appelée « Ndo gɔ̄ŕ ». Seules les filles de la noblesse, des privilégiées, étaient initiées. La durée de cette initiation était de trois mois. Les filles se retiraient en brousse pour apprendre beaucoup de choses dont la qualité d’une femme exemplaire, respectueuse. Parmi les valeurs transmises, nous pouvons citer les suivantes : une femme doit ̂être réservée quand elle rit, surtout dans les lieux publics ; elle ne mange pas debout, ni en marchant ; la façon de s’habiller dans la société, la propreté aussi bien à la maison que dans la société, la solidarité et le travail bien fait. Cette initiation permettait aux femme d’assister aux cérémonie concernant l’initiation des garçons. Selon une légende, le secret de l’initiation aurait été découvert par les femmes qui l’ont ensuite transmis aux hommes qui finiront par les exclure de cette pratique.

            En conclusion, nous pouvons dire qu’avant l’excision, les femmes avaient une forme d’initiation au Tchad. Celle-ci consistait à transmettre une éducation, et des qualités telles que la fidélité, le respect et l’amour du travail. Il faut se demander pour quoi l’excision a remplacé cette initiation féminine.

 

            Armel Didier KOINA ASTA :

            L’initiation se définie comme étant l’ensemble des cérémonies introduisant quelqu’un dans une société secrète. Autrefois, avant l’introduction de l’excision qui vient des arabes, les femmes étaient initiées. Dans le Mandoul, on appelait cette initiation « gɔ̄ŕ ».

            Cette initiation ne concernait que les filles de la classe des nobles et celle de la classe des privilégiées. Les filles passaient trois mois en brousse et revenaient maquillées au village pour la danse. Durant leur séjour en brousse, elles apprenaient la manière de vivre dans la société. L’initiation consistait à transmettre aux filles des valeurs traditionnelles telles que le comportement ; elles devaient être respectueuses envers les autres, car une bonne femme est celle qui écoute les conseils qui lui sont donnés. Les filles ne doivent pas manger en cours de route, debout ; elles doivent s’asseoir avant de saluer les aînés. Elles apprenaient à s’habiller convenablement, c’est-à-dire d’une manière décente Elles devaient marcher et rire en suivant des normes que voulait la société. Elles apprenaient la propreté, aussi bien en ce qui concerne la nourriture que pour le corps. Il leur était enseigné la bonne manière de s’occuper de leur mari.

Après l’initiation, elles pouvaient préparer la nourriture pour l’initiation des garçons et pouvaient également prendre part aux différentes réunions qui se tenaient dans les villages.

Tout ce savoir se transmettait de génération en génération.

L’avantage de l’initiation traditionnelle féminine était que les femmes n’étaient pas exposées aux problèmes liés aux dangers de l’accouchement comme c’est le cas avec les femmes excisées. Il faut s’interroger sérieusement sur l’abandon de l’initiation féminine au profit de l’excision. Ne faudrait-il pas y revenir ?

 

Mahamat Adam YOUSSOUF :

 L’initiation dans son sens le plus couramment utilisé désigne une étape de la vie ou une procédure qui permet à un adolescent(e) de devenir mature. L’excision, d’un autre côté, est une pratique qui consiste à la mutilation de la femme. En quoi consistait l’initiation des femmes au sud du Tchad avant l’introduction de l’excision ?

De nos jours, force est de constater que l’initiation fait l’objet d’une interprétation différente de l’ancienne. Jadis, l’initiation des jeunes filles au sud du Tchad consistait à un moment d’isolement en brousse avec des ainées, celles ayant déjà bravé le stade de l’initiation et qui sont devenues femme car pour être femme, il fallait avoir été initiée. Ces jeunes filles, pendant la période de réclusion en brousse, recevaient des enseignements dans la perspective de les aider à bien gérer leur foyer après le mariage. Ainsi, une femme doit obéir à son mari, ne jamais propager les problèmes conjugaux et garder les secrets de son mari.

Tous ces enseignements étaient prodigués aux jeunes filles et c’est après avoir franchi ces étapes qu’elles étaient considérées comme des femmes dans la société.

L’initiation des jeunes filles, jadis, consistait juste à un enseignement du savoir faire et du savoir vivre aux jeunes filles pour leur permettre de mener une vie respectueuse.

De nos jours, avec l’introduction de l’excision, l’initiation des jeunes filles ne consiste malheureusement plus à un enseignement, mais plutôt à une mutilation de la femme car on fait l’ablation de certains organes et cela les expose à plusieurs dangers.

De tout ce qui précède, l’initiation qui avait lieu avant l’introduction de l’excision avait beaucoup d’avantage par rapport aux différents dangers inhérents à l’excision.





vendredi 11 mars 2022

Comptine Mongo : Ngon, ngon, kó̰ḭ́ ɔw̄ rá (par Pascal Djimoguinan)

 Ngon, ngon, kó̰ḭ́ ɔw̄ rá ?

Yaá ɔw̄ goulə́ýí

Gouləyi rí

Gouləyi mēndē

Mēndē ri ?

Mēndē ta

Ta rí ?

Ta bāā

Bāā ri ?

Bāā ndo̰

Ndo̰ rí

Ndo̰ yə́gə̄

Yə́gə́ rí ?

Yə́gə̄ kusə

Kusə rí

Kusə wālē

Wālē rí

Wālē wale !

jeudi 10 mars 2022

Le Tchad de mon cœur (par Pascal Djimoguinan)

            Aujourd’hui, je voudrais parler du Tchad de mon cœur. Sans passion, sans grief et sans rancune. Je voudrais parler de la patrie, la terre des pères. Je voudrais parler sans communautarisme, sans prendre partie pour le Nord, ni pour le Sud, ni pour l’Est, ni pour l’Ouest.

            Le Tchad de mon enfance ! Le pays que j’aimais et que je voudrais retrouver.

            Quand j’étais petit, nous chantions toujours cette chanson que je dédie à tous les tchadiens aujourd’hui :

Ô Tchadiens, ô Tchadiens mes amis,

Nous avons assez dormi,

Le travail nous attend, vivent les Tchadiens, Tchadiens !

            Oui c’est ce Tchad que je voudrais retrouver. Quand nous disions tchadiens, il n’y avait ni connotation ethnique, ni régionale, ni confessionnelle.

            Les politiques ont fait du mal à mon Tchad. Comme un ver qui s’est caché dans le fruit Tchad ; et le fruit s’est abimé.

            Je voudrais que le fruit Tchad retrouve sa splendeur première. Je voudrais que le Tchad retrouve sa beauté d’antan afin que chacun de ses fils et de ses filles puisse s’y reconnaître, sans arrière-goût de rejet.

            Qu’est-il arrivé à mon Tchad pour que ses fils et fils puissent vivre dans le soupçon réciproque ? Quel remède faut-il lui trouver ?

            Je hais cette haine qui divise les tchadiens. Je hais cette manie de se regrouper selon les critères de religion, d’ethnie ou de région.

            Je voudrais ce Tchad, bouquet dont les différentes couleurs viennent agrémenter la beauté.

            Je cherche le Tchad de Moussa Chauffeur, de Boubakréo Napoléon, de Demi Thomas, de Toudjibé, de Ngonkoutou, Morsilé, de Chiquito…

            Sans être nostalgique ni archéologue, je voudrais retrouver le Tchad de mon cœur. Le Tchad de mes rêves, le Tchad de mon cœur, le Tchad que j’aime.

Peuple Tchadiḛjē lo, aw ngínājē rí ɓá ne wa

j-ā rā bán ɓa kar ɓē ləsī majə wa

Pəpələje lo, kula yā ɓá rā ad̄ ɓē majə ɓo.



mercredi 9 mars 2022

Tchad : Au point où nous sommes (par Pascal Djimoguinan)

Au point où nous sommes, que devenons-nous, nous populations du Sud du Tchad ? Nous ne sommes pas des politico-militaires (tel est le langage consacré). Nous n’avons pas d’armes à feu même si nous sommes tout le temps fouillés. On sait bien qui dispose de ces armes. Il suffit de regarder quand il y a des conflits communautaires de quel côté se trouvent les blessés et les morts par les armes à feu. Pendant que le pré dialogue se prépare, nos préoccupations se situent au niveau de la simple conservation de la vie. Pourrons-nous vivre jusqu’au lendemain ? Nous prend-on vraiment en compte dans la préparation de l’avenir de ce pays ou bien sommes-nous déjà considérés comme faisant partie du passé du pays ? Je dénonce :
 - Le fait que le sud du Tchad est considéré comme un pays conquis où l’on peut faire tout ce que l’on veut,
 - Le fait que cette partie du pays se meurt à petit feu
 - Le fait que l’administration dans cette partie du pays ne prennent pas en compte les intérêts de la population locale 
- La gestion de l’énergie et plus particulièrement de l’électricité dans cette partie du pays est aléatoire, voire de l’ordre du sabotage économique. 
(A suivre)

vendredi 4 mars 2022

Tchad/ Point de presse de l'UCCT de Bédjondo

POINT DE PRESSE 
  Que ça cesse ! 
C’est avec une très grande consternation que nous suivons et vivons les atrocités intercommunautaires de ces années ci. A Dôh, village d’une population importante du Département de Bédjondo, des éleveurs mishériés ont massacrés l’année dernière le 31 Mai 2021, 5 paysans dont certains ont été tués dans leurs maisons et tous avec des armes de guerre. Dans le Canton de Yomi, le 16 décembre 2021 un éleveur a intercepté les boeufs des paysans puis a enlevé 52 têtes de bétail en tirant des armes de guerre pour terroriser les paysans. Une partie de ce bétail été récupérée, celle restée vient d’être récupérée. Encore à Yomi, un paysan qui récoltait son coton s’est fait tuer le 21 décembre 2021 par un bouvier éleveur à qui le paysan a demandé tout simplement de retirer ses boeufs de son champ de coton A Sandana dans la sous-préfecture de Koumogo, comme si les massacres de 2019 ne suffisaient pas, encore ce 9 février 2022 les éleveurs lancent une guerre avec des armes de guerre contre la population tuant 12 personnes, sous prétexte que l’un d’eux serait tué par la population autochtone malgré les avis clairs des constats faits par des institutions crédibles. La sauvage répression des manifestants- qui ont pris la rue à la ville de N’Djamena juste pour réclamer la dignité et pleurer leurs morts- sans aucun respect de la dignité de ces hommes et femmes, sans retenu même envers un leader religieux aussi important pour le Tchad, Mgr Archevêque de N’Djamena en même temps Président de la Conférence des évêques du Tchad qui a fait la cible des tirs à gaz lacrymogène. Nous membres de l’Union des Cadres Chrétiens Catholiques au Tchad venons condamner avec fermeté ces actes criminels, à Abéché, Sandana, N’djamena, Doh, Yomi. Pour nous, ces actes qui ne peuvent avoir d’autres noms qu’un crime programmé contre une partie de l’humanité du Tchad. 
  Vous autorités publiques et politiques 
 D’années en années, dans ce pays vous nous remplissez les oreilles par des propos pour lesquels vous n’avez jamais honte de ce que vous nous dites car aucune application. Comment accepter que des criminels connus des services de sécurité de l’Etat circulent en toute liberté sans être poursuivis ? Comment se fait-il que des armes de guerre se trouvent encore dans les mains des civils surtout certains éleveurs qui s’en servent pour tuer et se rendre Justice ? Les armes de guerre sont comme des voitures avec matricules dont on peut suivre la traçabilité. Nous nous étonnons que malgré, la forte machine de renseignement dans ce pays, on n’arrive pas à suivre ces armes et à les récupérer. Tout porte à croire que les paysans en cas de violation de leurs droits, ce sont eux qui doivent assurer les frais des déplacements des autorités de sécurité ? Avec amertume nous constatons que les paysans passent des temps dans les structures judiciaires lorsqu’un différend les oppose aux éleveurs, souvent sans aucun gain de cause. Nous nous souvenons des déclarations du Marechal du Tchad, de vénérable mémoire qui affirme qu’il ne couvre personne dans ce pays. Mais nous devons nous dire quand même la vérité sans craindre aucune répression ou sentiment de régionaliste. Vous responsables et animateurs politiques, vous êtes responsables de la détérioration de ce pays à cause de vos complicités à tous les niveaux. N’oubliez pas que comme enfant de ce même pays nous rendrons compte de nos actes un jour, même si ce n’est pas aujourd’hui. Vous nous avez trop menti pour vendre vos idées politiques pour fins juste de protéger vos intérêts familiaux. Nous avons honte de beaucoup parmi vous les politiciens qui, à chaque crise descendez sur les lieux sans la moindre disponibilité d’écouter la souffrance des victimes mais seulement pour juste dire que les « les plus hautes autorités de la République accordent du prix au vivre ensemble et à la cohabitation pacifique ». N’êtes pas vous-mêmes les grands auteurs du mal vivre dans ce pays ? 
  A vous Excellence le Président du Conseil Militaire de Transition (CMT) et de la République du Tchad. 
Excellence, nous nous rappelons des fortes condamnations faites par votre Père Défunt le maréchal du Tchad à propos des agressions des paysans de Sandana en 2019 qui ont endeuillés vos concitoyens. Mais nous nous demandons ce qu’est ce qui a été fait pour désarmer les éleveurs. Nous pensons que votre coeur de Père de la Nation Tchadienne gémit encore devant ses récentes massacres encore à Sandana, Abéché et presque partout. Monsieur le Président écoutez les cris des gens qui attendent de vous des gestes forts. Car comme tchadiens, nous sommes vos concitoyens. Comme premier Magistrat de la Nation, nous attendons de vous l’équité sans parti pris et la reconnaissance de nos droits les plus élémentaires : vivre en paix Beaucoup de vos ministres nous servent la même recette connue sous le règne de votre Père défunt. C’est dans ce climat de manque de dialogue et des conflits que vous appelez la nation Tchadienne à un dialogue national inclusif. Nos mères, épouses et sœurs qui ont exprimé leur râle bole les corps exposés aux cameras est un signal fort. Les éleveurs accueillis avec sympathie dans nos Provinces, continuent à larguer la population et souvent avec l’appui de certaines autorités, celles-là même qui sont censées vous représenter dans nos Provinces. Nous doutons que comme militaire, vous n’ayez rien appris sur ces abus causés par des autorités, à la fois Généraux-Gouverneurs, Hauts Gradés militaires tous aussi à la fois éleveurs, qui vous représentent auprès des populations. Le mal vivre a atteint son comble à tous les niveaux dans cette situation. Nous demandons que la Justice soit faite et que la population soit informée de ce qui a été fait. Nous sommes obligés de nous adresser à vous directement que l’appareil Judiciaire dans notre pays ne soit pas la cible des immixtions des politiques qui souvent ne sont pas neutres.
  A vous agents de l’ordre et de la Sécurité publique
Votre mission jusqu’à la preuve du contraire est d’assurer la sécurité de la nation et non le contraire. Malheureusement, nous cheminons vers la compréhension de votre rôle régalien comme des forces répressives pour vos concitoyens. Ne nous laissez pas comprendre les armes sont dans vos mains pour nous réprimer alors que c’est vers nous que certains acteurs de la scène politique accouraient pour solliciter nos voix aux urnes. Une grande partie de la population tchadienne est sans arme. Mais la manière de faire actuellement la conduira à se révolter même sans armes. Ce qui ne facilitera pas la construction d’un Tchad pour tous que nous appelons de tous nos vœux. Aidons-nous mutuellement à faire la paix. A vous tous et toutes, à travers cette déclaration, nous exprimons nos profondes consternations aux victimes trépassées de Sandana, de Doh, de Yomi, de Matekaga, d’Abeché, les marcheurs de N’Djamena, à notre sœur qui a perdu l’oeil durant la marche. 
  Opinion internationale et nationale. 
Notre Nation va mal. Ecoutez aussi les cris de sa population. Nous entrons aujourd’hui comme chrétiens catholiques dans le carême. Nous prierons pour la paix dans notre pays, nous prierons aussi pour vous les autorités et agents de l’ordre et de la sécurité 
  Signé UCCT DE BEDJONDO Au mercredi des Cendres 2022

LU POUR VOUS/ Message de Carême 2022 de l'Archevêque de Bangui (RCA)

« Le voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut. » 2 Co 6, 2 Message de carême 2022 de S. Em Dieudonné Cardinal NZAPALAINGA, C.S.Sp Archevêque Métropolitain de Bangui A la communauté Chrétienne de l’Archidiocèse de Bangui Aux homme et femmes de bonne volonté Chers frères et sœurs, Et vous tous, hommes et femmes de bonne volonté, Béni soit le Seigneur, Dieu de miséricorde et de compassion, qui nous accorde aujourd’hui d’inaugurer le temps du carême, période charnière de notre année liturgique. Le carême est un kairos, un temps si précieux, un don pas de nos efforts mais du cœur miséricordieux du Seigneur, une grâce qu’il convient d’accueillir et de vivre pleinement. Dès maintenant, Dieu veut agir dans nos vies et, à nous, il incombe de discerner et d’agir nous aussi, sans tarder. Dès aujourd’hui, Dieu nous appelle à revenir à lui, à soigner notre relation avec lui et avec notre prochain, à ajuster nos actes et à harmoniser nos engagements avec les appels de l’Eglise. Ce temps inouï de ressourcement nous conduit à la Pâques, le soubassement de notre foi, de notre espérance et de notre charité. Le carême de cette année s’inscrit spécialement dans cette démarche de la synodalité dans laquelle l’Eglise universelle s’est engagée en octobre 2021 et pour laquelle l’Archidiocèse de Bangui a consacré les assises de la dernière Rentrée pastorale. Voici le temps favorable pour faire une halte régénératrice, pour se remettre en question, s’examiner minutieusement, se dépouiller des préjugés et, ensemble, tracer des voies pour aller plus en avant. Prophètes du Christ de par notre baptême, nous sommes investis de la mission d’appeler nos frères et sœurs, d’interpeler toute la société et notre pays, à se laisser se réconcilier avec Dieu. Le carême signe de renaissance et d’espérance. Le carême est un temps d’expérience personnelle et commune d’écoute de la Parole de Dieu, de dialogue et de partage, un temps d’ouverture à l’autre qui peut s’avérer un miroir pour nous permettre de discerner ce que Dieu attend de nous. La portée spirituelle de ce temps de grâce est contenue dans le rite de l’imposition des cendres. Les cendres sont richement évocatrices. Elles symbolisent la fragilité humaine et l’espérance en la miséricorde divine : celui qui se recouvre de cendres, reconnaît ses fautes mais en même temps, entre en pénitence pour renaître à une vie nouvelle (Ps 50 ; Jon 3, 6 ; Jb 42, 6 Jdt 4, 11-15 ; 9, 1). Les cendres sont ce qui reste de la matière consumée. En cela, elles symbolisent la pauvreté, le dépouillement pour l’enrichissement de ce qui est essentiel. À l’instar du résidu qui sert à fertiliser la terre, elles constituent le ferment qui, au terme de nos privations, favorisera le plein épanouissement de notre vie chrétienne. Les cendres, pour finir, expriment le dynamisme même de la vie. Loin de signifier une rupture ou un anéantissement, elles évoquent la continuité, l’espérance en la renaissance. En effet, les cendres dont nos fronts seront imprimés aujourd’hui ont été obtenues de la consumation des rameaux de l’année liturgique dernière. En cela, elles indiquent le passage de la mort à la vie que le carême et la Pâques symbolisent. La fécondité du carême dépend de la profondeur de la relation que nous établissons avec le Seigneur. C’est lui avant tout qui nous interpelle. « Maintenant - oracle du Seigneur » rapporte le prophète Joël dès l’abord de l’extrait de son livre qui est lu le mercredi des cendres (cf. Jl 2, 12-18) : c’est Dieu lui-même qui s’adresse à nous comme à des amis dont il veut la vie et le bonheur. C’est lui-même qui nous appelle à revenir à lui de tout notre cœur. C’est le Seigneur lui-même qui nous indique les armes dont nous devons nous servir pour remporter le combat spirituel qui caractérise ce temps. Ce sont : le jeûne, la prière et l’aumône. Jésus ne se contente pas seulement de les évoquer en tant que pratiques pieuses mais il nous montre par quel moyen elles peuvent s’avérer authentiques. Le jeûne, la prière et l’aumône nous aident à rencontrer Dieu et à rejoindre notre prochain que s’ils sont vécus dans la vérité et la simplicité. Voici donc venu le moment de renouveler notre pratique de la prière. Ne manquons pas, par exemple, de toujours commencer et achever notre journée par une prière personnelle, de toujours ouvrir et fermer nos assemblées, nos rencontres par la prière. Voici venu le moment, dans nos sociétés de consommation, de recourir au vrai jeûne pour nous orienter vers l’essentiel, ce qui est bâti sur un rocher inébranlable et nous assure le salut. Voici venu le moment, à travers l’aumône, d’ouvrir le cœur à Dieu et au prochain, de prendre soin du pauvre derrière qui se cache le Seigneur (cf. Mt 25, 31-46). Cette année, je voudrais spécialement mettre l’accent sur le partage dans la solidarité. Le partage est un facteur de cohésion : il peut contribuer à réduire les frustrations et à empêcher la convoitise. A la racine de tout désir de marcher ensemble, il y a nécessairement un élan de solidarité et l’une des expressions manifestes de celle-ci est l’entraide. Et surtout, le carême est le moment privilégié pour vivre le partage lequel s’enracine sur le sacrifice du Christ sur la croix, don sans mesure, pour le salut du monde. Ubi caritas et amor, Deus ibi est Le dimanche des Rameaux de cette année pastorale, l’Archidiocèse de Bangui organisera une quête impérée pour la construction du presbytère de la paroisse Saint Laurent de Kouki, dans le diocèse de Bossangoa. Pour nous, il s’agira d’une réelle occasion de marcher ensemble dans le don et la charité. La communion entre les Eglises se manifeste souvent dans les intercessions les unes pour les autres, l’échange réciproque de compétences et d’ouvriers apostoliques mais encore dans des contributions matérielles des unes en faveur des autres. Dans l’histoire du Salut, l’organisation de collectes a toujours soutenu la marche des Eglises particulières ou la réalisation des œuvres du Corps du Christ en général. Dans le Nouveau Testament, nous pouvons relever quelques exemples notables. Dans les Actes des Apôtres (Ac 11, 27-30), éclairés par la prophétie d’un certain Agabus, les disciples d’Antioche, mobilisèrent, chacun selon ses ressources, une contribution pour les frères de la Judée en proie à une grande famine. La collecte fut confiée à Saul et Barnabé. Aux chapitres 8 et 9 de sa seconde épitre aux Corinthiens, Paul nous informe de l’existence au sein des Eglises de Macédoine d’un projet de collecte pour l’assistance des saints. Les « saints » dont parle l’apôtre des Gentils désignent l’Eglise de Jérusalem qui, conformément à la prophétie d’Isaïe (Is 60-61) est appelée à être le creuset de l’unité des Juifs et des païens. Pour encourager les frères et sœurs de Macédoine à concrétiser ce projet, Paul livre un enseignement édifiant sur le partage, enseignement dont nous pouvons nous aussi nous en nourrir. En reprenant une citation du livre des Proverbes, il nous confie que : « Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Co 9, 7 // Pr 22, 8 gr). Joie, amour, foi et liberté sont les caractéristiques d’un partage authentique. Donner sous contrainte, donner avec regret ou mépris, donner sans aimer ne conduit ni à la rencontre de Dieu ni à la fraternité. Le partage qui atteste la solidarité nait de l’amour. Pour nous chrétiens, il repose sur la conviction que nous donnons ce que nous avons gratuitement reçu de Dieu. Il a le pouvoir de nous combler de toutes sortes de grâces nécessaires pour que, disposant toujours et en tout du nécessaire, nous ayons encore du superflu pour toute œuvre bonne (cf. 2 Co 9, 8). Notre don pour l’œuvre de Dieu, par une merveille de sa grâce, se démultiplie chaque fois que nous n’hésitons pas à donner même de notre indigence. Et nous ne manquons jamais de rien (cf. 1 R 17, 8-16 ; Jn 6, 1-15). N’attendons pas d’avoir beaucoup pour donner. Faisons confiance au Seigneur et donnons, donnons le meilleur de nous avec joie et amour. N’attendons pas de tout avoir pour nous mettre à partager. « Qui a Jésus a tout » : nous avons déjà tout et 2 nous risquons de tout perdre si nous ne nous mettons pas à donner. La mobilisation en faveur de la paroisse Saint Laurent de Kouki concerne tout le peuple de Dieu de l’Archidiocèse de Bangui, tous sans exception. Ce n’est pas l’affaire des seuls curés ou des personnes consacrées. Nous ne nous contenterons pas seulement de mobiliser des ressources financières et matérielles pour un diocèse frère. Nous mettons aussi à son service un de nos prêtres. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime » dit Jésus (Jn 15, 13). Il n’y a pas de plus belle expression de solidarité que de donner à une autre Eglise un prêtre quand bien même que chez soi « la moisson est abondante mais les ouvriers peu nombreux » (Lc 10, 2). Notre fils ne sera pas seul. Avec lui, c’est tout l’archidiocèse de Bangui qui va en mission. Le missionnaire n’est jamais seul. Il est toujours accompagné par le Maître de la mission, « Dieu avec nous », qui nous garantit de sa présence jusqu’à la fin des temps (cf. Mt 28, 20). Il est toujours accompagné de sa communauté d’origine qui le porte par la prière et qui le soutient. Nous pouvons nous apercevoir qu’un lien très intime lie le don et la mission. La mission est un don. Elle est aussi une expérience synodale : c’est toute une Eglise, toute une communauté qui se meut, qui se met en marche sous la mouvance du Saint Esprit. Que cet Esprit sème en nous les germes d’une authentique charité. Qu’il creuse en nous le désir de prier et de jeûner comme il se doit. Qu’il accompagne et affermisse notre « marche ensemble » jusqu’à la Pâques. Que Jésus qui s’est fait pauvre et qui, dans sa Passion, nous manifeste l’amour incommensurable du Père, nous enrichisse de sa pauvreté. Que la Sainte Vierge, Notre Dame de l’Oubangui, et Saint Joseph, Patron de l’Eglise, veillent sur notre Eglise et sur notre pays qui s’apprête à vivre un dialogue déterminant. Qu’à leur puissante intercession nous soyons comblés des grâces abondantes du temps de carême, maintenant et pour les siècles des siècles, amen ! Dieudonné Cardinal NZAPALAINGA, C.S.Sp