mercredi 8 mai 2013

La sorcellerie en Afrique : chance ou écueil ?


La sorcellerie, une nébuleuse dans laquelle viennent s’engouffrer tous les fantasmes. Comprend-on la même chose quand on parle de la sorcellerie lorsqu’on est africain ou non africain ? Homme d’église ou non, anthropologue ou psychologue ? Que peut-on penser de ce phénomène ? Est-ce un lourd boulet que l’Afrique traîne et qui l’empêche de s’engager résolument vers le progrès où est-ce une ouverture vers l’esprit scientifique ?

            Lorsqu’on parle de la sorcellerie, on se situe d’emblée dans le domaine de ce que tout africain qualifierait de mystique. Le sorcier est celui qui dispose d’une certaine force qui lui permet d’être en contact avec un monde auquel les autres ne peuvent avoir directement accès. Il possèderait ainsi des pouvoirs surnaturels.

            Avoir accès à un monde surnaturel comporte des dangers. On ne saurait sortir de sa nature sans payer quelque chose en retour, aussi cela comporte des sacrifices de toute sorte. La question principale est de savoir si la sorcellerie a le choix entre le bien et le mal.

            Je me propose, à partir de l’aire culturelle à laquelle j’appartiens et qui correspond au Sud du Tchad, d’apporter une précision de taille. Si n’importe qui ne peut accéder au monde surnaturel, il y a deux groupes de personnes qui le peuvent.

Il y a d’un côté, ceux qui le font dans le but de soigner et de protéger les membres de leurs sociétés. Il s’agit des guérisseurs reconnus comme tels par la tradition. De l’autre, il y aurait ceux qui le font dans le but de nuire aux autres et de protéger leurs intérêts égoïstes ; ce sont ceux-là qui sont des sorciers. Dans l’aire culturelle dont il est question, la sorcellerie a toujours une connotation négative.

            Il est difficile de dire si les sorciers possèdent vraiment les pouvoirs qu’on leur donne. Il faut cependant être très prudent dans les affirmations que l’on pourrait faire à ce sujet et cela pour plusieurs raisons :

- D’abord, nous connaissons la force que la persuasion à sur l’esprit humain ; pour une personne qui a grandi dans une société où tout le monde croit à la sorcellerie, cette personne aura vraiment du mal à se convaincre de l’inefficacité de la sorcellerie.

- Ensuite, le mal existe réellement, aussi bien sous ses formes d’égoïsme, de jalousie, de méchanceté, de vengeance ou perversion que sous la forme de corporation avec certaines forces nuisibles dans le but de nuire aux autres.

- Enfin, sans être exhaustif, il y a dans toute société, un mécanisme pour réguler la violence, dans le sens du développement qu’en a fait René Girard. Ce serait alors pour la société une espèce de soupape de sûreté qui permet, en accumulant toute la colère d’une communauté contre une personne ou un groupe de personnes, de libérer l’énergie nécessaire à la bonne marche du reste de la communauté.

            On se méfie de tout ce qui sort de l’ordinaire, plus particulièrement de tout ce qui touche à la liminalité. La sorcellerie est à rapprocher de ce que les grecs appelaient pharmakon qui pouvait, avec une certaine ambiguïté, signifier aussi bien remède, drogue, philtre que poison ou venin.

            La sorcellerie traine trop de casseroles pour être un facteur de développement en Afrique. Il suffit  de voir toute la justice populaire et toute la peur qu’elle suscite ainsi que tous les problèmes de droits humains qu’elle implique. La sorcellerie est pour l’Afrique le grain de sable qui empêche que les mécanismes du développement se mettent en marche; elle est ce qui paralyse toute la société.

1 commentaire:

  1. Merci pour le partage que tu fais sur ton blog. Il est vrai que meme si la sorcellerie existe, sous nos cieux beaucoup de choses qui pourraient trouver des explications rationnelles sont mises a son compte et cela empeche les un et les autres a aspirer a de meilleurs conditions de vie (developpement).

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