mercredi 18 décembre 2013

Kwame Nkrumah, le panafricanisme (par Pascal Djimoguinan)


            L’avenir de l’Afrique se trouve dans le bon usage que nous pourrons faire de notre passé. Ce passé a été fait par des hommes et des femmes que nous devons prendre le temps de redécouvrir pour nous laisser interroger par leur pensée.

            Parmi ces hommes, il en est un dont je voudrais parcourir rapidement la vie et la pensée. Il s’agit de Kwame Nkrumah.

            Kwame Nkrumah est né le 21 septembre 1909 à Nkroful dans l’actuel Ghana et est mort le 27 avril 1972 à Bucarest en Roumanie. Le parcours académique de cet homme fera de lui un érudit et un homme de culture (diplômé de l’école Achimota à Accra, passé par le grand séminaire catholique, bachelier en théologie, master en philosophie et études de sciences politique à l’Université Lincoln aux Etats-Unis).

            Très tôt Kwame Nkrumah s’est engagé très tôt dans les activités politiques. Il arrive aux Etats-Unis en 1935 pour les études ; là, il a été le président de l’Organisation des étudiants africains des Etats Unis et du Canada. En 1945, il quittera pour Londres où il participera au 5ème congrès panafricain de Manchester. Il fondera par la suite le Secrétariat national de l’Afrique de l’Ouest qui va s’adonner à la décolonisation de l’Afrique. En même temps, il sera le vice-président de l’Union des africains de l’Ouest, WASU (West African Student’s Union).

            Il regagnera son pays en décembre 1947, après avoir été invité à servir comme secrétaire général du parti indépendantiste l’UGCC (United Gold Coast Convention).

            Les événements vont alors s’accélérer. Le 28 février 1948, la police tire sur des africains qui protestent contre l’augmentation des prix et fait 68 tués. Cela va donner lieu à des émeutes à Accra, à Koumassi et ailleurs. Le gouvernement suspectera l’UGCC d’être la main invisible derrière toutes ces manifestations. Kwame Nkrumah sera arrêté le 12 mars 1948 en compagnie d’autres leaders. Ils seront relâchés un mois plus tard, le 12 avril parce que les britanniques se rendront compte de leur erreur, mais cela donne lieu à l’émergence d’un leader du mouvement en sa personne. Il commencera à arpenter le pays et à revendiquer un gouvernement autonome pour le Gold Coast. Il réussira alors à fédérer autour de lui les planteurs de cacao, les femmes et les syndicats. Il fini

ra par transformer ces divers mouvements en un nouveau parti en 1949 qui prendra le nom de Convention Poeple’s party (CPP). Il va évoluer vers le désir de l’indépendance et appellera au boycott et à la désobéissance civile. Cela l’amènera en prison où il restera jusqu’à 1951. Les britanniques, ayant organisé des élections législatives, seront obligés de libérer Nkrumah et de le nommer Premier ministre car la CPP sortira vainqueur.

            Nkrumah se basera sur la politique « d’africanisation de l’administration, de panafricanisme et d’anticommunisme » et décidera de développer les infrastructures de son pays grâce aux excédents de l’Office commercialisation du cacao. L’éducation et la santé connaîtront un grand progrès.

            Aux élections législatives de 1956, la CPP remportera les trois quart des sièges ; Nkrumah obtiendra ainsi l’indépendance de Gold Coast le 6 mars 1957 ; c’est la première colonie à obtenir son indépendance après le Soudan (1966). Le jour de l’indépendance, Krumah adoptera pour son pays le nom de Ghana à la place du nom colonial qu’il portait jusque-là. Le Ghana deviendra une république le 1er juillet 1960 tout en restant membre du Commonwealth.

            Le régime de Nkrumah ne va pas échapper aux avatars de l’époque ; il commencera à se durcir et à faire des prisonniers politiques ; il finira par arrêter tous les parlementaires de l’opposition et censurera la presse.

            Ayant échappé et deux tentatives d’assassinat (août 1962 et janvier 1964), Nkrumah deviendra de plus en plus méfiants à l’égard de son entourage et développera en même temps le culte de la personnalité. Il instituera le monopartisme à partir de 1963 et se proclamera président à vie. On l'appelle désormais "Osagyefo" c'est-à-dire le rédempteur! Ayant adopté le socialisme, il se mettra à dos l’Occident.

            Le 24 février 1966, il est renversé par un coup d’Etat militaire pendant qu’il effectue un voyage en Chine. Sékou Touré l’accueillera en Guinée en lui proposant la coprésidence du pays.

            C’est en exil en Guinée qu’il fonde une maison d’édition. Cela lui permet de publier ses théories révolutionnaires ainsi que ses livres sur l’unité africaine. Il meurt le 27 avril 1972 à Bucarest, de suite d’un cancer d’estomac.

            Il suffit jeter un regard sur les titres de ses livres pour savoir ce qui l’animait de l’intérieur (Le consciencisme ; Ghana ; L’Afrique doit s’unir ; Le néo-colonialisme : Dernier stade de l’impérialisme ; Le panafricanisme).

            De tous ses écrits, le plus connu est le consciencisme. S’il faut dire deux mots de cet ouvrage, on dira que le Consciencisme est une philosophie de la décolonisation. Le livre commence par un appel aux africains ; les africains doivent se réapproprier leur culture et leur histoire. C’est l’histoire qui oriente l’avenir. L’Afrique n’aura pas d’avenir propre tant que son histoire restera interprétée, écrite et transmise même aux africains par les blancs colonisateurs.

            Nous pouvons tout simplement finir par la définition que Nkrumah donne du consciencisme : « Le consciencisme est l’ensemble, en termes intellectuels, de l’organisation des forces qui permettront à la société africaine d’assimiler les éléments occidentaux, musulmans et euro-chrétiens présents en Afrique et de les transformer de façon qu’ils s’insèrent dans la personnalité africaine ».

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