samedi 1 juin 2013

Les classes d’âge africaines à l’ère de la démocratie


Chaque culture s’organise pour la formation de ses jeunes, chargés de prendre la relève dans la conduite de la cité. C’est ainsi que l’initiation a pris s’est développé un peu partout ; il fallait faire un passage de témoin de telle sorte que chaque génération soit à même d’exercer ses fonctions avec le plus de compétence possible. En Occident, la forme qu’a pris cette initiation n’a cessé d’évoluer pour prendre la forme de l’enseignement qu’on connait comme l’école. En Afrique, si l’initiation sous sa forme classique rencontre de plus en plus de difficulté à cause des exigences de la vie moderne, elle perdure sous la forme des classes d’âges. La question est de savoir si la conservation des classes d’âges telles qu’elles sont est bénéfique pour la politique dans les Etats modernes.

            Une des grandes craintes dans une société de l’oralité est de perdre la mémoire des valeurs. Comment continuer de transmettre ces valeurs, c’est-à-dire finalement comment assurer la continuité de la société ? En Afrique, pendant des générations, la transmission des valeurs s’est faite en grande partie pendant les périodes d’initiations traditionnelles où des jeunes gens, vivant en réclusion, assimilent les techniques et les valeurs nécessaires à la continuité de leurs clans, de leurs ethnies ou tout simplement de leurs villages. C’était tout simplement un problème de survie.

            Si ces initiations avaient lieu selon une période de temps et pour une durée que chaque société fixait, elles réunissaient souvent des jeunes dont l’âge était fixé dans la société. Il y avait donc différentes classes d’âges dont la solidarité s’éprouvait à travers divers évènements vécus ensemble. Chaque membre d’une classe d’âge avait des devoirs de solidarité envers les autres.

            Les classes d’âges n’étaient pas transversales. Les plus jeunes générations devaient donc un respect absolu envers les ainés et cela ne devaient connaître aucune exception. La parole d’un aîné était parole d’évangile.

            De plus en plus, avec les exigences de la vie moderne (l’exode rurale, le travail, les études), l’initiation tend à disparaître alors que les classes d’âges et les regroupements par générations perdurent.

            L’organisation politique en Afrique a pris de nos jours une forme moderne avec des partis politiques, le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire et le pouvoir judiciaire. La plupart des africains luttent et travaillent pour l’instauration de la démocratie dans tous les Etats.

            Il nous faut nous demander si vraiment le système des classes d’âges fait bon ménage avec la démocratie. Il arrive souvent d’entendre des propos d’hommes politiques qui amènent à se poser question : « tel homme politique a des comportements qui ne sont pas démocratiques mais je ne peux pas le lui dire puisqu’il est un aîné », « Je n’ai pas les mêmes idées politiques que tel mais je ne peux pas adhérer à un autre parti car c’est un aîné ».

            Il faut maintenant se réveiller et avoir le courage de se poser des vraies questions : que faut-il privilégier en politique ? Faut-il faire passer l’âge avant les idées politiques ? Etre de droite ou de gauche n’aurait-il pas plus d’importance qu’appartenir à la même classe d’âge ? La politique doit-elle être une construction de la raison ou tout simplement un aplaventrissement obséquieux devant les habitudes ?

            Si les hommes politiques africains veulent aller de l’avant, ils doivent avoir le courage de sortir à la fois de la gérontocratie et de la fausse solidarité politique dans les classes d’âges. Il faut avoir le courage de ses idées et oser sortir des ornières et du carcan.

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