Une simple image de l’AFP et tout y est dit. On voit
plusieurs personnes dans une voiture, en train de quitter la Centrafrique. Cette image
est une parmi tant d’autres puisqu’il y a des milliers d’expatriés qui partent
du pays, aussi bien en avion que par la route. Il serait intéressant de s’arrêter
une minute sur cette image.
Il est bien difficile de dire la marque de la voiture sur
la photo. Cela pourrait bien être une toyota corola mais ce n'est pas
important. Ce qui est important, c’est que c’est voiture est vue de derrière.
Elle est en train de partir. Il n’y a plus de doute à ce sujet. Les adieux sont
faits et la voiture a pris la route. Sur le toit, on aperçoit plusieurs
personnes, cinq en tout. On est surpris de la jeunesse de ce beau monde. Ils sont assis sur des valises et
des baluchons, ressemblés sans doute en hâte. Parmi les garçons, une fille est
assise. Dans la coffre ouvert, il y cinq enfants. Ils doivent avoir entre 8 et
12 ans. L’un deux sourit, sans doute pour se donner une certaine contenance.
Sur les côtés de la voiture, on voit des bidons et des tapis.
Sur la photo, on ne voit que d’improbables voyageurs. Les
passagers qu’on aperçoit ne sont pas à leur place. Ils ont pris place aux
endroits qui ne sont pas prévus pour les voyageurs. On les voit là où ils ne
devraient pas être ; ils ne voyagent pas car cela n’est pas prévu. Est-ce
là le symbole du chamboulement de toute la Centrafrique pendant ce conflit qui
la traverse ?
On ne voit pas ceux qui voyagent réellement, c’est-à-dire
ceux qui sont assis à la place réservée aux passagers. Combien sont-ils ?
On ne le saura jamais. Y a-t-il vraiment quelqu’un dans la voiture ? Y a-t-il
un chauffeur dans la voiture ? Qui dirige cette voiture et qui conduit-il ?
Ceux qu’on voit regardent tous vers l’arrière. Qu’est-ce
que cela exprime ? Leur regard n’exprime pas une grande peur ; cela
signifie qu’ils ne sont pas poursuivis pour le moment. Mais on ne peut s’empêcher,
en le voyant, de penser à la femme de Lot qui, en sortant de Sodome, ne put s’empêcher
de regarder derrière elle et fut transformée en statue de sel. Ils ne savent
pas où ils sont obligés d’aller, pourtant ils doivent quitter l’endroit qu’ils
connaissent bien. Ces gens semblent perdre leur passé et tendre vers un avenir
incertain.
Devant la voiture, on aperçoit quelques personnes en marche. Certaines semblent venir vers la voiture alors que d’autres vont dans le même sens. D’autres sont arrêtés auprès d’un gros porteur se trouvant devant la voiture. Notre voiture fait sans doute partie d’un convoi quittant la Centrafrique. Mais on ne voit pas les passagers du gros porteur. En fait, personne ne voyage, mais tous quittent la Centrafrique. Ce sont des anonymes qui partent.
Devant la voiture, on aperçoit quelques personnes en marche. Certaines semblent venir vers la voiture alors que d’autres vont dans le même sens. D’autres sont arrêtés auprès d’un gros porteur se trouvant devant la voiture. Notre voiture fait sans doute partie d’un convoi quittant la Centrafrique. Mais on ne voit pas les passagers du gros porteur. En fait, personne ne voyage, mais tous quittent la Centrafrique. Ce sont des anonymes qui partent.
. Les regards tombent
certainement sur le photographe ; pouvons-nous dire qu’il est neutre ?
Prendre une photo, c’est déjà d’une certaine manière prendre position, ne
serait-ce qu’en se plaçant sur le point de vue de la compassion. Qui est
derrière le photographe ? Les miliciens ? Est-ce les forces de
maintien de la paix ou simplement les habitants du quartier ? Tous sont
plus ou moins acteurs de ce drame qui se déroule. Nous sentons un malaise
monter en nous. La photo nous place au milieu de ces différents
acteurs. Nous ne pouvons pas nous échapper ; nous prenons déjà part au
drame qui se déroule en Centrafrique. Notre seul choix, c’est peut-être de voir où nous nous plaçons: faisons-nous partie des miliciens d’un camp ou de l’autre? Ou bien des
forces de maintien de la paix? Ou bien de la population du quartier?
Voilà l’image de la Centrafrique en ce moment. Il
faudrait que très vite, chacun reprenne sa vraie place et d'œuvrer pour que les choses aillent mieux.
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