En Afrique, il est courant d’entendre des histoires qui
rappellent de prime abord l’univers des contes et du merveilleux. On parle sans
problèmes des hommes qui se transforment en animaux ou vice-versa, des gens qui
se trouvent en plusieurs endroits à la fois, des plantes qui parlent,
quelquefois pour sauver des hommes. Il est plus facile, au nom de la
rationalité, de rejeter tout cela sans autre forme de procès. Mais suffit-il de
ne plus s’y intéresser pour que le problème n’existe plus ? L’attitude
rationnel ne consiste-t-elle pas à s’arrêter sur le sujet pour voir de quoi il
retourne et de donner les raisons de la position qu’on adopte ?
Plusieurs africains ont tenté d’aborder courageusement de
problème, de s’y frotter peu ou prou et d’apporter des explications qui peuvent
résister à la critique. Parmi ces hommes, nous pouvons citer Meinrad Hebga d’illustre
mémoire, en sa qualité de philosophe anthropologue.
Le titre de sa thèse de troisième cycle, soutenu à l’Université
de Rennes nous montre qu’il est entré de plein pied dans le sujet qui nous
interesse : « Le concept de
métamorphose d’hommes en animaux chez les Basaa, Duala, Bantu du Sud-Cameroun ».
C’est un sujet que l’on retrouve dans toutes les aires géographiques de l’Afrique.
Les hommes peuvent-ils vraiment se transformer en animal ?
Dans sa thèse d’Etat, cette fois soutenue en Sorbonne,
Hebga essaie de voir « la
rationalité d’un discours africains sur les phénomènes paranormaux ».
Comment rendre compte des phénomène paranormaux comme les lévitations, les
bilocations, les apparitions, les visions, les envoûtements et les sorcelleries…
Pour lui, il sied de « réhabiliter les croyances métaphysiques et religieuses africaines qui
se sont trop vite effacées devant l’irruption des philosophies et religions
étrangères. » Une fois ce travail fait, il faut arriver à « saisir et exposer la rationalité du
discours que les africains tiennent à leur endroit ».
Hebga n’hésite pas à revisiter le schéma dualiste de la
pensée occidentale, héritée en grande partie de la pensée grecque, qui pense l’homme
comme corps-âme, pour le comparer à la pensée africaine qui en grande partie
pense l’homme comme triade : corps-souffle et ombre. Cette triade forme un
champ d’énergie complexe qui fait que l’homme est un être structurellement énergétique et relationnel. Si nous ne nous
trouvons plus dans une conception cartésienne, on ne peut cependant pas nier à
ce monde sa logique propre et sa cohérence profonde.
Hebga n’hésitera pas à utiliser les données de la
physique contemporaine, tant sur le plan de mécanique ondulatoire ou d’électromagnétique,
de la physique quantique pour éclairer son raisonnement. Il en arrive à la
conclusion que nous ignorons encore beaucoup de choses.
Il serait intéressant de conclure avec un mot de Hebga
dans son livre Sorcellerie, chimère
dangereuse… ?
« L’on
me demande parfois : ‘Croyez-vous à la sorcellerie et la magie ?’
Question claire et directe s’il en fut, mais à laquelle je ne puis répondre qu’avec
un distinguo. Oui, je suis convaincu que certains individus sont doués d’une
force paranormale dont la nature n’a pas encore été déterminée, force qui est
probablement naturelle, une sorte d’énergie spéciale, mais qui dans certains
cas pourrait bienêtre supraterrestre. Grâce à elle, ils produisent des effets
extraordinaires, transitoires ou permanents sur leurs semblables, effets
surtout mauvais qui dépassent le niveau de l’illusionnisme ou de la simple
hallucination. Des faits nombreux, quelques-uns scientifiquement établis, la
plupart constatés ou vécus dans le monde réel des personnes normales et équilibrées,
faits irréductibles, drus, massifs, rebelles à tout escamotage par le moyen de
théories religieuses ou scientifiques, sont là pour faire toucher du doigt la
présence troublante de la sorcellerie et de la magie…
En tant que chrétien et prêtre, je
ne crois pas en la sorcellerie et en la magie noire, c’est-à-dire
que je ne place point ma confiance en elles. Au reste je ne les redoute
nullement… »
Un éminent philosophe, dans le vrai sens du terme de philosophie ( mystérique donc occulte), un ésotériste chrétien fameux qui ne dit pas son nom, un voyant de surcroit. Pour le dernier qualificatif, qui oserait essayer de comprendre ces domaines particuliers sans l'être ou le devenir ? Osons, gnosons Gno-osons le soulignons humblement.
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