mardi 26 novembre 2013

Et si la Centrafrique m'était contée (par Pascal Djimoguinan)


            Lorsque le 24 mars 2013, les hordes de Séléka se déversaient sur Bangui, pour beaucoup c’était en vue d’instaurer un nouvel ordre. Ce n’était certainement pas parce que les rebelles inspiraient confiance mais tout simplement parce que la population était blasée. Pour tous, il ne fallait que quelques jours pour que la paix et la sécurité soit restaurées sur l’ensemble du territoire.

            Il a fallu vite déchanter. Chaque jour qui passe apporte son lot de souffrance, d’exactions, de violence, de viols, de massacres... L’Etat disparaît de plus en plus et le pays exsangue ressemble de plus en plus à une épave livrée à des charognards.

            Des voix s’élèvent jusqu’à implorer comme une grâce la mise sous tutelle du pays par l’ONU, ou du moins une intervention de la France. Lorsque l’on connait l’histoire du pays, cela est bien grave. Le père fondateur de la Centrafrique moderne, Barthélémy Bonganda à œuvrer toute sa vie pour la souveraineté et l’indépendance de son pays. Il s’est pratiquement tuer à la tâche pour que la Centrafrique soit libre. Qu’est-ce qui a pu bien arriver pour que son pays en arrive à appeler au secours l’ancienne puissance coloniale en sachant qu’il y a déjà eu un précédent qui n’a pas été très honorable. En effet, en 1979 déjà, la France était intervenue directement en Centrafrique en organisant un coup d’Etat pour renverser Bokassa et le remplacer par David Dacko que l’armée française avait ramené à Bangui dans les soutes de ses avions transals.

            Mais quel est le mal à extirper ? Qui faut-il chasser ? C’est vraiment une situation paradoxale où on a de la peine à retrouver son latin. Le président de la Transition est bien entré à Bangui à la tête de la coalition Séléka. C’est lui qui est aujourd’hui au pouvoir. Et pourtant tout le monde se plaint. De quoi se plaint-on ? Difficile à dire parce que la Séléka comme telle n’existe plus (du moins sur le papier). Un décret présidentiel l’a dissoute. Mais alors, qui sont ces ex Séléka dont tout le monde se plaint ? Est-ce des hors-la-loi ? Dans ce cas, il n’y a qu’une seule façon de les traiter. Est-ce l’armée régulière ? Alors pourquoi n’arrive-t-on pas à la cantonner et à la discipliner ?

            L’image qui vient à l’esprit est effrayante et on se dit qu’heureusement l’histoire ne se répète pas. On est tenté de penser au Khmers rouges. Est-ce la politique qui est en train de se mettre en place avec toute cette population qui vit en brousse, loin des villages ? Vers où va la Centrafrique ? Le pays traumatisé est sous la crainte des violences interreligieuses. Cela donne le vertige. Que l’ONU donne son accord et que la communauté internationale ramène la paix et la sécurité dans le pays. On ne peut se payer le luxe de faire perdurer cette situation ! Ce qui est sûr, c’est que cette situation d’insécurité généralisée ne peut durer. Que d’ici la mi-décembre, comme cela semble se confirmer, la Misca (Mission internationale de soutien à la Centrafrique), appuyée par la France, restaure l’ordre et l’intégrité du pays.

            Il y a également le fantôme de la métastase de ce cancer dans cette région de l’Afrique, déjà assez fragile. Le mal peut facilement se répandre aux autres Etats de l’Afrique centrale. Si on attend jusqu’à ce que cela ait lieu, il sera trop tard pour agir. Cependant, est bien malin celui qui peut déjà dire quel sera le visage de la transition dans les jours à venir.

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