samedi 1 novembre 2014

Afrique : le Burkina Faso en quatre paradoxes (par Pascal Djimoguinan)



            Toute l’Afrique a les yeux tournés vers le Burkina qui vit ces jours des moments très importants pour lui mais sans doute non moins importants pour tout le continent. Le peuple s’est soulevé contre une dictature et a réussi à faire partir un chef d’État qui se croyait indéboulonnable.  Nous avons jusque-là assisté à quatre paradoxes et il faudra peut-être un cinquième pour débloquer la situation.
Premier paradoxe : La constitution est garante de la vie politique dans une nation et est sensée régir les institutions. Le premier paradoxe vient du fait que le chef de l’exécutif, Blaise Compaoré, celui qui a fait serment de protéger la constitution, trouve que celle-ci le gêne. Il voudrait par un tour de passe-passe se passer de l’article 37 de ladite constitution.
Deuxième paradoxe : La rue se soulève. La population qui tient à la constitution. La seule solution contre un président autiste est l’insurrection. La population s’élève contre les institutions de la République, brûle le parlement et investit les points stratégiques du pays. Les manifestations succédant aux manifestations finiront par prendre le dessus et balayer tout ce que la constitution prévoit. Le chef de l’exécutif, le président qui est censé être le garant des institutions de la République est forcé de donner sa démission. Le président Blaise Compaoré est forcé de tirer sa révérence.
Troisième paradoxe : La Constitution dont la défense a soulevé la masse populaire est incapable d’assurer la transition. En principe, la constitution prévoit ce qui doit se mettre en place lorsqu’il y a vacance de pouvoir ; or cela ne marche pas. Personne ne veut suivre ce que prévoit la constitution. Le peuple n’est pas prêt à accepter que le président de l’assemblée nationale assure l’intérim et prépare les élections dans un délai bien déterminé.
Quatrième paradoxe : Les militaires, dont le principal devoir est de protéger le pays des menaces extérieures et d’être la grande muette en laissant les civils s’occuper de la politique, s’estiment seuls capables d’assurer la transition. Le général Nabéré Honoré Traoré avait annoncé vendredi qu’il était prêt à assurer les responsabilités de chef de l’État. Tôt dans la nuit du 1er novembre, le lieutenant-colonel Zida annonce officiellement qu’il assume les responsabilités de l’État de transition. On se trouve en face de deux personnalités qui revendiquent la transition. Les militaires semblent aimer le proverbe qui dit : « Plus on est de fous, plus on rit. »
            La situation de confusion est à son comble à Ouagadougou. Le peuple risque de perdre sa victoire au profit des militaires qui n’ont jamais réussi à vraiment prendre une distance par rapport à Blaise Compaoré. Comment sortir de cette situation ? Seul un cinquième paradoxe sera en mesure de sauver ce que le peuple burkinabé a acquis de haute lutte. En dans l’expectative, attendons de voir les contours du cinquième paradoxe.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire