samedi 19 avril 2014

Félix Eboué, gouverneur de l'AEF (par Pascal Djimoguinan)


            J’ai toujours entendu parler du gouverneur Eboué qui rallia publiquement le mouvement de la libération en prenant partie pour le Général de Gaule à partir du Tchad dont il présidait les destinées. Je sais aussi qu’à N’Djamena (Tchad), il y a un lycée qui porte son nom et un monument qui lui est dédié non loin de l’hôtel de ville et de l’hôpital de référence général. A part cela, je ne connais pas grand-chose de lui. Pourtant, la revue Missi de juillet-août 1946 le présente à sa façon. Il est intéressant de reprendre cet article pour se faire une idée du personnage.

            Félix Eboué, né à Cayenne, en Guyane, le 26 décembre 1884, élève au lycée de Bordeaux, sportif et amateur de rugby, licencié en droit, élève breveté de l’Ecole Coloniale. En 1908, affecté à la colonie de l’Oubangui-Chari où il resta 27 ans.

            « Son intelligence, note René Maran, sa finesse native, sa calme droiture, sa lucide activité, sa pondération, son parfait équilibre physique et moral font partout merveille ».

            Il mène une lente et minutieuse enquête sur ses subordonnés. A ses recherches désintéressées qui nous ont valu deux ouvrages ayant pour titre Les peuples de l’Oubangui et La clef musicale des langages tambourines et sifflés, s’ajoute une lente maturation de son expérience politique.

            Vers 1932, coup sur coup, Félix Eboué, devient sécrétaire général de la Martinique, Gouverneur par intérim du Soudan. Le 4 décembre 1936, marque une étape décisive dans cette carrière jusqu’ici rectiligne. Un décret ministériel nomme Félix Eboué Gouverneur de la Guadeloupe.

            Vint la guerre. Félix Eboué présidait depuis 18 mois aux destinées de la colonie du Tchad. Se rappelant qu’il est des heures où la désobéissance peut être un devoir sacré, il se rallia publiquement au mouvement de la Libération, bien qu’il n’ignorât plus à cette époque que deux de ses fils avaient été faits prisonniers par les allemands. Son geste, symbole de loyalisme et de fierté, produisit par le monde un effet extraordinaire… et prouva aux nations de race blanche qui l’ignoraient encore que les gens de couleur n’étaient pas des indifférents, que les noirs n’étaient pas des ingrats.

            En novembre 1940, Eboué, le premier de sa race devient Gouverneur Général de l’AEF. Il sait qu’il est le point de mire de ses compatriotes et que l’univers, à l’écoute de ses faits et gestes le respecte et l’admire. L’heure a sonné pour lui de donner sa mesure et de faire triompher les idées qu’il a soigneusement mûries tout au long de sa carrière. Elles peuvent tenir en trois consignes.

            Premièrement, la nouvelle politique indigène a pour but de donner au-delà des améliorations économiques et matérielles « le sens profond de la vie ».

            Deuxièmement, il faut que les masses indigènes soient maintenues et perfectionnées dans leurs cadres traditionnels ; il faut éduquer les noirs en les laissant dans leur milieu.

            Enfin, et cette troisième consigne est d’une résonnance profondément chrétienne – « Rien ne peut être fait sans une parcelle d’amour ».

            Ses idées allaient dominer la conférence de Brazzaville. Au lendemain de celle-ci, épuisé par un travail surhumain, Eboué partait se reposer en Syrie, mais, terrassé par la maladie, il mourait au Caire le 17 mai 1944. La France et la civilisation perdaient en lui un grand serviteur.

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