samedi 8 février 2014

Centrafrique : départ des soldats tchadiens de la Misca ? (par Pascal Djimoguinan)


            La présence des soldats tchadiens dans la Misca est devenue un abcès de fixation de toute la haine qui est à son paroxysme en Centrafrique. Sur le plan aussi bien politique que militaire, le Tchad a-t-il intérêt à maintenir ses troupes dans ce pays ? Le moment n’est-il pas venu d’anticiper les choses et de changer de stratégie ?

            Pendant longtemps, le Tchad a argué du mandat de la CEMAC puis de l’UA pour justifier sa présence militaire en Centrafrique. Il a indiqué qu’il fallait une présence militaire tchadienne pour assurer l’ordre dans ce pays. Peut-être qu’il fut un temps où cela était vrai mais depuis décembre, les choses ont changé.

            Depuis décembre, l’intervention française en Centrafrique a changé la donne. Il faut dire que dès le début, les français se sont laissé piéger et cela les a mis en porte-à-faux. Leur stratégie était de venir neutraliser la Séléka et restaurer la sécurité dans le pays à partir de Bangui vers l’intérieur du pays. Elle n’a pas su intégrer un fait nouveau qui est venu transformer complètement la situation, l’attaque de Bangui par les anti-balakas du 5 décembre. Les français ont voulu appliquer le plan de départ alors que cela était dépassé. Ils ont, sans le savoir, laissé se développer les germes de cette situation dont si on ne prend garde, se transformerait en une épuration sinon ethnique, du moins communautaire. Sans le vouloir, la fameuse phrase de François Hollande sur Michel Djotodia pourrait être retournée à la France : « On ne peut pas laisser en place un président qui n’a rien pu faire, a laissé faire ». Cela fait déjà deux mois que la France est en Centrafrique et les pogroms continuent en même temps que les sites de déplacés ne désemplissent pas.

            Même si la situation n’est pas encore stable en Centrafrique, en plus des forces Sangaris, les forces africaines sont en train de monter en puissance et leur nombre ne cesse de croître. Il devient inévitable que cette force se transforme dans les mois à venir en force onusienne. Cela signifie que les soldats tchadiens ne sont plus indispensables en Centrafrique. Au contraire, le retrait des soldats tchadiens de la Misca pourrait créer un nouveau dynamisme qui sera utile dans l’avenir. Il n’y a aucun bénéfice pour le Tchad de demeurer en Centrafrique et de faire l’objet de toutes les accusations.

            De toutes les façons, le Tchad a eu à jouer longtemps en eau trouble ; on ne peut pas être à la fois juge et partie. La meilleure chose à faire pour le Tchad, c’est de faire profil bas en Centrafrique. Cela consiste à retirer ses troupes, à juger les mercenaires Séléka tchadiens, confiés les enfants soldats à l’Unicef et enfant demander aux organismes internationaux de s’occuper des Séléka centrafricains en réfugiés au Tchad. Il viendra un moment où il faudra parler de la réintégration des musulmans centrafricains dans leur pays. Le Tchad ne pourra servir d’intermédiaire que si sa neutralité est avérée.

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