samedi 31 mai 2014

Tchad : Agent de l'Etat ou de l'ethnie (par Pascal Djimoguinan)


            Il est un fait au Tchad qui, au début, faisait sourire certaines personnes, puis avec le temps, a fini par agacer plus d’un pour tomber dans une indifférence complice de tous. Il s’agit en fait d’un comportement antirépublicain et anti citoyen, dangereux pour ne nation en construction comme le Tchad. Ce fait consiste en ce que lorsqu’une personne est nommée dans un poste important de l’Etat, les membres de son groupe ethnique fassent passer un communiqué à la radio nationale pour remercier le chef de l’Etat d’avoir nommé un de leur fils à ce poste de responsabilité. Normalement la République ne devrait pas cautionner de tels faits et cela pour plusieurs raisons.

            Ce qui se passe fait penser aux systèmes féodaux de gouvernement où la famille ou la dynastie régnante se doit de s’associer à d’autres familles et créer une alliance assez forte pour imposer sa domination. Ici, le pouvoir ne vient pas du peuple mais de la force, obtenu grâce à une gestion judicieuse des rivalités avec différentes familles puissantes, différentes cités… Nous retrouvons cela également chez les chefs de cantons du Tchad qui prennent habituellement une femme dans chacun de village de leur circonscription pour créer des alliances qui raffermissent leur autorité.

            La République ne doit pas salarier les communautés ethniques, sinon c’est la porte ouverte à la gabegie et le népotisme.

            En poussant la réflexion plus loin, il serait possible de démanteler la stratégie qui se trouve à la base de cette pratique. A quels critères obéit-on dans la nomination des agents de l’Etat ?

            Normalement, c’est la compétence qui devrait être mise en avant. C’est un citoyen qui est désigné pour être un commis de l’Etat. Il doit être performant dans son poste.

            Or les communiqués radiodiffusés nous font penser le contraire. Ils laissent à penser que c’est pour remercier telle ou telle communauté ethnique que seraient certaines personnes à des postes importants. Si tel était le cas, la compétence ne serait pas recherchée. En plus, l’agent en fonction ne serait plus redevable à l’Etat mais uniquement à sa communauté qui l’a propulsé à cette place. Il lui faudra donc rendre l’ascenseur au sein de sa communauté ethnique dont il devient d’emblée l’otage.

            Ainsi, petit à petit, on ne s’avance vers la construction d’une nation mais plutôt à la constitution d’agrégations d’intérêts ethniques prêtes à se disloquer pour se reformer plus loin autour du meilleur enchérisseur.

            La République devrait désormais interdire que ces communiqués « anti citoyens » passent à la radio nationale puisqu’ils encouragent des pratiques d’un autre âge et portent en eux des germes de dislocation de la nation. Aux postes de l’’Etat, ne sont nommés que des citoyens au service de l’Etat !

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