On se souvient de cette boutade rapportée par le
professeur Jean-Paul Ngoupendé, parlant de paysans en Centrafrique qui,
mécontents du sort qui leur était réservé, demandaient quand prendraient fin
les indépendances. Si cela portait au début au sourire, il faut dire que cela
devient maintenant un rire jaune. Que reste-t-il encore des indépendances
africaines aujourd’hui ? Faut-il les jauger à l’aune du développement
économique ou à celle de la sécurité ? Si l’économie était autrefois la
brèche qui permettait à l’Occident de diriger l’Afrique, aujourd’hui c’est l’insécurité
chronique qui règne en Afrique qui sort de cheval de Troie pour faire perdre au
vieux continent son autonomie, jugez-en !
En janvier 2013, pour arrêter la horde des djihadistes d’AQMI
dans leur marche victorieuse vers Bamako, la France a dû intervenir
militairement (pour mettre en œuvre la résolution 2085 du conseil de sécurité
des Nations-Unies) en envoyant un contingent de soldats. Pendant ce temps, les
africains passaient leur temps à discuter de l’opportunité d’une intervention
au Mali ; il y avait plus de réunion que de réelle volonté d’intervenir
concrètement. Dans la foulée de son intervention, la France a imposé des
élections qui se sont déroulées dans un délai relativement court.
En Centrafrique, lorsque les Nations-Unies votent leur
résolution le jeudi 5 décembre par la résolution 2127 (qui autorise le
déploiement de la mission internationale, le France intervint dans un pays qui
se débattait depuis plusieurs mois dans une guerre civile qui se passait loin
des medias. Dans la foulée, la France organisa un mini-sommet à l’Elisée sur la
Centrafrique où sont convoqués divers chefs d’Etat africains. Le cœur de l’Afrique
s’est déplacé à Paris où désormais les décisions les plus importantes sont
prises au vu au su de tout le monde. Par la suite, la France en profitera pour
réorganiser ses forces en Afrique avec le prétexte de la sécurité dans le
Sahel. Il ne se trouve désormais plus personne pour protester. Le silence est
éloquent : l’Afrique ne peut se passer du parrain français pour assurer sa
défense.
Le 17 mai 2014, le président Hollande convoque à l’Elysée
les présidents du Nigéria, du Cameroun, Du Benin, du Tchad et du Niger pour un
sommet sur la sécurité sur le Nigéria et pour voir comment contrer Boko Haram, cette secte
islamiste qui sévit dans la région. Si l’Afrique francophone avait perdu son
autonomie sur le plan sécuritaire depuis très longtemps, ce dernier sommet
marque un tournant ; désormais l’Afrique anglophone, par le biais du
Nigéria vient de signer son entrée dans la françafrique sécuritaire. Il n’y a
plus de fierté. A l’impossible, nul n’est tenu.
On ne peut plus demander quand viendra la fin des
indépendances ; nous y sommes déjà. Nous sommes en train de vivre une
nouvelle ère où les décisions les plus importantes pour l’Afrique se prennent
ouvertement en Occident. Nous avons peut-être mérité cela puisque nous sommes
incapables d’assurer notre propre sécurité. Nous avons préféré capables de bâillonner
les peuples plutôt que celle qui pouvaient assurer sa sécurité. Nous ne nous
sommes jamais occupé de la circulation des armes et exigé que les embargos
soient respectés.
Quelle Afrique allons-nous léguer à la prochaine
génération ? Incapables de la développer sur le plan économique, nous
sommes en train de resserrer les dernières entraves qui feront de l’Afrique un
continent sans autonomie, et cela, peut-être avec bonne conscience, tout
simplement parce que nous ne sommes pas conscients. Pauvre Afrique !
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