La construction d’une nation au Tchad doit faire face à
plusieurs pierres d’achoppement dont il faudrait le concours de tous pour triompher.
Pourtant, lorsque que l’on regarde les faits, on peut se prendre à douter que
chacun cherche à édifier cette nation qu’on ne célèbre que du bout des lèvres.
Un fait massif se donne à l’observateur du paysage
socio-politique tchadien. Il y a ces dernières années un développement exagéré
des chefs de races. Quel est leur statut juridique ? Bien sûr, la
constitution du Tchad reconnait dans son préambule la « volonté de vivre ensemble dans le respect
des diversités ethniques, religieuses, régionales et culturelles »
mais est-ce une ouverture à des dérives qui pourraient mener hors de la
république ? Les chefferies traditionnelles, sont-elles des monarchies
dans la République ou des instances auxiliaires de l’administration du
territoire ?
Depuis l’institution des chefs de races, certains parmi
eux n’hésitent pas dans les communiqués de presse à s’attribuer le titre de « sa
majesté ».
L’Etat semble fermer les yeux sur les probables dérives
car il les utilise pour régler certains problèmes d’une manière communautaire.
Il s’en suit que l’autorité-même de l’Etat s’érode car les textes de la
République ne sont pas respectés. La pratique de la Diya répond également à ce
désir nébuleux de l’Etat à démissionner devant ses devoirs. Comment une loi
particulière peut-elle s’étendre à tous contre le grès des citoyens d’autres
coutumes ?
Dès qu’on fonctionnaire de l’Etat est nommé à un poste de
responsabilité, les chefs traditionnels de son ethnie, son chef de race, chef
de canton et autres envoient un message de félicitations au chef de l’Etat d’avoir
nommé un des leurs à ce poste.
Une question se pose. Quels sont les critères de choix
dans les postes de responsabilité au Tchad ? N’est-ce plus la compétence ?
Choisit-on les hauts fonctionnaires en vertu de leurs ethnies ? Est-ce une
façon détournée de se partager le gâteau ? Ne devrait-on pas, au nom de la
nation, interdire cette pratique ?
Comment construire une nation si chaque ethnie ne défend
que ses intérêts au dépend de l’intérêt général ? Tant que nous tenons à
rester un agrégat d’ethnies, nous ne pourrons constituer une nation et avoir un
projet commun.
Pour finir, nous pouvons réfléchir sur la définition que
Gaston Fessard donne de la nation. Il la définit comme « une unité sociale formée
par un peuple (ou des peuples) qui, après avoir pris conscience de son unité,
fondée sur une origine commune, tend à assurer son avenir en se représentant à
soi-même et aux autres par le moyen d’un Etat ».
La tâche est peut-être rude mais
commençons à retrousser nos manches et à l’ouvrage. C’est toujours le premier
pas qui est difficile. Construisons la nation tchadienne.
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