mardi 17 mai 2022
Mon Tchad est mal parti, à qui la faute ? (par Pascal Djimoguinan)
mardi 10 mai 2022
Tchad : Comment les mongo racontent l’origine de la mort (par Pascal Djimoguinan)
Ndɔ̄
kárē be dáa, Sú ulə kulə rɔ̄ yo tə́ ne kadə̄ kínə́ dow̄ oyi dáa, kadə̄ a ndə́l
nga nā̰y̰ɪ̄ ə́ oyi dáa kadə̄ oyi rɪ́ẃ. Ngon kulə lə Sú lé to líyə̄. Lo kə́ Sú
lé isə idē ta lé be dáa, ī báila, ī ɓɔ̄yɔ̄ rɔ̄yí kadə kəyí tə, ō ta lé láyí.
Báila
tḛ̄ḛ̄ kə ngɔdə̄ kuté tə kalang a̰yī ɔwū idə yo pane : « Ī yo wa, Sú
uləḿ rɔ̄yí tə́ kādə m-reē kalang m’ídə̄ī : nā̰y̰ɪ̄ ə́ oyi dáa, kadə̄ ndo
mutə́ gō tə dáa ndə́l, nga dow̄ oyi dáa, ow rɪ́ẃ.
Lo kə́ ī líyə̄ i-ndūr̄ mbḭ́nǵ ī tḛḛ̄ rɔ̄ yo tə́ dáa,
yo oō ta ləí kə̄ ta lám karē. Ḛ ɓá dɔw̄jē d-óyné dáa d-oý rɪ́w ngaā nāy̰ī oy
dáa rā ndɔ̄ mutə́ yáa dáa tḛḛ̄ kəmé.
Un jour, sou envoya une commission
chez la mort pour que si les humains meurent, ils puissent ressusciter après
trois jours mais que si la lune meurt, que cela soit une fois pour toutes. Le
messager de Sou est le caméléon. Pendant que Sou était en train de parler, le
margouillat s’était caché contre le mur et avait tout entendu.
Le margouillat sortit à toute
vitesse pour aller dire à la mort : « Toi la mort, tu vois, Sou
m’envoie vers toi pour que je vienne vite te dire : si la lune meurt, elle
doit ressusciter après trois jours mais si c’est un humain, qu’il meurt pour
toujours. »
mercredi 27 avril 2022
L’harmonie universel chez les mongo, une comptine de plus (par Pascal Djimoguinan)
Kūnjə́ j-ɔw̄ walé
M-ɔw̄ walé aĺ ne mulə uwəḿ
Mulə úwə̄ kūnjə́ dɔ̄rí ?
M-úwə̄ kūnjə dɔ̄ ta lə gánē yō̰
Kūnjə́ i gánē yō̰ dɔ̄ ta lə ri ?
M-gánē yō̰ dɔ̄ ta lə yō̰ o̰ bá̰ndə̄
Yō̰ ó̰ bándə̄ dɔ̄ ta lə rí
M-ó̰ bá̰ndə̄ ne bándə̄ uwə dul
Bándə̄ úwə̄ dul dɔ ta lə ri
M-úwə̄ dul ne dul usə páīlá
Dul usə páīlá dɔ̄ ta lə rí
M-úsə̄ páīlá ne páīlá usə kan̰̄jɪ̄
Páīlá úwə̄ kā̰njɪ̄ dɔ̄ ri
M-úwə̄ kā̰njɪ ne kā̰njɪ̄ a̰y̰ɪ̄ mań
Kānjɪ̄ ā̰yḭ̄ man̄ dɔ̄ rí
M-ā̰y̰ī man̄ ne man̄ tɔ̄l pər
Man̄ ī tɔ̄l pər dɔ̄ rí
m-tɔ̄l pər ne pər o̰ kə́ý
Pər ī-ó̰ kə́ý dɔ̄ rí
M-ó̰ kə́ý ne kə́ý ros ɓē
Kə́ý ī ros ɓē dɔ̄ rí
M-ros ɓē aĺ ə ta ɓe na̰y̰ gajɪ
Poulet allons en brousse
Je ne vais pas en brousse
car le chat sauvage va m’attraper
Chat sauvage pourquoi
attrapes tu le poulet ?
J’attrape le poulet parce
qu’il gratte le termite
Poulet, pourquoi
grattes-tu le termite ?
Je gratte le termite parce
qu’il détruit le filet
Termite, pourquoi détruis-tu
le filet ?
Je détruis le filet parce
qu’il attrape la biche-cochon
Filet, pourquoi
attrapes-tu la biche-cochon ?
J’attrape la biche-cochon
parce qu’elle mange ls roseau (Arbuste, Securidaca longepeduncalata)
Biche-cochon, pourquoi
manges-tu le roseau ?
Je mange le roseau[1] parce qu’il attrape le
poisson
Roseau, pourquoi
attrapes-tu le poisson ?
J’attrape le poisson parce qu’il boit l’eau
Poisson, pourquoi bois-tu
de l’eau ?
Je bois l’eau parce que
l’eau éteint le feu
Eau, pourquoi éteins-tu le feu ?
J’éteins le feu parce que le feu brûle les cases
Feu, pourquoi brûles-tu les cases ?
Je brûle les cases car elles remplissent le village
Cases, pourquoi remplissez-vous le village ?
Si je ne remplis pas le village, le village sera informe.

mercredi 20 avril 2022
TCHAD : Sarh, la ville verte sacrifiée (par Pascal Djimoguinan)
De
toutes les villes du Tchad, Sarh est parmi celles qui ont eu pour héritage les
meilleurs aménagements. La ville est bien pensée, avec des rues bien tracées.
Des espaces verts sont prévus. Il faut dire que la ville a été pensée d’une
façon qui est en avance sur les exigences écologiques, bien avant sa création.
Malheureusement, tout cela n’est aujourd’hui qu’un vieux
souvenir. Une nouvelle politique de l’aménagement de la ville, n’ayant rien à
voir avec l’écologie, a vu le jours à Sarh.
Les espaces verts, autrefois appelés « forêt »,
sont désormais vendus à des particuliers. Une déforestation sauvage a
complètement défiguré la ville. A la place des arbres, se dresse des villas,
faites de briques cuites.
Les poumons de la ville verte sont atrophiés. ; Sarh
respire désormais difficilement.
Pour se rendre compte de l’état de la ville de Sarh, il
suffit de se promener un peu ; les dégâts sont partout. A titre d’exemple,
il faut aller vers la sortie de la ville vers Kyabé. Après la société textile
(NSTT) et sur deux ou trois kilomètres vers la gauche. Il n’y a pas plus de 10
ans, il y avait un beau bois où les élèves et les étudiants se rendaient pour
étudier. Maintenant, on ne peut y constater qu’un massacre écologique.
Il faut se demander qui a décidé de la nouvelle politique
de l’aménagement de la ville. Les urbanistes devraient expliquer leur projet à
la population.
On peut constater que toute l’urbanisation de la ville de
Sarh est devenue anarchique. Le quartier résidentiel est devenu un quartier
populaire avec des huileries, des garages et des vendeurs improvisés ;
tout cela se passe dans un vacarme étourdissant.
Qui est responsable de l’urbanisation à Sarh ?
Est-ce la commune ou les services cadastres ? Qui organise le
désordre ? Dans un pays normal, le maire de la ville aurait été interpelé.
mardi 19 avril 2022
Tchad le pré-dialogue, un mauvais signe (par Pascal djimoguinan)
A la
suite de la disparition brutale de l’ancien président du Tchad le maréchal
Idriss Déby Itno le 20 avril 2021, le conseil militaire de transition qui a
repris les rênes du pays s’est rendu
compte qu’il fallait un nouveau processus pour réhabiliter le Tchad. Le
dialogue national inclusif est apparu comme le moyen de réunir les Tchadiens
pour un nouveau départ. Aux dernières nouvelles, la date du dialogue national
inclusif est maintenue pour le 10 mai 2022.
Personne
ne sait encore si cette date sera respectée, surtout quand on voit toutes les
tergiversations qui accompagnent le pré-dialogue qui se tient à Doha au Qatar.
S’il y
a un sujet qui mérite réflexion, ce serait moins au sujet du dialogue national
inclusif que du pré-dialogue.
En
effet, rien que le fait qu’il y ait besoin d’un pré-dialogue est un signal
d’alarme pour le Tchad.
Le 21
août 1979, des tendances politico-militaires du Tchad ont signé des accords à
Lagos, au Nigéria ; il s’agissait d’établir un cessez-le-feu, de libérer
les prisonniers politiques, de démilitariser la ville de N’Djamena et
d’intégrer les membres des différentes forces dans la gestion du pays. Cet
accord fait suite à une autre conférence qui s’était tenue à Kano (Nigéria) du
7 au 14 mars 1979 suivie de Kano II (avril 1979).
Aujourd’hui,
quarante ans après les accords de Lagos (et Kano), nous faisons du surplace.
C’est comme si le temps s’était arrêté. Rien ne semble avoir changé. Tout se passe
comme dans un vieux film usé, ou comme un disque vinyle rayé. Les
politico-militaires doivent se réunir avant qu’un dialogue puisse s’engager
entre les tchadiens.
C’est
vrai qu’au Tchad, la honte ne tue pas. Cependant, il faudrait mieux rehausser
le débat sur le plan intellectuel.
Si
depuis 1979, les politico-militaires prennent tout un pays en otage, est-ce
possible que cela change un jour ? Ne peut-on dialoguer au Tchad que
l’arme au poing ? Les tchadiens n’auraient-ils pas encore découvert que
l’on peut tout faire avec une baïonnette, sauf s’asseoir dessus ?
Beaucoup
se réjouissent de la tenue du pré-dialogue mais en réalité, c’est un très
mauvais signe qui n’augure en rien des lendemains qui chantent. Le pré-dialogue
est le révélateur de l’impossibilité d’un vrai dialogue entre tchadiens. Il y a
trop de préjugés, de méfiance et de haine, si bien que chacun ne se sent en
sécurité que lorsqu’il s’appuie sur son kalashnicov AK 47.
Les
accords de Doha, s’il sort quelque chose du pré-dialogue, ressembleront comme
deux gouttes d’eau aux accords de Lagos. C’est dire que rien n’aura changé
puisque, ne prenant pas en compte les enjeux nationaux, chacun s’agrippera sur
ses propres intérêts ou sur les intérêts de son petit groupe et tout sera à
recommencer à la prochaine échéance.
Le
problème du Tchad est un problème institutionnel. C’est un problème de justice
et de droit. Quand des magistrats sont spoliés, agressés, mille pré-dialogues
n’apporteront rien. Commençons par faire du Tchad un pays de droit, où les textes
en vigueur son respectés et où la Justice trouve sa vraie place de troisième
pouvoir. Ainsi, nous n’aurons pas besoin d’armes ni de pré-dialogue pour nous
entendre entre tchadiens.
mercredi 6 avril 2022
Tchad : Sarh qui rit et Sarh qui pleure (par Pascal Djimoguinan)
Dans une ville, n’importe laquelle, ses habitants
crieront à la cantonade qu’ils aiment leur ville. Mais entre le dire et le
faire, il y a la distance d’un abime. Il suffit de se promener dans la ville
pour s’en rendre compte.
L’esprit civique ne fait pas bon ménage avec des actes de
vandalisme dont font preuve beaucoup d’habitants de Sarh. Il y aurait beaucoup
de choses à dire mais je ne me contenterais que d’une seule. En vérité, cela me
fait mal au cœur. Je cherche d’autres âmes sensibles, capables de se plaindre
avec moi, car un deuil, ne se vit qu’à plusieurs en Afrique.
Il y a un groupe de jeunes sarhois, soucieux de leur
ville, qui ont entrepris des actions pour favoriser le bien-être des citadins.
Nous les avons vus enlever les détritus et les ordures
qui envahissaient la ville. Cela a montré que des jeunes sont capables de se
mettre ensemble pour des actions citoyennes, capables de rehausser le niveau de
la vie dans la ville de Sarh.
Nous les avons vus récurer les caniveaux, de la ville,
les nettoyer pour permettre à l’eau de s’écouler et éviter ainsi toutes les
maladies liées à l’eau. Nous savons que l’eau contaminée et le manque
d’assainissement entrainent la transmission des maladies comme le choléra, la
diarrhée, la dysenterie, l’hépatite A, la poliomyélite, etc.
Là où le bat blesse, c’est que certains habitants de la
ville de Sarh, on ne sait si c’est par bravade, ou simplement par un esprit de
vandalisme, se sont mis à détruire tout ce que les jeunes font pour la ville.
Un seul exemple est assez parlant. Sur la route à
double-voie qui traverse Bégou, partant du rond-point Nargaye jusqu’à l’usine
textile NSTT, des jeunes ont entrepris de planter des palmiers à huile. Pour
protéger les jeunes plantes, ils ont construit des abris en briques cuites tout
autour. Malheureusement, certaines personnes mal intentionnées ont cassé tous
ces abris, laissant les plantes à la merci des cabris et des chèvres du
quartier. Maintenant il ne reste plus rien. Tout le travail est à refaire, sans
que l’on sache si cela tiendra. Les jeunes avaient fait passer des communiquer
à la radio pour expliquer leurs actions et pour sensibiliser la population
mais, cela n’a pas produit les fruits escomptés. Devrions-nous attendre que le
développement nous vienne d’ailleurs ?
jeudi 24 mars 2022
TCHAD : Lutte contre les mutilations génitales (par Pascal Djimoguinan)
A l’instar d’autres pays, le Tchad s’est engagé dans la lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF). Il a ratifié les conventions internationales protégeant les droits des femmes et des enfants. Il a, en outre, adopté des textes sur le plan national pour lutter contre les MGF ; on peut citer en l’occurrence la loi n° 006/PR2002 du 18 avril 2002, portant promotion de la Santé de la Reproduction interdit les MGF dans son article 9.
Malgré ces engagements étatiques et
aussi des différents groupes de la société civile et religieuse, la lutte
contre les MGF semble marquer le pas. La pratique continue dans la discrétion.
La persistance de cette pratique détonne. Il fallait donc
s’interroger si cette pratique a toujours existé dans le sud du Tchad, plus
précisément dans le grand Moyen-Chari.
Les élèves de la classe de 1ère D2 du
Lycée-Collège Charles Lwanga de Sarh ont entrepris une enquête sociologique
pour savoir s’il n’existait pas une autre pratique, au sud du Tchad,
particulièrement dans le Moyen Chari avant l’introduction de l’excision.
Il en ressort que bien avant l’introduction de
l’excision, il existait une initiation de femmes, n’ayant aucun rapport avec
l’excision ; il s’agit du « Ndo gɔ́ŕ ». Elle se faisant pendant
une période de réclusion d’environ trois mois en brousse. Cette initiation
porte principalement sur les conseils et la formation donnée aux néophytes.
Nous avons retenu ici, les apports de quelques élèves,
représentatifs des autres.
Valerie NANDOJO KONGAR :
L’initiation des femmes est un acte
ou un processus qui permet d’apprendre les valeurs traditionnelles ou
culturelles aux jeunes filles. Au Sud du Tchad, il existe plusieurs ethnies et
chacune d’elles a sa culture ou tradition. Il s’agit de dire ici qu’elle genre
d’initiation existait au sud du Tchad avant l’introduction de l’excision.
L’initiation consiste à apprendre
aux jeunes filles les valeurs traditionnelles. Au sud du Tchad, chaque ethnie
pratiquait l’initiation à sa manière. Pour les Sar, avant l’introduction de
l’excision, on rassemblait les jeunes filles en brousse pour la formation
pendant plusieurs jours avant de les ramener à la maison. Cette formation
consistait à montrer aux jeunes filles comment saluer, parler, demander quelque
chose à un homme. Les filles apprennent qu’il faut se lever tôt pour balayer et
préparer à manger. L’initiation consiste à montrer à ces filles la manière de s’habiller,
de prendre part aux réunions, aux funérailles et aussi comment se protéger pendant
la période des menstruations. Cette initiation s’appelait « Ndo gɔ̄ŕ »
Dans d’autres ethnies par contre, la
fille était appelée à rester auprès de sa maman pour la formation ; cette
formation se passait aussi autour du feu la nuit et on parlait alors de « Tahowndal ».
Bref, l’initiation des femmes était
une pratique qui permettait aux jeunes filles de connaître les valeurs traditionnelles.
Cette pratique était particulière dans chaque ethnie et se pratiquait de
diverses manières.
Antoinette DJERE :
Par définition, l’initiation est le
fait de donner les premiers rudiments d’une science ou d’un art à une personne
ou à un groupe de personnes. Nous allons tenter de cerner en quoi consistait l’initiation
des femmes au sud du Tchad avant l’introduction de l’excision.
Jadis, nos grands parents
pratiquaient une initiation féminine. En effet, cette initiation consistait à
transmettre aux filles les valeurs culturelles traditionnelles de l’Afrique.
Au sud du Tchad, chez les sar, cette
initiation était appelée « Ndo gɔ̄ŕ ». On
rassemblait les filles en brousse pour une durée de trois mois au cours de
laquelle elles recevaient des notions sur les qualités de la femme qui sont
entre autres : le respect de soi et d’autrui, la fidélité, la propreté, la
solidarité, l’amour du travail, ainsi que les autres qualités d’une bonne femme.
Cette initiation rendait les filles aptes à participer à divers préparatifs
touchant les cérémonies d’initiation des jeunes garçons. Cette initiation des
filles porte aussi le nom de « l’initiation aux conseils ».
Pour conclure, nous pouvons dire que
l’initiation des femmes a existé au sud du Tchad bien avant l’introduction de
l’excision. Elle permettait d’éduquer les femmes. Il faut se demander pourquoi
elle a aujourd’hui disparu pour faire place à l’excision.
Hervé NDIL ALADOUMADJI :
Par définition, l’initiation est le
fait d’admette à la connaissance ou au culte d’un mystère religieux, aux pratiques
d’une société. En effet, auparavant, les femmes étaient initiées avant l’introduction
de l’excision. En quoi consistait cette initiation ? Cette question fera
l’objet de notre travail.
Avant l’introduction de l’excision
au sud du Tchad, les femmes étaient initiées. En effet, c’est un privilège pour
elles car cela ne concernait pas n’importe quelle femme. Au sud du Tchad, chez
les sara Madjingaye, cette initiation était appelée « Ndo gɔ̄ŕ ».
Seules les filles de la noblesse, des privilégiées, étaient initiées. La durée
de cette initiation était de trois mois. Les filles se retiraient en brousse
pour apprendre beaucoup de choses dont la qualité d’une femme exemplaire,
respectueuse. Parmi les valeurs transmises, nous pouvons citer les suivantes :
une femme doit ̂être réservée quand elle rit, surtout dans les lieux publics ; elle
ne mange pas debout, ni en marchant ; la façon de s’habiller dans la
société, la propreté aussi bien à la maison que dans la société, la solidarité
et le travail bien fait. Cette initiation permettait aux femme d’assister aux
cérémonie concernant l’initiation des garçons. Selon une légende, le secret de
l’initiation aurait été découvert par les femmes qui l’ont ensuite transmis aux
hommes qui finiront par les exclure de cette pratique.
En conclusion, nous pouvons dire
qu’avant l’excision, les femmes avaient une forme d’initiation au Tchad.
Celle-ci consistait à transmettre une éducation, et des qualités telles que la
fidélité, le respect et l’amour du travail. Il faut se demander pour quoi
l’excision a remplacé cette initiation féminine.
Armel Didier KOINA ASTA :
L’initiation se définie comme étant
l’ensemble des cérémonies introduisant quelqu’un dans une société secrète.
Autrefois, avant l’introduction de l’excision qui vient des arabes, les femmes
étaient initiées. Dans le Mandoul, on appelait cette initiation « gɔ̄ŕ ».
Cette initiation ne concernait que
les filles de la classe des nobles et celle de la classe des privilégiées. Les
filles passaient trois mois en brousse et revenaient maquillées au village pour
la danse. Durant leur séjour en brousse, elles apprenaient la manière de vivre
dans la société. L’initiation consistait à transmettre aux filles des valeurs
traditionnelles telles que le comportement ; elles devaient être
respectueuses envers les autres, car une bonne femme est celle qui écoute les
conseils qui lui sont donnés. Les filles ne doivent pas manger en cours de
route, debout ; elles doivent s’asseoir avant de saluer les aînés. Elles
apprenaient à s’habiller convenablement, c’est-à-dire d’une manière décente
Elles devaient marcher et rire en suivant des normes que voulait la société. Elles
apprenaient la propreté, aussi bien en ce qui concerne la nourriture que pour
le corps. Il leur était enseigné la bonne manière de s’occuper de leur mari.
Après l’initiation, elles pouvaient préparer la nourriture
pour l’initiation des garçons et pouvaient également prendre part aux
différentes réunions qui se tenaient dans les villages.
Tout ce savoir se transmettait de génération en génération.
L’avantage de l’initiation traditionnelle féminine était
que les femmes n’étaient pas exposées aux problèmes liés aux dangers de l’accouchement
comme c’est le cas avec les femmes excisées. Il faut s’interroger sérieusement
sur l’abandon de l’initiation féminine au profit de l’excision. Ne faudrait-il
pas y revenir ?
Mahamat Adam YOUSSOUF :
L’initiation dans
son sens le plus couramment utilisé désigne une étape de la vie ou une
procédure qui permet à un adolescent(e) de devenir mature. L’excision, d’un
autre côté, est une pratique qui consiste à la mutilation de la femme. En quoi
consistait l’initiation des femmes au sud du Tchad avant l’introduction de l’excision ?
De nos jours, force est de constater que l’initiation
fait l’objet d’une interprétation différente de l’ancienne. Jadis, l’initiation
des jeunes filles au sud du Tchad consistait à un moment d’isolement en brousse
avec des ainées, celles ayant déjà bravé le stade de l’initiation et qui sont
devenues femme car pour être femme, il fallait avoir été initiée. Ces jeunes
filles, pendant la période de réclusion en brousse, recevaient des enseignements
dans la perspective de les aider à bien gérer leur foyer après le mariage. Ainsi,
une femme doit obéir à son mari, ne jamais propager les problèmes conjugaux et
garder les secrets de son mari.
Tous ces enseignements étaient prodigués aux jeunes
filles et c’est après avoir franchi ces étapes qu’elles étaient considérées
comme des femmes dans la société.
L’initiation des jeunes filles, jadis, consistait juste à
un enseignement du savoir faire et du savoir vivre aux jeunes filles pour leur
permettre de mener une vie respectueuse.
De nos jours, avec l’introduction de l’excision, l’initiation
des jeunes filles ne consiste malheureusement plus à un enseignement, mais
plutôt à une mutilation de la femme car on fait l’ablation de certains organes
et cela les expose à plusieurs dangers.
De tout ce qui précède, l’initiation qui avait lieu avant
l’introduction de l’excision avait beaucoup d’avantage par rapport aux
différents dangers inhérents à l’excision.