A la
suite de la disparition brutale de l’ancien président du Tchad le maréchal
Idriss Déby Itno le 20 avril 2021, le conseil militaire de transition qui a
repris les rênes du pays s’est rendu
compte qu’il fallait un nouveau processus pour réhabiliter le Tchad. Le
dialogue national inclusif est apparu comme le moyen de réunir les Tchadiens
pour un nouveau départ. Aux dernières nouvelles, la date du dialogue national
inclusif est maintenue pour le 10 mai 2022.
Personne
ne sait encore si cette date sera respectée, surtout quand on voit toutes les
tergiversations qui accompagnent le pré-dialogue qui se tient à Doha au Qatar.
S’il y
a un sujet qui mérite réflexion, ce serait moins au sujet du dialogue national
inclusif que du pré-dialogue.
En
effet, rien que le fait qu’il y ait besoin d’un pré-dialogue est un signal
d’alarme pour le Tchad.
Le 21
août 1979, des tendances politico-militaires du Tchad ont signé des accords à
Lagos, au Nigéria ; il s’agissait d’établir un cessez-le-feu, de libérer
les prisonniers politiques, de démilitariser la ville de N’Djamena et
d’intégrer les membres des différentes forces dans la gestion du pays. Cet
accord fait suite à une autre conférence qui s’était tenue à Kano (Nigéria) du
7 au 14 mars 1979 suivie de Kano II (avril 1979).
Aujourd’hui,
quarante ans après les accords de Lagos (et Kano), nous faisons du surplace.
C’est comme si le temps s’était arrêté. Rien ne semble avoir changé. Tout se passe
comme dans un vieux film usé, ou comme un disque vinyle rayé. Les
politico-militaires doivent se réunir avant qu’un dialogue puisse s’engager
entre les tchadiens.
C’est
vrai qu’au Tchad, la honte ne tue pas. Cependant, il faudrait mieux rehausser
le débat sur le plan intellectuel.
Si
depuis 1979, les politico-militaires prennent tout un pays en otage, est-ce
possible que cela change un jour ? Ne peut-on dialoguer au Tchad que
l’arme au poing ? Les tchadiens n’auraient-ils pas encore découvert que
l’on peut tout faire avec une baïonnette, sauf s’asseoir dessus ?
Beaucoup
se réjouissent de la tenue du pré-dialogue mais en réalité, c’est un très
mauvais signe qui n’augure en rien des lendemains qui chantent. Le pré-dialogue
est le révélateur de l’impossibilité d’un vrai dialogue entre tchadiens. Il y a
trop de préjugés, de méfiance et de haine, si bien que chacun ne se sent en
sécurité que lorsqu’il s’appuie sur son kalashnicov AK 47.
Les
accords de Doha, s’il sort quelque chose du pré-dialogue, ressembleront comme
deux gouttes d’eau aux accords de Lagos. C’est dire que rien n’aura changé
puisque, ne prenant pas en compte les enjeux nationaux, chacun s’agrippera sur
ses propres intérêts ou sur les intérêts de son petit groupe et tout sera à
recommencer à la prochaine échéance.
Le
problème du Tchad est un problème institutionnel. C’est un problème de justice
et de droit. Quand des magistrats sont spoliés, agressés, mille pré-dialogues
n’apporteront rien. Commençons par faire du Tchad un pays de droit, où les textes
en vigueur son respectés et où la Justice trouve sa vraie place de troisième
pouvoir. Ainsi, nous n’aurons pas besoin d’armes ni de pré-dialogue pour nous
entendre entre tchadiens.
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