Il est courant de parler de cohabitation au Tchad. Des réunions et des ateliers s'organisent en contre-courant de la réalité plus cruelle que vit une partie de la population. Pour être vrai, peut-on dire qu'il y a vraiment un effort en faveur de la cohabitation ?
Qu'entend-on en
fait par cohabitation ? Il faut dire que dans ce mot, tout repose sur le
préfixe "co". Qu'est-ce à dire ? Le préfixe "co" vient du
latin "cum" qui signifie "avec". On utilise donc le préfixe
"c" pour indiquer une relation de participation, d'association ou de simultanéité. L’idée
générale est qu’on fait quelque chose ensemble.
Nous avons ainsi des mots comme colocataires, pour désigner des personnes
qui vivent avec d’autres locataires ; il y a aussi colocataires, qui bien
que ne se trouvant pas encore dans le dictionnaire, signifie les occupants d’une
chambre, c’est-à-dire des personnes qui habitent ensemble dans une chambre. Il
en est ainsi de coexister, coauteur, coopération, coéquipier, etc.
Ainsi la cohabitation qui nous
intéresse ici, signifie habitation ensemble. Pour le cas du Tchad, lorsqu’on
parle de cohabitation, il ne s’agit pas tout simplement d’individus, car le mot
est sociologique, voire politique. Lorsqu’il s’agit des individus d’un même
village, ou d’une même zone géographique, ce mot n’est pas utilisé au Tchad car
il n’y a pas de problème.
La particularité du Tchad est
que la cohabitation transcende les individus pour se focaliser sur les
communautés, plus particulièrement les populations autochtones et celles qui
viennent d’autres régions, notamment les éleveurs qui viennent dans les régions
habitées par des agriculteurs, avec tous les problèmes inhérents à cette
rencontre.
La solution viendrait d’une
concertation initiée par les protagonistes, avec l’Etat qui serait garant de la
paix, de la stabilité et de compromis auquel les différentes communautés
seraient arrivées. Cela suppose un Etat impartial, capable d’inspirer la
confiance, ce qui n’est pas toujours le cas.
Or, il se trouve qu’au Sud du
Tchad, faute de concertation avec l’autre camp, toujours absente ou réticente
aux efforts de dialogues et de réflexion, il n’y a que la partie des
autochtones qui organise des réflexions, des séminaires et des concertations à
ce sujet, ignorant que quand il n’y a qu’une communauté, il ne s’agit plus de
cohabitation.
Ces différentes rencontres
peuvent montrer la bonne volonté d’un groupe, mais cela ne suffit pas. Les
différentes décisions ne se réduisent alors qu’en de simples incantations
magiques dont l’Afrique a le secret, sans aucune prise sur la réalité.
Si la cohabitation implique le
vivre ensemble, cela signifie que la concertation doit être entre les deux
parties et que des décisions doivent être prises ensemble. Il faut apprendre à
dialoguer malgré les difficultés qui se présentent. On ne peut parler de cohabitation
lorsqu’on est seul. Il faut arrêter de poursuivre les chimères.
Ce qu’une communauté peut
faire seule, ce n’est pas la cohabitation, mais la mise en place des stratégies
pour éviter que les champs soient détruits par les animaux et pour éviter que des
vies humaines soient ôtées à tour de bras. Il est très malheureux que l’Etat
démissionne de son rôle de protéger les paysans sur leur sol. Le Tchad
appartient à tous les tchadiens, mais il n’y a pas de Tchadiens de castes
supérieures qui auraient tous les droits et d’autres qui seraient des parias,
corvéables à merci.
Il faut repenser la
cohabitation au Tchad à partir d’une nouvelle perspective qui respecte chacun
dans ses droits et dans sa dignité.
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