Dans le sud du Tchad, plus personne ne se rappelle la
longue saison sèche avec le thermomètre battant tous les recours. Plus personne
ne se rappelle avoir appelé la pluie de tous ses vœux. L’unanimité se fait
désormais pour traiter la pluie de tous les noms, tellement il pleut ces
derniers jours.
L’Homme restera cet éternel insatisfait. Il y a encore
deux mois, dans un village du sud du Tchad dont je tairai le nom, l’officiel
avait été sermonné et menacé du pire traitement si la pluie tardait encore à
tomber. Le pauvre homme ne s’en était sorti qu’en marmonnant quelque chose d’incompréhensible
tout en montrant ses « pierres à pluies » ; l’’audience avait compris
qu’il était enfin décidé à faire tomber la pluie. Depuis cette mémorable scène,
sans doute par un heureux concours de circonstances, les choses ont changé.
Les vannes du ciel semblent s’être ouvertes. La pluie
tombe sans discontinuer ; les nuits sont humides et les journées arrosées.
Non seulement il devient difficile de sortir (au Tchad quand il pleut, les gens
dorment), mais il y a partout des inondations. Les véhicules à quatre roues
ainsi que celles à deux routes ont de la peine à circuler. Si la chaussée n’est
pas inondée, c’est la boue qui occupe l’espace. Les maisons en poto-poto
commencent à s’écrouler les unes après les autres. Loin d’être un bénéfice, la pluie
commence à devenir un fléau.
Partout, les conversations ne tournent plus qu’autour de
la pluie. Dans bien d’endroits, le mil n’avait pas été semé parce que la pluie
était en retard ; maintenant, il est impossible de le remplacer par le riz
car les inondations ont pris de vitesse les paysans.
Certains villageois commencent à murmurer contre les « faiseurs
de pluies » officiels des villages. Si la pluie ne diminue pas son ardeur,
ces derniers risqueront de passer un mauvais quart d’heure.
Il faut se demander pourquoi ces fameux faiseurs de
pluies semblent si importants dans les villages du sud du Tchad. Il faudra
peut-être un jour les approcher pour savoir exactement ce qu’ils sont capables
de faire. Pour le moment, il faut continuer de supporter les caprices de la
pluie en espérant que l’influence de la lunaison exercera une influence sur le
débit et la fréquence de la pluie. En attendant, croisons les doigts.
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