vendredi 4 mars 2022

LU POUR VOUS/ Message de Carême 2022 de l'Archevêque de Bangui (RCA)

« Le voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut. » 2 Co 6, 2 Message de carême 2022 de S. Em Dieudonné Cardinal NZAPALAINGA, C.S.Sp Archevêque Métropolitain de Bangui A la communauté Chrétienne de l’Archidiocèse de Bangui Aux homme et femmes de bonne volonté Chers frères et sœurs, Et vous tous, hommes et femmes de bonne volonté, Béni soit le Seigneur, Dieu de miséricorde et de compassion, qui nous accorde aujourd’hui d’inaugurer le temps du carême, période charnière de notre année liturgique. Le carême est un kairos, un temps si précieux, un don pas de nos efforts mais du cœur miséricordieux du Seigneur, une grâce qu’il convient d’accueillir et de vivre pleinement. Dès maintenant, Dieu veut agir dans nos vies et, à nous, il incombe de discerner et d’agir nous aussi, sans tarder. Dès aujourd’hui, Dieu nous appelle à revenir à lui, à soigner notre relation avec lui et avec notre prochain, à ajuster nos actes et à harmoniser nos engagements avec les appels de l’Eglise. Ce temps inouï de ressourcement nous conduit à la Pâques, le soubassement de notre foi, de notre espérance et de notre charité. Le carême de cette année s’inscrit spécialement dans cette démarche de la synodalité dans laquelle l’Eglise universelle s’est engagée en octobre 2021 et pour laquelle l’Archidiocèse de Bangui a consacré les assises de la dernière Rentrée pastorale. Voici le temps favorable pour faire une halte régénératrice, pour se remettre en question, s’examiner minutieusement, se dépouiller des préjugés et, ensemble, tracer des voies pour aller plus en avant. Prophètes du Christ de par notre baptême, nous sommes investis de la mission d’appeler nos frères et sœurs, d’interpeler toute la société et notre pays, à se laisser se réconcilier avec Dieu. Le carême signe de renaissance et d’espérance. Le carême est un temps d’expérience personnelle et commune d’écoute de la Parole de Dieu, de dialogue et de partage, un temps d’ouverture à l’autre qui peut s’avérer un miroir pour nous permettre de discerner ce que Dieu attend de nous. La portée spirituelle de ce temps de grâce est contenue dans le rite de l’imposition des cendres. Les cendres sont richement évocatrices. Elles symbolisent la fragilité humaine et l’espérance en la miséricorde divine : celui qui se recouvre de cendres, reconnaît ses fautes mais en même temps, entre en pénitence pour renaître à une vie nouvelle (Ps 50 ; Jon 3, 6 ; Jb 42, 6 Jdt 4, 11-15 ; 9, 1). Les cendres sont ce qui reste de la matière consumée. En cela, elles symbolisent la pauvreté, le dépouillement pour l’enrichissement de ce qui est essentiel. À l’instar du résidu qui sert à fertiliser la terre, elles constituent le ferment qui, au terme de nos privations, favorisera le plein épanouissement de notre vie chrétienne. Les cendres, pour finir, expriment le dynamisme même de la vie. Loin de signifier une rupture ou un anéantissement, elles évoquent la continuité, l’espérance en la renaissance. En effet, les cendres dont nos fronts seront imprimés aujourd’hui ont été obtenues de la consumation des rameaux de l’année liturgique dernière. En cela, elles indiquent le passage de la mort à la vie que le carême et la Pâques symbolisent. La fécondité du carême dépend de la profondeur de la relation que nous établissons avec le Seigneur. C’est lui avant tout qui nous interpelle. « Maintenant - oracle du Seigneur » rapporte le prophète Joël dès l’abord de l’extrait de son livre qui est lu le mercredi des cendres (cf. Jl 2, 12-18) : c’est Dieu lui-même qui s’adresse à nous comme à des amis dont il veut la vie et le bonheur. C’est lui-même qui nous appelle à revenir à lui de tout notre cœur. C’est le Seigneur lui-même qui nous indique les armes dont nous devons nous servir pour remporter le combat spirituel qui caractérise ce temps. Ce sont : le jeûne, la prière et l’aumône. Jésus ne se contente pas seulement de les évoquer en tant que pratiques pieuses mais il nous montre par quel moyen elles peuvent s’avérer authentiques. Le jeûne, la prière et l’aumône nous aident à rencontrer Dieu et à rejoindre notre prochain que s’ils sont vécus dans la vérité et la simplicité. Voici donc venu le moment de renouveler notre pratique de la prière. Ne manquons pas, par exemple, de toujours commencer et achever notre journée par une prière personnelle, de toujours ouvrir et fermer nos assemblées, nos rencontres par la prière. Voici venu le moment, dans nos sociétés de consommation, de recourir au vrai jeûne pour nous orienter vers l’essentiel, ce qui est bâti sur un rocher inébranlable et nous assure le salut. Voici venu le moment, à travers l’aumône, d’ouvrir le cœur à Dieu et au prochain, de prendre soin du pauvre derrière qui se cache le Seigneur (cf. Mt 25, 31-46). Cette année, je voudrais spécialement mettre l’accent sur le partage dans la solidarité. Le partage est un facteur de cohésion : il peut contribuer à réduire les frustrations et à empêcher la convoitise. A la racine de tout désir de marcher ensemble, il y a nécessairement un élan de solidarité et l’une des expressions manifestes de celle-ci est l’entraide. Et surtout, le carême est le moment privilégié pour vivre le partage lequel s’enracine sur le sacrifice du Christ sur la croix, don sans mesure, pour le salut du monde. Ubi caritas et amor, Deus ibi est Le dimanche des Rameaux de cette année pastorale, l’Archidiocèse de Bangui organisera une quête impérée pour la construction du presbytère de la paroisse Saint Laurent de Kouki, dans le diocèse de Bossangoa. Pour nous, il s’agira d’une réelle occasion de marcher ensemble dans le don et la charité. La communion entre les Eglises se manifeste souvent dans les intercessions les unes pour les autres, l’échange réciproque de compétences et d’ouvriers apostoliques mais encore dans des contributions matérielles des unes en faveur des autres. Dans l’histoire du Salut, l’organisation de collectes a toujours soutenu la marche des Eglises particulières ou la réalisation des œuvres du Corps du Christ en général. Dans le Nouveau Testament, nous pouvons relever quelques exemples notables. Dans les Actes des Apôtres (Ac 11, 27-30), éclairés par la prophétie d’un certain Agabus, les disciples d’Antioche, mobilisèrent, chacun selon ses ressources, une contribution pour les frères de la Judée en proie à une grande famine. La collecte fut confiée à Saul et Barnabé. Aux chapitres 8 et 9 de sa seconde épitre aux Corinthiens, Paul nous informe de l’existence au sein des Eglises de Macédoine d’un projet de collecte pour l’assistance des saints. Les « saints » dont parle l’apôtre des Gentils désignent l’Eglise de Jérusalem qui, conformément à la prophétie d’Isaïe (Is 60-61) est appelée à être le creuset de l’unité des Juifs et des païens. Pour encourager les frères et sœurs de Macédoine à concrétiser ce projet, Paul livre un enseignement édifiant sur le partage, enseignement dont nous pouvons nous aussi nous en nourrir. En reprenant une citation du livre des Proverbes, il nous confie que : « Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Co 9, 7 // Pr 22, 8 gr). Joie, amour, foi et liberté sont les caractéristiques d’un partage authentique. Donner sous contrainte, donner avec regret ou mépris, donner sans aimer ne conduit ni à la rencontre de Dieu ni à la fraternité. Le partage qui atteste la solidarité nait de l’amour. Pour nous chrétiens, il repose sur la conviction que nous donnons ce que nous avons gratuitement reçu de Dieu. Il a le pouvoir de nous combler de toutes sortes de grâces nécessaires pour que, disposant toujours et en tout du nécessaire, nous ayons encore du superflu pour toute œuvre bonne (cf. 2 Co 9, 8). Notre don pour l’œuvre de Dieu, par une merveille de sa grâce, se démultiplie chaque fois que nous n’hésitons pas à donner même de notre indigence. Et nous ne manquons jamais de rien (cf. 1 R 17, 8-16 ; Jn 6, 1-15). N’attendons pas d’avoir beaucoup pour donner. Faisons confiance au Seigneur et donnons, donnons le meilleur de nous avec joie et amour. N’attendons pas de tout avoir pour nous mettre à partager. « Qui a Jésus a tout » : nous avons déjà tout et 2 nous risquons de tout perdre si nous ne nous mettons pas à donner. La mobilisation en faveur de la paroisse Saint Laurent de Kouki concerne tout le peuple de Dieu de l’Archidiocèse de Bangui, tous sans exception. Ce n’est pas l’affaire des seuls curés ou des personnes consacrées. Nous ne nous contenterons pas seulement de mobiliser des ressources financières et matérielles pour un diocèse frère. Nous mettons aussi à son service un de nos prêtres. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime » dit Jésus (Jn 15, 13). Il n’y a pas de plus belle expression de solidarité que de donner à une autre Eglise un prêtre quand bien même que chez soi « la moisson est abondante mais les ouvriers peu nombreux » (Lc 10, 2). Notre fils ne sera pas seul. Avec lui, c’est tout l’archidiocèse de Bangui qui va en mission. Le missionnaire n’est jamais seul. Il est toujours accompagné par le Maître de la mission, « Dieu avec nous », qui nous garantit de sa présence jusqu’à la fin des temps (cf. Mt 28, 20). Il est toujours accompagné de sa communauté d’origine qui le porte par la prière et qui le soutient. Nous pouvons nous apercevoir qu’un lien très intime lie le don et la mission. La mission est un don. Elle est aussi une expérience synodale : c’est toute une Eglise, toute une communauté qui se meut, qui se met en marche sous la mouvance du Saint Esprit. Que cet Esprit sème en nous les germes d’une authentique charité. Qu’il creuse en nous le désir de prier et de jeûner comme il se doit. Qu’il accompagne et affermisse notre « marche ensemble » jusqu’à la Pâques. Que Jésus qui s’est fait pauvre et qui, dans sa Passion, nous manifeste l’amour incommensurable du Père, nous enrichisse de sa pauvreté. Que la Sainte Vierge, Notre Dame de l’Oubangui, et Saint Joseph, Patron de l’Eglise, veillent sur notre Eglise et sur notre pays qui s’apprête à vivre un dialogue déterminant. Qu’à leur puissante intercession nous soyons comblés des grâces abondantes du temps de carême, maintenant et pour les siècles des siècles, amen ! Dieudonné Cardinal NZAPALAINGA, C.S.Sp

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