Beaucoup de gens se demandent comment les ancêtres des
mongos se soignaient, vu qu’il n’y avait un dispensaire moderne, ni pharmacie.
La question se pose avec acuité aujourd’hui lorsqu’on voit la résurgence des
maladies qu’on pensait que la médecine moderne allait éradiquer. Le paludisme
revient avec une résistance de plus en plus forte contre les divers médicaments
utilisés.
La réponse est d’une simplicité déconcertante. Les mongos
se soignaient simplement en se nourrissant. En effet, la nature nourricière
fournissait en même temps les médicaments. Les plantes étaient en même temps
source d’alimentation et de soin. La flore qui entourait les mongos était une
vaste pharmacie à laquelle ils recouraient au moindre pépin en cas de maladie.
Il est dommage qu’aujourd’hui les vieux meurent en emportant dans leur tombe
les remèdes immémoriaux que leur ont légués les ancêtres.
Nous donnerons ici un échantillon des plantes que les
mongos utilisaient pour leur soin. Nous donnerons le nom des plantes en mongo,
puis en français si c’est possible, le nom scientifique et enfin la maladie
soignée.
1) Bing-dɔ-ɓēē, bing-ra-ɓēē :
Pourpier, pourpier maraîcher ou porcelane, herbe annuelle (Portulaca oleracea). Pour soigner les déchirures musculaires, les
entorses, les problèmes de peau, on broie l’herbe qu’on met dans l’huile avant
d’en frotter la partie malade. Comme tisane, elle est diurétique et rafraîchissant.
Pour lutter contre le diabète, on broie les feuilles et les tiges qu’on met
dans l’eau pour boire.
2) Bɔɔ-bísə̄ : Plante vivace, à port buissonnant, mesurant de 30
cm à 80 cm de hauteur. (Melissa officinalis).
Cette plante est un bon calmant qui soigne le stress, l’angoisse, l’anxiété.
3) Bote jínə : Malnomée, petite
plante herbacée (Euphorbia hirta). Pour
soigner le lait des jeunes mamans (appelé lait salé), prendre une décoction des
feuilles. La sève de cette plante calme par ailleurs la douleur due à la piqûre
de scorpion. En décoction, la plante a une action antiamibienne,
anti-diarrhéique et antiasthmatique.
4) Ɓɔl-dɔ-díī : Arbre de
savane (Maerua aethiopica) La décoction des feuilles soigne
la constipation et les douleurs d’estomac. La racine macérée soigne la
blennorragie, la syphilis. Pour les œdèmes des testicules, on utilise une
décoction des racines pour une application locale.
5) Ɓɔlɔlɔ : Hoffe, espèce d’igname (Dioscorea
bulbifera, dioscareaceae). Soigne
l’inflammation du sein. Le fruit mûr est pilé et mélangé avec l’argile blanche
pour une application locale. La pulpe séchée soigne les plaies, les blessures,
les furoncles. Soigne les ulcères, les hémorroïdes, La syphilis et la
dysenterie.
6) Dole-namā̰:
Arbre, (Combertum Glutinosum), pour soigner les entorses. L’écorce ou les
feuilles, en décoction, soigne les maux de ventre et la toux et l’hypertension.
Une décoction ou une infusion de feuilles,
d’écorces ou de fruits est très courante, surtout pour soigner les problèmes
urinaires, hépatiques et rénaux, de même que toutes sortes de problèmes
respiratoires, la fièvre, les troubles intestinaux et pour nettoyer les lésions
et les plaies. Les feuilles ou l’écorce broyées ou séchées en poudre servent de
pansement sur les blessures. On verse une décoction de feuilles dans l’eau du
bain ou on la prend en potion en cas de fatigue générale.
7) Dɔ pútə̄
(Dɔ búgə̄): Herbe donnant des fleurs blanches et qui se
mange comme legume (gynadropsis
gynandra). Une fois cette herbe écrasée, le jus qui en sort sert à soigner les
inflammations d’oreilles. Pour traiter les maux d’estomac, les consommer comme
légume cuit. Les racines en décoction soignent les maux d’estomac.
8) Garə́yá: palmier doum (Hyphaena Thebaica). Soigne l’hypertension
(les fruits sont trempés dans l’eau pendant toute une nuit. On boit de cette
eau pendant quelques jours.) Pour le diabète, on prend une décoction de
racines. L’infusion des fruits traite le diabète, les troubles rénaux et la
diarrhée.
9) Gə́rgə́ndə̄: Plante (Asparagus Africanus). Soigne les enfants
incontinents La nuit au lit. Prendre une décoction de ses racines. Les racines
traitent la syphilis, la blennorragie et les autres MST ; on boit une
décoction de racines. On mâche les racines pour les maux de gorge ou on utilise
la décoction pour le gargarisme.
10) Jāngə̄: Savonnier (Balanites aegyptiaca, Zyophyllallaceae). Soigne
l’ictère. Mélanger les feuilles avec de la viande fraiche ou du poulet et les
faire griller avant d’en manger. Les fruits et les amandes broyés sont utilisés
comme laxatifs doux. L’amande a des propriétés vermifuges. L’onction de l’huile
du savonnier est faite pour le rhumatisme. Il est galactagogue (la jeune
maman doit boire le jus extrait du fruit pour que le lait vienne).
Anti-inflammatoire: Presser le jus de fruit ou faire une décoction concentrée
et frotter la partie douloureuse.
11) Jímkītə̄ : Arbuste
épineux à fruit jaune consommé (Ximenia
americana). Soigne la carie dentaire ; les racines sont appliquées sur
les dents cariées. Maux de ventre : boire l’infusion de feuilles.
12) Kāgə̄ mbōgə̄: espèce
d’arbre (Moringa aleifera). Contre la
tension, on mange les grains. La poudre des feuilles soigne l’hypertension, le
diabète, la fatigue, les troubles de mémoire, les douleurs gastrites. Utiliser
les racines, les graines et l’écorce pour les
mycoses, dermatoses, sinusite, migraine.
13) Kám-til : Arbuste feuille
à nombreuses nervures parallèles (Ozoroa
pulcherrina, Anacardiaceae). La
décoction de l’écorce traite la diarrhée et la dysenterie. Elle allège les
douleurs. La décoction de la racine est prise pour les troubles digestives.
14) Kám nda: espèce d’arbre (Guiera senegalensis). Soigne l’ictère. Boire la décoction de
feuilles. Cette décoction soigne les plaies dans la bouche, les furoncles, On utilise également l’infusion des feuilles
pour des bains de bouche pour les maux de dents. La racine réduite en poudre
soigne la diarrhée, la dysenterie et les vers intestinaux. En décoction, les
racines sont prises pour l’insomnie, les hémorroïdes.
15) Kədə̄ ndáng: Arbre de
savanes à feuillages légers (Burkea
Africana). Soigne le rhumatisme. On fait une décoction d’écorce que le
malade boit et se lave avec pendant 3 jours. L’écorce soigne la fièvre, la
toux, la gingivite. L’écorce réduite en poudre est utilisée pour soigner en
externe les ulcères et les blessures. La racine soigne les maux d’estomac, les
abcès, l’épilepsie, la dysenterie et le maux de dents. En infusion, les
feuilles soignent la fièvre, l’épilepsie et la conjonctivite.
16) Kūnə̄: « Kapokier », fromager (Ceiba pentandra). Pour soigner la toux,
on boit une décoction de son écorce. Pour la diarrhée, prendre une décoction de
racines. Le kapok est une plante astringente diurétique qui réduit la fièvre,
détend les spasmes et contrôle les saignements.
17) Kūnjə́ dɔ ndogə̄: « Liane
merveille », momordique, margose, (Momordica
charantia, Cucurbit). La Momordica Charantia aide à lutter
contre le diabète. Elle aide à lutter contre les infections
parasitaires, virales et de de microbes. Les feuilles infusées et appliquées
sur la peau peuvent apaiser les démangeaisons cutanées.
18 Món̄g: Arbuste de savane
à feuilles bilobées et au goût acide (Piliostigma thonningiis, Caesalpiniaceae).
Pour les bébés, on leur fait boire une décoction de leurs feuilles. L’infusion
des feuilles et de l’écorce se prend contre le paludisme. Des préparations de racines
s’appliquent sur les blessures et les ulcères pour arrêter l’hémorragie et pour
favoriser la cicatrisation. Il a des vertus diurétiques et soigne la diarrhée, la
dysenterie, vers et autres problèmes intestinaux. On prépare aussi des remèdes
contre la toux à partir des racines.
19) Múrkūtū: arbuste de
savane à fruits arrondis et applatis (Detarium
microcarpum, Caesalpiniaceae). Pour soigner l’hypertension artérielle, on
mange de ses fruits. On applique l’écorce ou les feuilles fraiches sur les
blessures. En infusion ou en décoction, les feuilles et les écorces soignent le
rhumatisme, les problèmes urinaires, les maux d’estomac, les vers intestinaux,
la dysenterie. L’écorce, réduite en poudre et bouillie soigne les maux de tête,
de gorge, les douleurs du dos, les règles douloureuses.
20) Ŕɔ̄mḛ̄ : arbuste de la savane (Cumbertum collinum)
soigne les bébés qui ont une inflamation de la région anale. Les fruits sont
bouillis et on leur fait un lavement avec le liquide. Pour traiter les pertes
blanches, on ramasse les jeunes feuilles qu’on pile avec le néré (ndi) et le
sel indigène. Cela sert à préparer la sauce longue que la malade mange tôt le
matin. Elle ne doit plus rien manger jusqu’à la mi-journée.
Les mongo utilisaient ces plantes seules ou en association
et le résultat était satisfaisant. La bonne connaissance des plantes peut
soigner et pour la plupart du temps sans effets secondaires. La meilleure
manière d’utiliser ces plantes est de s’approcher de ceux qui les connaissent
et les utilisent pour les soins. Cela ne signifie pas qu’il faut désormais
abandonner la médecine moderne. L’idéal serait que des pharmaciens étudient les
plantes connues pour en retirer les principes actifs et les mettre à la
disposition d’un plus grand public.
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