Le
Verbe s’est fait chair et il a « dialogué » avec les hommes !
Frères et sœurs dans le
Christ,
Et vous, hommes et femmes
de bonne volonté,
Que la paix et la grâce
de Dieu vous soient données en abondance de la part de notre Seigneur
Jésus-Christ !
Aujourd’hui notre Sauveur
est né ! La sainte liturgie nous offre à contempler et à célébrer le
mystère de la Nativité à travers plusieurs textes de la Sainte Ecriture. En
lien avec le thème de l’année pastorale 2018-2019 de l’Archidiocèse de Bangui,
j’ai fait le choix de méditer le Prologue de l’évangile selon saint Jean que
nous lisons à la messe du jour.
Le
Verbe de Dieu
Le prologue de Jean nous révèle l’importance de la Parole de
Dieu, qui est déjà perçue dès la première page du livre de la Genèse :
« Au commencement, Dieu a tout créé par sa Parole » (cf. Gn 1, 1-33).
La parole de Dieu est créatrice. L’évangéliste Jean affirme que ce «
Verbe était auprès de Dieu, il était Dieu ». Ce n’était pas une existence
séparée, mais il participait à la divinité de son Père. Dieu et son Fils sont
toujours ensemble dès le commencement du monde et les deux se communiquent.
L’expression « auprès de Dieu » nous révèle que le Verbe est toujours
avec Dieu et il est dialogue avec les hommes. Dès cette terre, nous sommes
invités à vivre en communion avec Dieu. Le Verbe donne à ceux qui l’accueillent
de devenir « enfants de Dieu ». C’est pourquoi, Dieu nous a envoyé
son propre Fils, son Verbe « venu dans notre monde » pour
communiquer avec les hommes afin que ces derniers découvrent la grandeur de son
amour.
L’initiative de Dieu
Dieu ne se fatigue pas de
communiquer avec les hommes. Dans le passé, Il a parlé par les prophètes. La
lettre aux Hébreux le dit clairement : « Après avoir, à maintes
reprises et sous maintes formes parlé jadis aux Pères par les prophètes, Dieu
en ces jours, nous a parlé par son Fils » (He 1, 1). Désormais le Fils de
Dieu vient dresser sa tente au milieu des hommes. Tel est le mystère de
l’Incarnation. Dieu se fait proche de nous. Est-il aussi proche de nous en
Centrafrique ?
Au regard des nombreux
évènements douloureux qui ont marqué l’histoire de notre pays à savoir les
pillages, les incendies, les maladies, les morts nous pouvons croire, en
jugeant selon la chair, que Dieu n’est plus parmi nous, qu’il semble s’éloigner
de notre terre centrafricaine. Mais, aujourd’hui, une bonne nouvelle nous est
annoncée : « Et le Verbe s'est
fait chair et il a habité parmi nous, et nous avons contemplé sa gloire, gloire
qu'il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité »
(Jn 1, 14). Le Verbe de Dieu vient encore aujourd’hui
dans le monde et plus particulièrement dans notre pays. Dieu se fait présent en
son Fils, Il communique par Lui. En
Jn 5, 43, Jésus le dit : « Je viens au nom de mon Père ».
L’amour infini de Dieu
Frères et sœurs,
La Nuit de Noël révèle
l’amour incommensurable de Dieu. Dieu ne vient pas habiter dans la
tranquillité, dans la sécurité mais dans un environnement à hauts risques. La
nuit de Noël avec tous les risques et périls pour les bergers et leurs
troupeaux, c’est dans ce lieu où le Verbe de Dieu s’est fait chair. Il est né
dans une mangeoire autour de laquelle peuvent être des loups, des bêtes féroces
qui rodent, cherchent quoi dévorer tout comme
« le lion qui rugit, va et vient à la recherche de sa proie »
(1 P 5, 8). Cette zone à risque pour les bergers et leur troupeau devient aussi
une zone à risque pour l’enfant Jésus, Marie et Joseph ; plus large, une
zone à risques pour Jésus le Bon Berger et nous, son troupeau. Aujourd’hui
encore le Verbe de Dieu risque sa vie pour venir habiter chez nous, dans notre
pays marqué par une grande insécurité, tant de violence et de tuerie. Tel est
le mystère de l’incarnation, Tel est l’amour infini de Dieu pour nous
aujourd’hui dans ce pays la RCA. Tel est le mystère de Dieu ! Qui peut
connaître la pensée de Dieu ? En la personne de Jésus, Dieu lui-même prend
l’initiative de venir communiquer sa pensée, sa volonté à toute l’humanité.
Jésus en témoigne dans l’évangile de Jean : « Je dis ce que le Père
m’a enseigné » (Jn 8, 28). Jésus reste fidèle à la parole de Dieu qui est
vérité et qui donne vie. Ainsi, nous sommes appelés à communiquer la parole de
vérité et non de mensonge, la parole de vie et non la parole de mort.
L’incarnation, véritable
chemin de dialogue
Le mystère de
l’Incarnation vient éclairer, irriguer notre pratique du dialogue œcuménique et
interreligieux en cette année pastorale 2018-2019. Dans quel sens ? Le
Verbe de Dieu suit un itinéraire en trois étapes :
D’abord, la démarche de l’abaissement : Dieu par son
Fils vient à la rencontre de l’homme. «
Lui qui est de condition divine n’a pas considéré comme une proie à saisir
d’être l’égal de Dieu. Mais il s’est dépouillé, prenant la condition de
serviteur, devenant semblable aux hommes, et par son aspect il était reconnu
comme un homme ; il s’est abaissé… » (Ph 2, 6-8). La première étape du
dialogue, c’est l’humilité, Dieu se
fait tout petit dans une crèche pour venir rencontrer l’humanité. Pour
dialoguer, il faut aller à la rencontre
de l’autre, se dépouiller de son propre orgueil, de sa grandeur. Dans le
dialogue, on se fait petit. Aujourd’hui, Jésus, Verbe de Dieu nous sert
d’exemple. Or de nos jours, chacun veut imposer ses idées, ses forces et n’est
pas prêt à s’humilier comme Dieu l’a fait.
Ensuite, en Jésus Dieu se
fait semblable à nous et épouse le langage humain afin de communiquer avec
l’humanité sans ambigüité. Pour bien dialoguer, il faut se comprendre dans le
même langage. Le Verbe de Dieu vient créer le lien entre Dieu et l’être humain.
La conception biblique de l’homme est dialogale, dès sa création, il entre en
dialogue avec son Créateur, un dialogue qui exprime l’alliance scellée par Dieu
avec son peuple.
Jésus nous trace une
autre pédagogie du dialogue qui consiste à créer, tisser le lien entre nos
frères d’autres confessions religieuses et entre nous-mêmes. Célébrer l’incarnation
de Jésus revient à créer ce lien entre nous. Noël, c’est la fête en famille.
Sommes-nous des agents de communication et de création de tissu social dans nos
familles, nos communautés chrétiennes et religieuses, nos mouvements,
fraternités et groupes de prières et encore avec les frères et sœurs des autres
confessions religieuses ? Pouvons-nous célébrer l’incarnation du Verbe comme
source de tout lien en étant des vecteurs de discorde, de désunion dans le
couple, dans la société ou dans l’Eglise ?
Rappelons-nous que nous
sommes créés par cette Parole de Dieu, nous sommes l’image de Dieu, ainsi
devons-nous apprendre les voies de faire la paix et l’unité.
Enfin ce dialogue
débouche sur la lumière (Jn 1, 4-5) ; il arrive à quelque chose de bien,
de beau, de lumineux. Comme le dit l’Apocalypse : « Les serviteurs verront
son visage, la nuit n’existera plus, ils n’auront plus besoin de la
lumière d’une lampe ni de la lumière du soleil, parce que le Seigneur Dieu les
illuminera. » (Ap 22, 4-5). Grâce à cette lumière nous verrons le vrai
visage de nos frères et de nos sœurs. À la suite de Jésus Verbe de Dieu, une
fois franchi ces trois étapes du dialogue, nous voyons clair, la lumière qu’est
Jésus dissipe toutes nos pensées ténébreuses, nos a priori, nos préjugés envers
les autres. Ainsi, toutes les barrières préconçues, les préjugés tombent et
nous pouvons voir les autres avec les yeux de Dieu.
Le refus d’accueillir le
Verbe de Dieu
Frères et sœurs,
Malgré l’initiative et la
démarche de Dieu dans l’humilité, certains hommes refusent totalement
d’accueillir le Verbe de Dieu. « Il est venu chez les siens et les siens
ne l’ont pas reçu. » (Jn 1, 11) « La lumière a brillé dans les
ténèbres et les ténèbres ne l’ont point comprise. » (Jn 1, 5) Il est impossible
que la lumière et les ténèbres résident ensemble. Le Verbe a paru au milieu des
hommes remplis de ténèbres, et il a paru comme éclatante lumière, mais ceux qui
étaient ténèbres, et voulaient conserver les ténèbres, ne pouvaient pas
recevoir la lumière divine du Verbe, qui ne peut que remplacer les ténèbres et
jamais demeurer avec elles. Voilà pourquoi ces hommes qui étaient ténèbres,
n’ont pas saisi, embrassé, compris cette lumière. Ils ont fermé leur cœur à la
lumière et les grâces divines n’y pénètrent pas ou sont rejetées, et ils
restent dans l’obscurité.
La contrevaleur de la
Parole de Dieu
Le prologue de Jean nous
montre les bienfaits du Verbe de Dieu. Hélas, souvent nous sommes loin de vivre
cette Parole créatrice et constructive. Pour la plupart, nous usons plutôt
d’une parole destructrice. Notre parole ment, calomnie, détruit, tue. Comme le
dit Saint Jacques « notre langue est un feu… elle enflamme le cycle de la
création » (Jc 3,6). Combien de nos frères et sœurs ont perdu leur
renommée, leur réputation, combien souffrent dans leur corps et leur âme
jusqu’à perdre même leur vie à cause de notre parole de méchanceté, de jalousie
et de haine ? Les réseaux sociaux deviennent ce lieu par excellence où, au lieu
de communiquer une parole de vérité, d’unité et de paix, on communique le
mensonge, on attise la haine, la violence, le dénigrement de la dignité
humaine, les fausses valeurs. Nos réseaux sociaux, notre monde ont encore tant
besoin de purification, c’est pourquoi, dans la première lecture de la messe du
jour, Dieu nous invite, par la voix du prophète Isaïe, à être de vrais
messagers qui annoncent les bonnes nouvelles, le salut et la paix. Telle est la
finalité de notre dialogue. Notre véritable dialogue avec nos frères et nos
sœurs ne peut que déboucher sur la paix, la bonne entente, le salut de chacun
de nos frères et sœurs. Ainsi, tous ensemble nous pouvons voir le salut de
notre Dieu (Is 52, 10).
Que Notre Dame de
l’Oubangui, Mère du Verbe incarné purifie notre langage et nous porte vers
l’unité et la paix, dans notre pays, nos familles, nos mouvements et
fraternités et nos lieux de travail. Amen !
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