vendredi 17 mars 2017

Il y a 43 ans, témoignage de sœur Tinodji (par Sr Cécile Tinodji Nelembay)

            (Il y a 43 ans, le 19 octobre 1974, la sœur Cécile Tinodji Nelembay prononçait ses vœux perpétuels dans la congrégation des sœurs Notre Dame des apôtres dans la cathédrale de Sarh. Elle a pris la parole au cours de la cérémonie. Nous donnons ici l’intégralité de son intervention afin que les jeunes puissent en prendre connaissance. Nous le tirons de la revue « Chrétiens au Tchad aujourdhui », n°5, premier trimestre 1975, pp 3-4. Cela est tiré d’un article de Souk Allag Ouaina.)
            Mes chers frères, sœurs et amis,
            Je vous remercie d’être venus nombreux aujourd’hui pour prier avec moi et partager ma joie. Ce jour pour moi a été vraiment attendu.
            Je voudrais vous dire en quelques mots comment j’ai entendu l’appel du Seigneur et j’y ai répondu, car souvent on se pose la question.
            Au cours d’une réunion de jeunes Cœurs-Vaillants et Ames-Vaillantes, à Bongor, la Sœur nous montrait des photos, des images de tous les pays dans le journal « KISITO ». C’était pour nous montrer qu’on pouvait se mette au service des autres. Sur une photo, il y avait des femmes habillées en blanc qui soignaient les malades. La sœur nous expliquait que ces femmes étaient des religieuses, elles ne se marient pas, elles ne mettent pas d’enfants au monde. Elles ont choisi de servir Dieu en soignant les malades, en enseignant les enfants, en était la sœur de tous.
            Après, je lui ai posé la question : « Est-ce possible que je devienne comme elles, pour soigner mes frères ? » Elle m’a répondu : « Oui, bien sûr ».
            C’est à partir de ce jour que j’ai senti l’appel de Dieu. Dieu s’est servi de ces photos pour m’appeler.
            Depuis ce jour, j’ai cheminé jusqu’ici. Mais pour en arriver là, ça n’a pas été toujours facile. J’ai rencontré des difficultés de toutes sortes.
            D’abord avec mes parents qui n’admettaient pas que je me fasse religieuse, car ils voulaient avoir de moi la dot et les enfants. Mon père étant mort, ma mère attendait de moi une aide matérielle, étant la dernière des filles, elle voulait me garder auprès d’elle.
            Difficultés avec mes frères africains qui, bien souvent, ne comprennent pas toujours notre vie religieuse. Ils disent que le Tchad est grand : donc il faut se marier et avoir beaucoup d’enfants pour le peupler. Ils disent encore que nous perdons notre temps au couvent (maison des sœurs) et ne croient pas à notre chasteté. Nos frères ne comprennent pas la nécessité de notre célibat dans la vie religieuse. D’autres nous demandent des vêtements, de l’argent, des livres, et quand nous leur disons que nous n’en avons pas pour leur donner, ils ne l’admettent pas et disent que nous sommes trop avares. Ils nous traitent comme des fonctionnaires qui gagnent beaucoup d’argent.
            Il y a aussi des difficultés du point de vue communautaire : nos façons à nous, africaines, de voir, d’agir et de faire ne sont pas toujours comprises par nos sœurs européennes, et inversement nous ne comprenons pas leurs manières de faire ; ce qui crée des tensions entre nous.
            Voici quelques difficultés que nous rencontrons et que j’ai moi-même rencontrées. Croyez-moi, cela n’est pas facile, mais malgré tout je ne me suis pas découragée totalement, car je me dis que dans n’importe quelle vie, je trouverai des difficultés sur d’autres plans.
            Dans toutes ces difficultés, je priais toujours la Vierge Marie, et je peux dire qu’elle m’a toujours soutenue jusqu’à présent. Quelques rares amis que j’ai rencontrés m’ont aidé à continuer, aussi bien dans ma communauté qu’au village.

            L’engagement définitif que je fais aujourd’hui ne veut pas dire que ces difficultés sont terminées, mais que j’accepte d’avance de dépasser toutes celles qui sont à venir ; et cela, je ne peux le faire seule, c’est pourquoi je demande l’aide de mes sœurs et frères pour être fidèle.

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