samedi 12 novembre 2022

TCHAD : Vers un changement de paradigme social ? (par Pascal Djimoguinan)



            Depuis les indépendances, le Tchad est en gestation sur le plan sociétal. Comment passer d’une organisation traditionnelle et rurale à une vie urbaine. Il suffit d’examiner la vie sociale pour voir comment il y a une oscillation entre la ville et le village.

            Pendant la colonisation et aux indépendances, dans la constitution des villes dites « modernes », les populations n’avaient pour images que celles de leurs villages qu’ils venaient de quitter. Alors, il fallait tout simplement reconstituer l’univers du village dans la ville.

            Dans cette reconstitution du village, les quartiers se peuplaient selon les affinités ethniques et culturelles. Ainsi à Fort-Lamy (puis N’Djamena), on pouvait avoir dans sa partie sud, les quartiers Sara Moursal, Nonsané, Dembé, Kamnda, etc ; dans la partie nord de la ville, on a Char abayin, Klemat, Mardjan daffack, Ambassana, Djambal Barh, etc…

            En même temps que les populations se regroupaient par affinité, les besoins de la vie moderne les rattrapaient tous dans le centre moderne de la ville où il y avait les bureaux de l’administration ainsi que le quartier administratif. Petits fonctionnaires et domestiques sortaient de leurs quartiers « indigènes » le matin pour aller travailler au centre de la ville ; mais, le soir, tout le monde se retrouvait dans son milieu indigène où on ne pouvait éprouver aucune nostalgie puisque tout était calqué sur le village.

            Ainsi, les funérailles, les mariages et les différentes festivités étaient célébrés de la même façon que dans les villages. L’homme Tchadien se revêtait le matin de sa veste moderne pour se rendre dans le quartier administratif mais dès l’après-midi, il retrouvait sa peau naturelle dans son milieu en regagnant son quartier.

            Une manière particulière de socialiser au village, était de se retrouver en groupe devant des calebasses de boissons locales. Au village, cela se faisait les jours de marché, aux célébrations des funérailles et des récoltes. Autrement, les hommes se retrouvaient sous les arbres du village où ils passaient le temps ensemble.

            Avec la vie moderne, il y aura un glissement qui se fera. Comme les exigences du travail étaient telles que le repos n’avait lieu que pendant le week-end, la population des villes, ne pouvant plus se regrouper sous les arbres « pour passer le temps », a pris l’habitude de se regrouper, soit dans les cabarets, soit dans les bars, selon les moyens financiers dont on disposait.

            La question qui se pose, et cela concerne les différentes villes du Tchad, est de savoir si cette manière de « passer le temps » est constructive, aussi bien sur le plan intellectuel que sur le plan économique.

            Ne faut-il pas un changement de paradigme dans nos villes ? Comment créer des plateformes de réflexions et d’actions, autres que les débits de boissons ? Il s’agit désormais de devenir des acteurs du développement à tout point de vue. Le défi se situe à ce niveau et la réflexion est ouverte.




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