Depuis les indépendances, le Tchad est en gestation sur
le plan sociétal. Comment passer d’une organisation traditionnelle et rurale à
une vie urbaine. Il suffit d’examiner la vie sociale pour voir comment il y a
une oscillation entre la ville et le village.
Pendant la colonisation et aux indépendances, dans la
constitution des villes dites « modernes », les populations n’avaient
pour images que celles de leurs villages qu’ils venaient de quitter. Alors, il
fallait tout simplement reconstituer l’univers du village dans la ville.
Dans cette reconstitution du village, les quartiers se peuplaient
selon les affinités ethniques et culturelles. Ainsi à Fort-Lamy (puis N’Djamena),
on pouvait avoir dans sa partie sud, les quartiers Sara Moursal, Nonsané, Dembé,
Kamnda, etc ; dans la partie nord de la ville, on a Char abayin, Klemat,
Mardjan daffack, Ambassana, Djambal Barh, etc…
En même temps que les populations se regroupaient par
affinité, les besoins de la vie moderne les rattrapaient tous dans le centre
moderne de la ville où il y avait les bureaux de l’administration ainsi que le
quartier administratif. Petits fonctionnaires et domestiques sortaient de leurs
quartiers « indigènes » le matin pour aller travailler au centre de
la ville ; mais, le soir, tout le monde se retrouvait dans son milieu
indigène où on ne pouvait éprouver aucune nostalgie puisque tout était calqué
sur le village.
Ainsi, les funérailles, les mariages et les différentes
festivités étaient célébrés de la même façon que dans les villages. L’homme
Tchadien se revêtait le matin de sa veste moderne pour se rendre dans le
quartier administratif mais dès l’après-midi, il retrouvait sa peau naturelle
dans son milieu en regagnant son quartier.
Une manière particulière de socialiser au village, était
de se retrouver en groupe devant des calebasses de boissons locales. Au
village, cela se faisait les jours de marché, aux célébrations des funérailles
et des récoltes. Autrement, les hommes se retrouvaient sous les arbres du
village où ils passaient le temps ensemble.
Avec la vie moderne, il y aura un glissement qui se fera.
Comme les exigences du travail étaient telles que le repos n’avait lieu que
pendant le week-end, la population des villes, ne pouvant plus se regrouper
sous les arbres « pour passer le temps », a pris l’habitude de se
regrouper, soit dans les cabarets, soit dans les bars, selon les moyens
financiers dont on disposait.
La question qui se pose, et cela concerne les différentes
villes du Tchad, est de savoir si cette manière de « passer le temps »
est constructive, aussi bien sur le plan intellectuel que sur le plan
économique.
Ne faut-il pas un changement de paradigme dans nos villes ?
Comment créer des plateformes de réflexions et d’actions, autres que les débits
de boissons ? Il s’agit désormais de devenir des acteurs du développement
à tout point de vue. Le défi se situe à ce niveau et la réflexion est ouverte.
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