Les chasseurs pêcheurs savent bien ce qu’est un leurre. C’est un artifice qu’ils utilisent pour cacher le piège qu’ils tendent. Ainsi au sens figuré, le leurre est ce qu’utilisent tous les vendeurs d’illusions pour attirer et tromper. C’est en ce sens que porte notre interrogation par rapport au Dialogue National Inclusif.
Au lendemain de la mort du président Deby, la question
était de savoir comment allait se passer la succession. Les perspectives n’étaient
pas très reluisantes pour la junte qui se préparait à prendre le pouvoir. Comment
faire passer la chose tant sur le plan national que sur le plan international ?
Le président français Emmanuel Macron s’est servi d’un
miroir aux alouettes pour adouber son filleul. L’Union Africaine a répercuté l’illusion.
L’étonnement a été tellement grande que tout s’est passé comme une lettre à la
poste. Alors que partout en Afrique, les putschs étaient condamnés, celui du
Tchad, dès les fons baptismaux, a reçu la bénédiction des institutions internationales
avec pour cadeau, un délai de dix huit mois pour la transition.
Pour dorer la pilule, il y a eu tout une mise en scène,
dont nous ferons l’économie de détails, pour montrer que la succession n’était
pas possible sur le plan constitutionnel (le président de l’assemblée nationale,
qui aurait dû accéder à la magistrature suprême en cas de vacance du pouvoir, n’était
pas disponible pour des raisons médicales. Cela ne l’empêchera pas d’ailleurs à
prendre la tête de son parti politique).
L’acte 1 du scenario a été joué avec brio et c’est le
peuple tchadien qui est le dindon de la farce.
Un problème va bientôt s’élever. Le temps ne triche pas.
On ne peut pas le tromper. Il n’y a qu’en poésie où l’on peut demander au temps
de suspendre son vol. Les dix-huit mois de la transition se sont égrenés avec
la précision d’une minuterie qui ne dépend pas d’une volonté humaine. Le cycle
des saisons, ayant toujours été un mystère pour l’homme qui n’a aucun pouvoir
sur lui. Il fallait donc que se joue l’acte 2.
Tel un magicien en mal du sensationnel, le Président du
Conseil militaire de transition (PCMT) sortira de son chapeau le Dialogue
National, comme moyen idéal pour préparer les élections démocratiques et redonner
le pouvoir aux civils.
Sur le papier, cela se présente bien. Mais comment
préparer les élections ? Quelle sera l’équipe en place pour le faire ?
C’est ici qu’il y a un quiproquo savamment entretenu par
le pouvoir en place. Si pour la société civile et les partis de l’opposition, ce
dialogue a pour but de tracer une voie précise vers une passation de pouvoir
aux civils avec le retrait de la junte militaire, pour le parti du défunt président
(Mouvement Patriotique du Salut -MPS-) et pour les militaires, ce dialogue ne
doit être qu’un prétexte pour prolonger la transition en vue de préparer les élections.
Ainsi, tout est mis en œuvre pour que le fameux dialogue ne devienne en fait qu’une
partition jouée par un autiste emmuré dans un donjon.
Les conditions posées par les acteurs majeurs de la vie
militaro-politique n’ont pas été acceptées par le pouvoir. Beaucoup de
participants au Dialogue National inclusif se sont retirés parce qu’ils se sont
rendus compte que les conditions n’étaient pas réunies pour un véritable
dialogue.
Pendant
que cette grande messe qui ressemble à une mascarade a lieu, un massacre à
grande échelle, rappelant les heures sombres du Darfour soudanais, se perpétue
dans le Lac Iro.
Montem
peperit murem. On ne
sera pas surpris que les conclusions du Dialogue National demandent une
prolongation de la transition. Too much ado about nothing. Tout ce qui a été organisé n’avait pour
but que d’amuser la galerie. On prend les mêmes et on contenue. La parturiente
a accouché, qu’importe le nourrisson, même si ce n’est qu’une souris. Le but
recherché aura été trouvé. L’heure des patriotes n’a pas encore sonné. Ils n’auront
que leurs yeux pour pleurer.
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