vendredi 23 septembre 2022

TCHAD : Déclaration de l'évêque de Sarh sur la situation du pays (par Pascal Djimoguinan)

            Chers auditeurs et auditrices de Radio Lotiko, Bonjour !

Je suis de retour à Sarh après une période de deux mois en dehors du diocèse ; d’abord en Guinée Equatoriale pour une rencontre des évêques de notre sous-région, l’ACERAC, ensuite, à Fatima où j’ai prié la Vierge Marie, apparue en ce lieu, et en Espagne où j’ai fait mon bilan de santé. Dieu merci, ma santé est en général bonne, malgré un problème lombaire qui me handicape un peu, mais qui ne m’empêche pas d’exercer mon ministère de pasteur de cette église.

            Depuis mon arrivée à N’Djamena le 9 septembre, je me suis retrouvé avec une situation assez difficile dans notre pays. D’abord les assises du Dialogue National Inclusif et Souverain que nous croyions tous, qu’il serait l’opportunité pour parler, des maux qui minent notre pays, sincèrement, et pour chercher ensemble de nouvelles bases pour la fondation d’un Tchad nouveau dont nous rêvons tous.

            L’Eglise Catholique au Tchad, fait partie de ce pays, et nous ne pouvions pas rester en dehors de ces assises, à regarder les autres faire. Pour cela, plusieurs évêques, prêtres et laïcs, ont pris part, pendant plusieurs semaines, à ces assises. Ais vue le manque d’un vrai dialogue inclusif, les évêques ont décidé de se retirer, tout en continuant à prier et à œuvrer pour que, dans notre pays, nous puissions arriver un jour, à vivre ensemble dans un pays où règnent l’égalité, la vérité, la justice et la paix, selon le modèle du Royaume de Dieu.

            Ensuite, j’ai trouvé une situation grave, qui prévaut dans beaucoup de zones de notre pays, en particulier aussi dans nos deux provinces du Moyen-Chari et du Mandoul. Je veux parler des inondations, qui ont détruit une bonne partie de nos récoltes, ce qui signifie qu’une partie de la population de notre diocèse va être confrontée à une période de famine. Espérons que l’Etat et les organismes internationaux nous viendront en aide. Je compatis avec toute cette population affectée par ce phénomène, et je prie Dieu afin que nous puissions trouver la manière de faire, face à cette situation.

            Quelques jours après mon arrivée à Sarh, un événement très grave s’est produit dans le département du Lac Iro. Le pasteur que je suis ne peut pas être loin des brebis qui souffrent ; alors je suis allé ce dimanche à Kyabé. Comme la situation n’était pas calme, je n’ai pas pu aller au-delà de Kyabé. Mais, là-bas, j’ai pu entendre des témoignages directs de ce qui s’est passé. Une fois de plus, le sang a été versé sur notre terre. Une fois de plus, des innocents sont morts par la méchanceté de certaines personnes armées des armes de feu, ou blessées. Une fois de plus, il y a eu dévastation des champs des cultivateurs, ce qui va s’ajouter encore à la famine provoquée par les inondations. Une fois de plus, il y a eu destruction de biens d’une population qui vit déjà dans la pauvreté.

Dieu entend les cris du malheureux et il fera un jour justice, soyez en sûrs.

En attendant, c’est l’autorité de l’Etat qui doit agir. Pour cela, une fois de plus encore, je lance un appel à ceux qui détiennent l’autorité dans notre pays et dans notre province, les autorités administratives et judiciaires en particulier. Je leur demande de dire la vérité sur ce qui s’est passé, et pour cela, il faudra continuer les investigations et interroger les uns et les autres, avec du respect pour les personnes et pour la vérité ; vérité qui ne doit pas être cachée ni manipulée.

En plus de cet appel à la vérité, je lance un appel à la justice. Sans justice, nous ne pourrons jamais arriver à la paix. Nous sommes assoiffés de justice et nous clamons vers Dieu pour qu’il touche le cœur de ceux qui sont établis pour rendre justice au peuple.

Au moins depuis 2019, et les premiers événements de Sandana, nous attendons cette justice. Malheureusement, il y a beaucoup de gens qui sont habités par des forces diaboliques et qui ne veulent pas que les choses changent et que justice soit faite.

Finalement, je lance un appel à la solidarité vis-à-vis des gens qui souffrent, qui ont perdu des parents et des biens matériels. Cet appel va à l’encontre des autorités, mais aussi de nous tous, personnes concrètes, communautés, organismes nationaux et internationaux.

Je profite aussi pour présenter mes condoléances aux familles endeuillées et ma compassion aux blessés, en priant Dieu pour qu’ils retrouvent vite la santé, et les autres, la paix au ciel. Et je vous demande de prier tous pour que nos familles et nos villages retrouvent aussi vite que possible le calme et la vie normale.

Que le Dieu de la paix vous bénisse tous.

Monseigneur Miguel Angel Sebastien

Evêque de Sarh.

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