Peter Albert David Singer est un philosophe et homme
politique australien (il s’est présenté sans succès au Sénat australien comme
candidat vert) né le 6 juillet 1946. Il est surtout connu pour ses positions
sur des questions de bioéthique qui ont suscité la controverse dans beaucoup de
pays.
On peut mieux entrer dans la pensée de Singer par deux
livres, Animal Liberation (1975) et Rethinking
Life and Death : The Collapse of Our Traditional Ethics.
Dans Animal
Liberation (La Libération Animale),
Singer s’élève contre ce qu’on appelle le spécisme. Il rejette la
discrimination entre les êtres, uniquement en se basant sur l’espèce, en
accordant la priorité à l’espèce humaine.
Selon Singer, tous les êtres sensibles (capables d’éprouver
le plaisir ou de souffrir) doivent être considéré comme moralement égaux et
traités de cette façon. Cela dit, il est injustifié d’utiliser des animaux pour
se nourrir car cela entraîne une souffrance disproportionnée par rapport aux
bienfaits que les êtres humains tirent de cette consommation. Une obligation
morale découle de cela : il est obligatoire de ne pas manger la chair des
animaux (végétarisme) et même des produits ou service issus des animaux ou de
leur exploitation (véganisme).
De cette pensée, Singer va tirer des conséquences
éthiques qui sortent de l’ordinaire :
La première conséquence porte sur l’avortement. Tout part
donc des préférences liées à la capacité de ressentir du plaisir ou de la
douleur. De là on parvient à un calcul utilitariste. Puisque un fœtus de 18
semaines n’a pas, selon Singer, la capacité de ressentir la douleur ou du
plaisir, il n’y a donc rien contre la préférence de la femme qui veut avorter ;
ainsi, l’avortement serait moralement permis.
La deuxième conséquence concerne l’infanticide. Pour
Singer, les nouveau-nés ne sont pas encore des personnes car ils ne possèdent
pas les caractéristiques essentielles d’une personne à savoir, la rationalité,
l’autonomie et la conscience de soi. Ainsi, le meurtre d’un nouveau-né ne
serait pas aussi grave que celui d’une personne.
Dans le second ouvrage Rethinking Life and Death : The Collapse of Our Traditional Ethics,
Singer essaie d’explorer les voies et les contradictions ouvertes par les
progrès de la médecine. Il s’agit ici d’aborder la valeur de la vie humaine et
de l’éthique de la qualité de vie.
Que pense Peter Singer du meurtre ? Est-ce un mal de
tuer ?
Singer
part de la conception traditionnelle de la vie comme sacrée. Il se demande si
la vie est sacrée en elle-même. Si tel en est le cas, il serait aussi odieux de
tuer un cochon, d’arracher un chou que de tuer un être humain. Or le problème
qui se pose est que quand nous disant que la vie est sacrée, nous ne pensons qu’à
la vie humaine. Singer demande alors pourquoi la vie humaine serait différente
des autres.
Dans
ses considérations, Singer s’étonne du débat pour maintenir en vie un homme qui
ne mène plus qu’une « vie végétarienne » alors qu’on tue les chiens
errants, on utilise des singes pour des expériences, on tue le bétail. Pourquoi
cette différence, se demande Singer ?
Singer
fait recours aux interdits, notamment de tuer dans les sociétés. Cela se fait
en vue de se protéger mais avec des nuances :
- Sociétés tribales :
le crime c’est tuer quelqu’un de la tribu
- Dans les Etats plus
développés, sont protégés ceux qui se trouve à l’intérieur de la frontière nationale
- Aujourd’hui on estime que
c’est mal de tuer quelles que soient la race, la religion, la classe sociale,
nationale, des êtres humains sauf quelques exceptions (auto-défense, guerre,
peine capitale, etc.)
A partir de cette morale partiale, liée à une tribu, une
société, Singer se demande pourquoi la morale ne serait liée qu’à l’appartenance
à notre espèce. Cela l’amène à chercher la définition de vie humaine et être
humain.
Si l’on définit l’être humain par membre de l’espèce homo
sapiens, les conséquences ne sont pas les mêmes que quand on le définit par une
liste des indicateurs d’humanité dont la conscience et le contrôle de soi, le
sens du futur et du passé, la capacité d’entrer en relation avec les autres, de
se préoccuper des autres, la communication et la curiosité.
Dans la première définition l’embryon, le fœtus, l’enfant
handicapé mental, le nouveau-né sont acceptés comme être humain puisque faisant
partie de l’espèce homo sapiens. Dans le deuxième cas cela ne serait pas le
cas. Pour lever toute ambiguïté, Singer propose d’utiliser pour le premier cas,
le terme de l’espèce homo sapiens et pour le deuxième, de parler de personne.
Pour Singer c’est à tort qu’on emploie le mot personne
comme étant la même chose qu’être humain. Il fait donc un parcours historique
du terme personne pour s’arrêter à John Locke : Personne est un être pensant et intelligent, capable de raison et de
réflexion, et qui peut se consulter soi-même comme le même, comme une même
chose qui pense en différents temps et en différents lieux.
A partir d’ici, il est plus facile de voir où pointe la
réflexion de Singer. Nous encourageons la lecture de la suite de l’ouvrage de
Singer. Pour lui un grand singe, un bonobo, serait plus une personne qu’un
nouveau-né, un handicapé mental, un être humain dans le coma. Le respect de la
personne est plus pour le premier que pour les seconds. Pour le faire il faut
être capable de dépasser une première gêne qui s’installe. Pour pouvoir rejeter
ses arguments il faut les connaître. On ne peut pas tout simplement les rejeter
sans les connaître.