(S’il m’est permis de réfléchir
comme un citoyen lambda, voici comment j’exposerai ma désolation face à ce que
me présente la politique de mon pays. Cela n’engage que ma personne et toute
ressemblance avec la réalité n’est que fortuite).
Il suffit qu’une manifestation ait lieu à Paris pour que
certains pensent que tout est réglé au Tchad. Je suis désolé de constater que
cet état d’esprit perdure chez certains, qui ne sont pas des moindres,
plusieurs décennies après les indépendances. Que pensent réellement les
tchadiens de la souveraineté ? Beaucoup se doivent certainement de
revisiter Jean Bodin, sinon dans les Six
livres de la République (1576), du moins dans le Livre I au chapitre VIII,
traitant de la souveraineté.
A quelques jours de l’élection présidentielle, force est
de constater que sur le terrain, les partis de l’opposition brillent par leur
absence. Il est difficile de connaître le projet de société que chacun propose
et oppose au régime en place.
Il y a un appel d’air. L’absence de l’opposition sur le
terrain oblige la société civile à faire le travail de celle-là. Ainsi, on a l’impression
que c’est la société civile qui est en train de faire campagne pour l’élection
présidentielle. Malheureusement cela se fait en creux. Aucun candidat en vue,
le seul mot d’ordre étant le retrait de la candidature de l’actuel président.
Du coup, on n’a rien en positif.
Mais il y a un problème sérieux qui se pose. La société
civile semble ramer contre la constitution. Comme toujours au Tchad, on se
retrouve en retard d’une bataille. Le combat qui se mène aujourd’hui est celui
qui devait avoir lieu il y a quelques années lorsqu’il était question de faire
un référendum pour sauter le verrou qui empêchait un troisième mandat. Ce
combat n’a pas été mené en temps opportun ; nous nous retrouvons dans un
combat d’arrière-garde qui semble n’avoir pas d’avenir.
Et maintenant, l’avenir semble bien tracé ; l’opposition
n’ayant pas fait son travail et ne brillant que par son absence, on semble
aller tout droit vers la réélection de l’actuel président. Sauf cataclysme de
dernière heure, on va tout droit vers une réélection. De toutes les façons
toute l’agitation menée par la société civile semble, pour les tchadiens de l’arrière-pays,
n’être qu’une élucubration d’intellectuels en mal de renommée.
Une leçon que N’Djamena n’a jamais retenue est de croire
qu’il suffit de décider pour que tout l’arrière-pays suive. Il faut le répéter
pour cela entre dans le crâne des intellectuels tchadiens : N’Djamena n’est
pas tout le Tchad. Il faut travailler de concert avec les provinces et ne pas
les mettre devant les faits accomplis. Les provinces ne sont pas des moutons de
Panurge.
Il faut espérer qu’après ces élections, une nouvelle classe
politique naisse. La jeunesse ne doit pas avoir peur des dinosaures. Ceux-ci
ont déjà fait beaucoup de mal au pays et il faut leur retirer la confiance. Les
prochaines années à venir seront des années de formations des consciences et à
la chose publique. Que la jeunesse qui prendra la place sache que la politique
ne se fait pas uniquement pendant les temps des élections.