mercredi 16 décembre 2020

Tchad : un exemple d’expression idiomatique en mongo (par Pascal Djimoguinan)

 

Pour les élèves francophones au Tchad, il a fallu attendre d’être en classe de 6ème dans le secondaire pour apprendre l’existence des expressions idiomatiques ; alors pour beaucoup, le terme idiomatique renvoie à l’anglais alors que chaque langue possède ses propres formules idiomatiques.

            Wilkipedia nous introduit bien dans ce qu’est une expression idiomatique ou un idiotisme : Un idiotisme ou expression idiomatique est une construction ou une locution particulière à une langue, qui porte un sens par son tout et non par chacun des mots qui la composent. Il peut s'agir de constructions grammaticales ou, le plus souvent, d'expressions imagées ou métaphoriques. Ainsi, chaque langue, dans un endroit donné, à son parler propre dont la traduction dans une autre langue demandera plus de vivacité d’esprit et de finesse pour éviter des bourdes.

            Il y a donc dans la longue des expressions que l’on ne peut traduire mot à mot dans une autre langue sinon on se retrouverait dans quelque chose d’incompréhensible.

            Prenons le verbe njíbə̄ en mongo qui signifie sucer dans le sens de vouloir profiter des tout derniers goûts qu’on ne veut perdre. Cela peut être le cas d’un os qu’on peut sucer jusqu’au bout. On dira donc Njíbə sīngə̄ qui signifie sucer un os. Pour quelqu’un qui suce le reste d’un sirop et du yaourt dans un sachet on utilisera donc on mongo le verbe njíbə̄. On dira donc njíbə̄ man̄ masə̄, njíbə̄ mba.

            Njíbə̄ signifie donc sucer et il n’y a pas de problème de traduction à ce niveau. Cependant il y a un cas où l’on pourrait tomber dans le piège de la traduction et faire un non-sens. Il s’agit de l’expression njíbə̄ kadə. La logique voudrait que l’on traduise cette expression par « sucer le soleil » mais loin s’en faut ; il s’agit d’un non-sens élémentaire qui pourrait faire pouffer de rire un enfant mongo de 7 ans.

            L’expression njíbə̄ kadə signifie tout simplement se chauffer au soleil. Comment cela ? C’est le propre du génie de la langue et on ne peut dire pourquoi c’est comme ça. L’hypothèse qu’on pourrait énoncer est peut-être de l’ordre de la métaphore. Peut-être que de la même façon qu’on éprouve le plaisir à sucer une denrée rare, peut-être de la même façon on éprouve le plaisir par temps de grande fraîcheur à goûter la chaleur des rayons du soleil.

            Il y a un village dans la banlieue de Doba, Bémbeudoubé, où les habitants sont connus pour le plaisir qu’ils prennent à la saison froide de se chauffer au soleil le matin. Peut-être pourra-t-on trouver chez eux l’origine de cette expression idiomatique mongo.

            Pour finir, je vous conseillerai cependant de ne pas rester trop longtemps au soleil comme les lézards car vous pourriez vous déshydrater.




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