MESSAGE DE L’AVENT 2020 A LA COMMUNAUTE CHRETIENNE, AUX HOMMES ET FEMMES DE BONNE VOLONTE
Frères et sœurs,
Et vous tous, hommes et femmes de bonne
volonté,
Le temps de l’Avent, nous fait
entrer dans une préparation intensive à célébrer la venue du Fils de Dieu parmi
nous. Dieu vient en visite chez nous pour se faire notre hôte intérieur.
Ce temps de l’Avent portera notre relation
avec Dieu et les hommes. Dieu ne change pas, mais les hommes changent dans leur
situation personnelle et plus encore dans leur situation mondiale, nationale et
ecclésiale. C’est dans cette dynamique que nous sommes orientés vers notre
Messie, Celui que les prophètes ont annoncé, qui viendra manifester sa
sollicitude pour nous.
L’Avent 2020 à une
particularité pour nous dans notre pays en général et en particulier dans notre
archidiocèse. La particularité comporte ce moment décisif de la préparation
spirituelle pour vivre Noël dans le contexte du Covid-19 et des élections
couplées dans notre pays. Ceci convoque notre position de chrétien et le sens
de notre responsabilité et de notre devoir de citoyen.
Pour ce faire, nous vous
proposons la démarche suivante : un regard liturgique sur le temps de l’Avent,
et à une implication pastorale.
I.
UN REGARD LITURGIQUE DU TEMPS DE L’AVENT
Temps de l’Attente Joyeuse Chers frères et
sœurs, le temps de l’Avent nous prépare à accueillir joyeusement la Lumière qui
vient. Nous constatons que plusieurs semblent oublier l'aspect spirituel de
cette fête alors que c’est l'incroyable mystère qui s’actualise. le Fils de
Dieu s’incarne pour sauver l’humanité, non pas dans un acte passager, mais
Jésus continue à naître et sans cesse renaître dans notre vie et au cœur de
notre monde.
La
liturgie de l’Avent nous invite à veiller, à nous tenir prêts, à nous convertir
pour accueillir Celui qui vient. C’est dans les textes et les prières
liturgiques que nous expérimentons la joie, car l’Incarnation du Fils de Dieu
nous apporte la réconciliation, la paix et la joie du salut : « Tu le vois, Seigneur, ton peuple se
prépare à célébrer la naissance de ton Fils ; dirige notre joie d’un si grand
mystère : pour que nous fêtions notre salut avec un cœur vraiment nouveau».
Cf. prière du troisième dimanche de l’Avent. Aussi l’Avent vient-il nous redire
qu’il faut consentir à l’attente, à interroger nos besoins humains pour laisser
plus d’espace à Dieu. Il nous invite à raviver notre désir d’aller au-delà de la routine du
quotidien et accéder ainsi au cœur de nous-mêmes, là où nous trouvons Dieu.
L’Avent
est un temps de vigilance et d’attente joyeuse, centré sur la personne de Jésus
que nous nous préparons à accueillir. Cette attente est aussi un moment
d’espérance et de certitude : le Seigneur est venu, il viendra dans notre monde
et dans notre vie. Notre vigilance est celle d’un cœur qui aime, d’un cœur dont
l’amour souhaite ardemment la venue de Celui qui vient s’inscrire dans notre
humanité.
Nous avons tous l'expérience de l'attente :
attendre une personne en retard, une lettre est importante pour nous. L'attente
n'est pas seulement passive mais aussi elle est bien active. Dans le verbe «
attendre », il y a le mot « tendre », avec son élan, son mouvement, son
dynamisme. À notre attente de Dieu, répond l'attente de Dieu sur nous.
Temps de
la Visite et de l’Accueil
La visite de Dieu était très attendue. Les
Psaumes (Ps 65, 10 ; Ps 17, 3) expriment une demande instante. Plusieurs
personnages des évangiles proclament que Dieu a entendu cette prière et qu’il
visite son peuple par Jésus, dès l’annonce de Jean baptiste. Ainsi, Zacharie
s’écrie : « Béni soit le Seigneur, parce
qu’il a visité son peuple », et plus loin : « l’astre venu de l’Orient (ou : le
soleil levant) nous a visités » (Lc 1, 68 et 78). A Naïn, lorsque Jésus
relève un mort, le fils unique d’une veuve, la foule s’écrie : « Dieu a visité son peuple » (Lc 7, 16).
Mais au terme de sa montée à Jérusalem, Jésus a reproché à cette ville de
n’avoir pas reconnu « le temps de sa
visite » (Lc 19, 41ss). Marthe et Marie, au contraire, chacune à sa façon,
ont reçu cette visite avec joie et empressement. (Lc 10, 38-42). Il en fut de
même pour Elisabeth, qui accueillit Marie, en s’écriant : « Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon
Seigneur vienne jusqu’à moi » (Lc 1, 43). Ce temps de préparation est un
temps de rencontre dans un accueil réciproque qui s’opère entre Dieu et nous en
son Fils notre Sauveur. Nous accueillons la visite de Dieu.
L'Avent
signifie vraiment "La Venue" de la Lumière en nous, ainsi nous devons
être prêts à accueillir le Don que Dieu veut déposer en nos cœurs.
L’Avent est un temps d’accueil qui se traduit
de façon visible : en initiatives, en gestes concrets, en temps donné, en
attention personnelle, en rupture aussi avec certaines conventions. Jésus a
fait de l'accueil un signe fort indissociablement lié à l'annonce de la bonne
nouvelle pour tous.
L’accueil
fait partie de la tradition biblique et s’ouvre à l’hospitalité. Nous avons
l’exemple de l’accueil d’Abraham à Mambré. « Trois hommes étaient debout près de lui. Il courut à leur rencontre… et
se prosterna » (Gn 18, 2-5). Tous les prophètes insistent sur l’importance
de l’hospitalité : « N’est-ce pas
partager ton pain avec celui qui a faim, accueillir chez toi les pauvres sans
abri, couvrir celui que tu verras sans vêtement, ne pas te dérober à ton
semblable ? » (Is 58, 7).
Jésus
dans les évangiles est celui qui fait de l’accueil et de l’hospitalité. «Cet homme fait bon accueil aux pécheurs et
mange avec eux !», disent les scribes et les pharisiens au début du chap.15
de Luc. «Pourquoi mangez-vous et
buvez-vous avec les pécheurs et les publicains ?» L'hospitalité que
pratique Jésus est un accueil sans discrimination des malades, bien-portants,
prostituées et publicains, scribes et chefs de synagogues.
Le prologue de Jean nous dit : «Il est venu chez les siens, et les siens ne
l'ont pas accueilli. Mais à tous ceux qui l'ont accueilli, il a donné pouvoir
de devenir enfants de Dieu.» (Jean 1, 11-12).
Et Saint Paul invite souvent à l’hospitalité
comme le Christ le ferait : « Accueillez-vous donc les uns les autres,
comme le Christ vous a accueillis » (Rm 15, 7) ou selon la lettre aux
Hébreux : « N’oubliez pas l’hospitalité :
elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges »
(Heb 13, 2).
Vivre le temps de l’Avent avec des figures
bibliques
Chers
frères et sœurs, la liturgie de l’Avent nous fait entendre les annonces
directes de la venue du Messie à travers les trois figures : d’Isaïe,
Jean-Baptiste et Marie.
La
figure d’Isaïe, par ses oracles, porte
la voix de l’espérance d’un peuple qui a su attendre au long des siècles la
réalisation des promesses de Dieu et la joie messianique. L’Avent n’a pas
qu’une seule visée et le prophète Isaïe (Is 40, 1-5. 9-11) n’ouvre qu’une
fenêtre, celle de l’attente eschatologique où de manière définitive « la gloire
sera la demeure » de toutes les nations.
Isaïe
(Isaïe 11, 1-10) nous fait aussi le portrait d’un nouveau type de société où la
corruption et le mal ne sont pas tolérés ; une société où règne l’équité, la justice,
la paix et la prospérité. Ceci n’est pas un rêve utopique, mais une réalité
chrétienne saisie avec espoir. Nous prions pour cela chaque fois que nous
disons dans la prière du Seigneur, « que ton règne vienne » (Mt 6, 10).
La
figure de Jean-Baptiste nous fait
entrer dans une attente plus actuelle. Une attente qui se nourrit de
conversion, de changement intérieur comme mouvement d’accueil de Celui qui
vient « Mt 3, 1-12). Jean Baptiste est présenté comme la figure du « petit »
auquel il convient de ressembler pour être en mesure de reconnaître le passage
du Christ. Il est aussi celui dont le désir est pur, vif et brûlant comme le
désert qu’il traverse sans autre préoccupation que celle d’annoncer celui dont
il pressent la présence et devant qui il s’efface. L’attente selon JeanBaptiste
s’apparente à un travail sur soi, une ouverture à l’Esprit Saint, un
élargissement du désir de la présence de Dieu.
La
figure de Marie conjugue en elle
l’espérance de tout Israël et l’attente du Messie. Elle s’offre pour donner
corps à la promesse et s’efface aussitôt pour l’offrir au monde.
Dans
l’évangile de St Luc, Jésus parle de ce qu’on peut appeler la béatitude de
Marie : « Or comme il disait cela, une
femme éleva la voix du milieu de la foule et lui dit : « Heureuse celle qui t’a
porté et allaité ! » Mais lui, il dit : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la
parole de Dieu et l’observent ! » (Lc 11, 27-28). L’attitude de Marie est
de garder et de méditer la Parole de Dieu dans son cœur. (Cf. Luc 2, 19).
Le
vrai bonheur, la vraie joie de Marie, c’est qu’elle écoute la Parole de Dieu et
la garde, comme tous sont appelés à le faire. Elle vit en elle
l’accomplissement de la promesse faite au peuple d’Israël et désormais à tous
les peuples.
La liturgie du temps de l’Avent exalte
l’attitude de foi et d’humilité de Marie qui adhère totalement et avec
empressement au plan de salut de Dieu. Elle met en évidence la présence de
Marie dans les événements de grâce qui précédent la naissance du Sauveur.
II.
UNE IMPLICATION SPIRITUELLE ET PASTORALE
Chers
frères et sœurs, voici une démarche pour le temps de l’Avent à vivre seul(e),
en famille ou dans les mouvements, fraternités, et groupes de prière et au
final comme communauté paroissiale. En d’autres termes, apprendre à s’offrir du
temps pour soi avec Dieu au cœur de notre société.
Ecouter la Parole de Dieu
Comment
se préparer à la venue du Fils de Dieu sans se mettre à l’écoute de la Parole
de Dieu ? Celui que nous attendons, c’est le Verbe, la Parole qui s’est faite
chair. Pour vivre ce temps de l’Avent, l’attitude requise est celle que le prophète Isaïe nous enseigne : « …Il
éveille chaque matin, il éveille mon oreille pour que j’écoute comme un
disciple » (Is 50, 4).
Les
textes bibliques annoncent la venue du Seigneur. Ils nous demandent d’être
éveillés, d’engager tous nos sens et spécialement les sens intérieurs, afin que
nous puissions voir ce que le Seigneur fait et comment il provoque
l’accomplissement de ses promesses.
Prier
avec les préfaces et oraisons
L’aspect
eschatologique des textes liturgiques de ce temps de l’Avent, oriente l’Église
vers la venue glorieuse du Christ. C’est ce que nous retrouvons dans la
première préface du temps de l’Avent : « Car
il est déjà venu, en prenant la condition des hommes, pour accomplir l’éternel
dessein de ton amour et nous ouvrir le chemin du salut, il viendra de nouveau
revêtu de sa gloire, afin que nous possédions dans la pleine lumière les biens
que tu nous as promis et que nous attendons en veillant dans la foi. » Et comme
préparation immédiate à la fête de Noël, la deuxième préface du temps de
l’Avent, nous introduit dans l’accomplissement des promesses divines: « Il est
celui que tous les prophètes avaient chanté, celui que la Vierge attendait avec
amour, celui dont Jean Baptiste a proclamé la venue et révélé la présence au
milieu des hommes. C’est lui qui nous donne la joie d’entrer déjà dans le
mystère de Noël, pour qu’il nous trouve, quand il reviendra, vigilants dans la
prière et remplis d’allégresse. »
Entrer
dans l’Avent, c’est discerner plusieurs voix
La réalité actuelle de notre pays est marquée
par plusieurs voix. A l’approche des élections, chrétiens, musulmans et adeptes
de la religion traditionnelle seront convoqués à être à l’écoute de plusieurs
voix qui vont retentir. Mais d’une manière concrète, l’écoute de la Parole de
Dieu, nous donnera la capacité de discerner entre les différentes voix, de
savoir reconnaître celles qui apportent le bonheur, le bien-être, dans le choix
des candidats, pour l’intérêt du peuple centrafricain.
Il y a
toujours un moment de jugement et de décision. Nous ne pouvons rester neutres
en présence du Christ. Il nous demande de choisir, et c’est pourquoi nous avons
besoin de la grâce pour juger sagement les choses de la terre et de tenir
fermement aux choses du ciel.
Les voix et gestes sont à nos portes : sel,
argent, tee-shirts sont distribués. Ils viendront chez nous avec des belles
paroles et des promesses. N’oublions pas que nos choix sont déterminants pour
des leaders qui porteront nos attentes. Alors pour nous ce temps qui est
délicat, nous sommes invités à nous
tenir prêts, et être des veilleurs qui scrutent les signes des temps, pour ne
pas nous faire piéger.
Dans la lettre pastorale des Evêques de
Centrafrique « FAIS SORTIR MON PEUPLE » du dimanche 6 septembre 2020, à
l’occasion des élections couplées, le numéro 47 nous met en garde contre
certaines attitudes négatives qui manqueraient au respect des autres : « La campagne électorale ne vous offre pas
l’occasion d’insulter, ni de menacer vos adversaires politiques, ni de faire
pression sur les instances de gouvernance électorale (ANE, Cour
Constitutionnelle), ni de faire des promesses irréalisables. Nous encourageons
les débats contradictoires pour permettre aux électeurs de mieux connaître vos
programmes en vue de se décider en toute connaissance de cause ».
Appel pressant aux agents pastoraux à la
vigilance
Le temps de l’Avent sera mouvementé par les
campagnes électorales de différents candidats, et certains d’entre eux seront
tentés de se rapprocher de vous les agents pastoraux, sollicitant vos tribunes
pour passer leurs messages. Dans le même esprit des évêques de Centrafrique,
vous recommande ceci : « En invitant et
en formant les fidèles à la conscience civique, nous vous recommandons de
rester discrets sur vos choix et vos préférences politiques. –Evitez que les lieux de culte ne deviennent des
tribunes pour les campagnes électorales diffusant des messages politiques
partisanes car « il est écrit : Ma maison sera appelée maison de prière » (Mt
21, 13) ; - Appeler les fidèles à être chrétiens dans leur vote » Cf. Dans la
lettre pastorale des Evêques de Centrafrique « FAIS SORTIR MON PEUPLE » du
dimanche 6 septembre 2020, à l’occasion des élections couplées, n° 67.
Entrer
dans l’Avent, c’est affronter le monde des ténèbres
Notre
monde est caractérisé aussi par les ténèbres de la violence, de la haine, du
tribalisme qui tentent d’en prendre le contrôle. Il n’est pas facile
d’accueillir dans ces circonstances Jésus Lumière. Pourtant, c’est précisément
au moment de grandes ténèbres qu’il nous faut de la lumière, car l’Avent nous
prépare à accueillir la Lumière qui vient. C’est le chemin de conversion !
Temps de conversion
Nous désirons que la Lumière rayonne! Mais
pour cela, nous savons qu'il nous faut changer de vie. Face à la pandémie du
covid-19, nous sommes invités à revoir notre manière de vivre, aidés par les
recommandations de la diocésaine (mesures barrières obligatoires: port des
masques, lavage des mains et distanciation physique). Ainsi, la Lumière cachée
au fond de nous pourra jaillir autour de
nous! Sur le chemin de la conversion, la prière, l'écoute de la Parole de Dieu,
l'accueil et la vie communautaire paroissiale peuvent nous aider.
Temps d'espérance
Nous
croyons en un monde nouveau. Nous savons que cet avenir passe par l'homme: Le
Tout Autre attend de nous que nous devenions des semeurs de lumière, de paix,
de pardon, de joie, d'amour, de tendresse, à l'exemple de Jésus.
Oui, nous l’espérons fortement, malgré les
ténèbres sur la terre, la Lumière va rayonner sur le monde!
Chers
frères et sœurs, l’Avent nous invite à choisir et à nous mettre en route sur
une nouvelle voie, celle du Seigneur. Pour préparer Noël avec tout son cœur,
nous vous proposons trois espaces : un espace biblique, c’est pour découvrir
des graines de la Parole de Dieu ; un espace de méditation qui permet de
nourrir la réflexion et la prière et un espace de témoignage, pour rendre plus
visible les différents fruits de notre expérience de l’écoute de la Parole de
Dieu.
Le temps de l'Avent est un temps d'attente, de
préparation, d'accueil, de méditation, de prière, de conversions et
d'espérance...Temps d'attente qui dit notre confiance, notre fidélité mais aussi notre désir de Dieu en
nous et autour de nous.
Dans l’Avent, Dieu nous donne le temps de nous
renouveler et d’établir de nouveau les valeurs vraies et durables qui informent
et gouvernent nos vies. (cf. Mt 24, 37- 44)
Marie,
notre Mère et Notre Dame de l’Oubangui, prends-nous par la main, et montres-nous
le chemin de la venue véritable de ton Fils.
Donné à Bangui, le 29 novembre 2020, 1er
dimanche de l’Avent
S. Em Dieudonné
Cardinal NZAPALAINGA, C.S.Sp
Archevêque
Métropolitain de Bangui
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