(Dans
l’anthropologie Sara, au sud du Tchad, tout comme chez de nombreux peuples en
Afrique, la distance entre les différents êtres n’est pas très grande. Il est
courant de parler d’animaux qui se transforment en êtres humains, des plantes
qui prennent une forme humaine. Il est également question de certains hommes
qui, forts d’un certain savoir ésotérique, se transforment en animaux. Nous
donnons ici un conte qui véhicule cette idée d’animaux qui se transforment en
êtres humains.)
Des éléphants allèrent se laver dans la rivière. Ils
enlevèrent leurs peaux, devinrent des humains et prirent leur bain en devisant
allègrement.
Survint un homme, c’était un chasseur. Lorsqu’il vit les
peaux d’éléphants, il prit celle d’une jeune fille, très belle et la cacha dans
un buisson puis se cacha lui-même et attendit.
Lorsque les éléphants finirent de prendre leur bain, ils
sortirent et reprirent leurs peaux. La jeune fille chercha en vain la sienne.
Ses compagnons partirent en laissant la pauvre désespérée. Celle-ci continuait
de chercher sa peau sur la rive.
Le chasseur sortit de sa cachette et feignit l’innocence.
Il demanda à la fille ce qu’elle cherchait. Celle-ci lui répondit :
« J’ai perdu quelque chose ».
Il lui proposa d’aller avec lui au village. Ils y allèrent et le chasseur
construisit pour elle une grande case qu’il entoura de palissade de secco. Le
chasseur épousa la jeune fille et ils eurent beaucoup d’enfants.
Le chasseur avait caché la peau d’éléphant dans son
grenier à mil. Un jour, alors que le mil du grenier était presque fini, alors
que le mari était au champ, la femme envoya les enfants au grenier chercher un
peu de mil pour la boule. Les enfants virent au fond du grenier presque vide quelque
chose de bizarre ? C’était… vous l’avez sans doute deviné : une peau
d’éléphant. Ils firent part de leur étonnement à leur mère. Celle-ci leur
dit : « Laissez-moi voir ! »
Quand elle aperçut la peau d’éléphant, elle ne put retenir sa joie car elle avait
reconnu sa peau. Elle la retira du grenier, l’étendit par terre, puis la
revêtit et elle redevint un gros éléphant.
Elle se mit à marcher, à tourner autour de ses enfants, à
casser les arbres en poussant des barrissements. Elle se rendit au champ où se
trouvait son mari. Elle l’emporta et laissa à sa place le « tar »,
une plante magique qui prit la forme du cadavre de son mari. Les compagnons du
chasseur enterrèrent le cadavre. Depuis ce jour, les enfants de la femme
prirent comme totem l’éléphant.
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