Il est courant d’entendre dans toutes les discussions les
éloges de la polygamie africaine. Pour beaucoup, ce serait une valeur qui sort
du fond des âges et qu’il faudrait absolument garder. On n’a jamais cherché à
préciser de quoi on parlait exactement, ce qui fait que chaque fois que l’on
parle de la polygamie africaine, on est en plein dans l’idéologie. La polygamie
africaine ne serait-elle pas en réalité sinon une grande supercherie, au moins
un pis-aller.
Plutôt que de s’engager dans les méandres d’une
discussion qui serait d’avance biaisée, relevons tout simplement quelques
éléments que l’on rencontre dans le traitement des épouses là où il y a la
polygamie. Nous allons cibler les mongos, au sud du Tchad dans le Logone
Oriental pour notre étude.
De prime abord, la première épouse jouit d’un statut
particulier, privilégié. C’est pratiquement la seule épouse dont les cérémonies
des épousailles sont entièrement célébrées.
Après la cérémonie de la dot, lorsque la première épouse
est accompagnée chez son époux, celui-ci doit payer avant que la famille de la
femme n’installe le foyer qui donnera à celle-ci le droit de faire la cuisine
dans son foyer. Elle devient la titulaire du foyer. Désormais, si le mari
épouse une autre femme, pour que le foyer soit installé, c’est à la première
femme qu’il faudra payer et il faut son accord pour que cela se fasse. Sans
cela, la seconde épouse ne sera toujours que comme de passage, sans être
définitivement installée.
Par son mariage, la première épouse acquiert un droit sur
le grenier du mari. Elle seule, parmi les autres épouses, a le droit d’entrer
dans le grenier et de distribuer le céréale qui s’y trouve.
Il y a bien de règles à propos des champs. La première
femme doit être la première à aller au champ avant que les autres ne puissent
s’y rendre.
Au moment des récoltes, même dans les champs des épouses,
celles-ci ne peuvent pas commencer la cueillette du produit sans qu’elles
n’aient demandé à la première épouse de venir commencer symboliquement en
ramassant quelques gombos.
A la mort de la première épouse, ses droits ne passent
pas automatiquement à la seconde épouse. Il faudra que celle-ci puisse payer
les droits de regard sur les greniers et sur les partages des récoltes à la
famille de la défunte pour pouvoir officier comme titulaire.
Comme nous pouvons le constater, c’est improprement que l’on
parle de polygamie dans la culture mongo ; finalement, le mari n’a qu’une
seule femme et les autres sont des concubines officielles. Au lieu de
polygamie, on devrait plutôt parler de monogamie « élargie ».
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