Les anthropologues nous ont appris que ce qui différencie
les humains de leurs congénères animaux, c’est le respect aux morts et tout le
rite qui l’entoure. Depuis la nuit des temps, l’homme a accordé aux funérailles
une très grande importance. Cependant, nous sommes en droit de nous interroger
si au Tchad, nous ne sommes pas en train d’assister à un changement de
paradigme parce que toute la simplicité et le respect est en train de faire
place à un mercantilisme effréné et à une démonstration abusive de richesse
avec des dépenses exagérées ?
La célébration de la mort au Tchad a pris ces dernières
années une allure inquiétante. Il ne s’agit plus de recueillement pour faire
mémoire du disparu mais étalage de tout ce que la famille peut avoir comme
richesse, au risque de s’endetter.
Alors que très peu de personnes n’interviennent pour l’hospitalisation
et l’achat des médicaments pendant la maladie, le décès provoque une folie généralisée.
Autrefois, les obsèques du défunt se faisait dans les
jours qui suivaient le décès. Aujourd’hui, il est de bon ton de laisser passer
au minimum une semaine (en conservant le corps à la morgue) avant de procéder à
l’enterrement. Pendant ce temps, les membres de la famille se réunissent chez l’un
d’eux pour le deuil.
Ce temps d’attente qui s’allonge d’année en année, vide
les bureaux car les personnes éprouvées, tant qu’elles n’auront pas enterré
leur parent, ne vont pas au travail. Les dossiers peuvent s’empiler sur les
tables, on verra cela plus tard.
Dans les lieux de recueillement, il faut bien nourrir
chaque jour le monde qui se réunit. Il faut que la nourriture soit abondante
pour éviter d’éventuelles critiques qui ne manqueront pas. Il faut donc prévoir
un bon budget pour cela.
Les membres de la famille du défunt les plus proches
doivent songer à acheter des uniformes pour l’enterrement. On a pris l’habitude
de l’appeler « d’honneur » (cela vient des filles d’honneur qui, lors
des mariages, s’habillent d’une manière spéciale).
Dès la veille de l’enterrement, il faut penser à la chapelle
ardente. Il y a des agences de location des bâches et des meubles pour
construire ce lui où le mort sera exposé. Chacun cherche à louer les meilleures
chapelles ardentes. Il faut épater la galerie, tant pis pour le portefeuille.
Autrefois, au fur et à mesure que les gens arrivaient au
lieu du deuil, ils allaient voir le corps du défunt. Maintenant, tout est
organisé, ritualisé. On attend le moment de la visite du corps. Alors, un long
défilé passe pour regarder pour la dernière fois le corps. C’est le moment de
toutes les exubérances, surtout du côté des femmes ; il y en a qui perdent
connaissance (toujours les mêmes) et qu’il faut transporter. Cela fait partie du
décor.
Une fois que la cérémonie a eu lieu, on peut maintenant procéder
à la levée du corps et aller au cimetière pour l’enterrement.