Lorsqu’on vient de la province à N’Djamena, il est des
expressions qu’il ne faut surtout pas prendre au premier degré et dont une faut
faire une analyse sémantique et sémiologique avant d’en faire état.
Ainsi, il y a une expression que tous les N’Djamenois
comprennent spontanément mais que tous les autres tchadiens ne peuvent en
aucune façon imaginer ce que cela signifie : « Tapis rouge ».
Quand on parle de tapis rouge à N’Djamena, il faut
annuler son programme et ne pas bouger de la maison si l’on ne veut pas se
retrouver coincer quelque part sur une route, à moins que l’on ne soit dévié
sur une route qu’on ne connaît pas.
J’ai appris cette expression ce mardi 19 novembre. Un ami
qui était passé me voir s’est excusé d’être en retard parce qu’il y avait « tapis
rouge » sur l’avenue Mobutu Sese
Seko.
Je n’ai pas réagi à cette information car je ne
comprenais pas pourquoi on devait mettre un tapis rouge sur cette avenue. J’ai
tout simplement pensé que les n’djamenois devaient être des gens excentriques
pour mettre des kilomètres de tapis rouge sur une route.
Quelque temps après alors que nous nous apprêtions à
partir vers Moursal, mon ami me dit qu’il espérait bien qu’on nous laisserait
passer… Sur l’avenue Mobutu, je voyais des véhicules circuler et mon ami me fit
comprendre qu’on pouvait passer. Je vis des hommes en arme tout au long de l’avenue
mais la circulation était fluide.
Nous allâmes jusqu’à moursal où mon ami arrêta son
véhicule et entra dans un magasin pour faire des courses. C’est alors que je
vis des policiers siffler. Les militaires se mirent en mouvement dévièrent
toutes les voitures qui passaient. Même les piétons devaient s’arrêter de
marcher. En un instant, il n’y avait plus aucune circulation. Alors, une
voiture de police passa avec les gyrophares et la sirène. Des véhicules
officiels roulaient à toute vitesse, faisant la course avec des toyotas pleins
de militaires, remontant l’avenue Mobutu vers la ville. C’était le président de
la République qui passait.
Quelques minutes après, j’apprenais par un tweet que le
Président venait de procéder à l’ouverture
solennelle de la Conférence des Ambassadeurs, assises devant leur permettre de
donner un nouvel élan à l’action diplomatique et au rayonnement du pays sur la
sphère internationale.
Un déclic se fit alors en mois. A N’Djamena, on parle de « Tapis
rouge » quand le président doit passer quelque part et que toute l’avenue
qui mène vers cet endroit et la circulation y est bloquée par des hommes en
armes.
Je vais donc repartir de N’Djamena plus instruit qu’avant.
Désormais, avant de sortir de chez moi, je demande aux gens s’il n’y a pas « Tapis
rouge. On s’adapte vite aux habitudes des gens.