Par liberté, nous entendons communément le pouvoir de choisir
entre plusieurs actions possibles. Nous sommes libres, pensons-nous, quand nous
nous déterminons nous-mêmes. Nous nous posons tels des spectateurs face à une
scène. Nous faisons un schéma : une route avec plusieurs directions qui
correspondent aux choix possibles. Mais là est notre erreur. Nous ne sommes pas
spectateurs de nos actions et quand nous faisons un schéma, nous transformons
la réalité.
Quand j’agis, et c’est bien là que se pose la question de ma
liberté, je ne suis pas spectateur, mais acteur. Quand nous sommes spectateurs
d’un acte, nous nous le représentons de la manière suivante :
1) conception de l’acte ;
2) délibération ("Que vais-je faire ou que dois-je faire
?") ;
3) décision ("Je vais agir comme cela") ;
4) exécution ("J’agis").
Et ceci, sur
la ligne du temps. Tout cela suit un ordre : la conception (t1) détermine la
délibération (t2) qui détermine la décision (t3) qui détermine l’exécution
(t4).
Mais là encore, cela ne correspond pas à la réalité. Il n’y a
pas des instants séparés les uns des autres. De tels instants n’existent pas.
La réalité ne se découpe pas. La durée est indivisible.
Qu’est-ce
alors qu’un acte libre ? C’est l’acte pour lequel
je suis tout entier dans mon acte et non dispersé par des fausses
représentations. Se dire qu’il y a des moments séparés qui déterminent le
moment suivant, c’est encore se raconter une histoire, c’est jouer la comédie,
c’est encore se faire du cinéma ! Il faut arrêter de se raconter des histoires
: l’acte libre est celui dans lequel je suis tout entier engagé.